Dernière lune sous la neige [chasse Lux]

Dernière lune sous la neige

Ft Zoro

Zoro était connu pour avoir un caractère de cochon, mais il faisait en général preuve d’une étonnante patience avec Luxanna. Cela expliquait probablement qu’il se contenta d’une remarque un peu sèche lorqu’elle lui parla d’un ton froid pour la deuxième fois consécutive. Elle n’avait pas répondu, s’était contenté d’essayer de se détendre un peu et de s’armer de courage pour la suite. Elle avait tenté une approche particulière du Sennou, ce que releva directement le guerrier. Consciente de son plan bancal, la petite magicienne baissa les yeux avant de répondre.
“ - Je sais que ça ne paie pas de mine… Mais je n’ai pas d’autres options. Malgré toutes mes recherches, je n’ai rien trouvé. Le fonctionnement de cet enchantement est tenu ultra-secret par son inventeur.”

Lux releva son regard pour tenter d’apporter du crédit à la suite de ses propos.
“ Mais pour répondre à ta question, c’est comme ça que l’enchantement apposé sur mon esprit s’est brisé. Je pense qu’il s’affaiblit avec le temps, et que lorsque mon esprit a été mis en face des contradictions entre certains souvenirs non modifiées, certaines croyances, et certains souvenirs modifiés, il s’est rebellé jusqu’à faire disparaître l’enchantement. C’était loin d’être agréable. Autant la libération, que la suite. Quand tu récupères tous tes souvenirs, que tu te rappelles de choses horribles que l’enchantement avait camouflés …”
Le pire souvenir en question, c’était l’application du Sennou dans la salle du trône. L’incapacité de se planter une dague dans le cœur plutôt que de subir cela. Elle en eut un frisson.
“ - Mais pour en revenir au sujet principal, l’avantage c’est que tu es sous l’emprise de ce sort depuis plus longtemps que moi. Il doit être encore plus affaibli que ne l’était le mien quand il s’est brisé.”

Mais Zoro, non content de questionner la méthode, questionna l’objectif. Lux en fut presque blessée.
“ - Tu penses vraiment que je pourrais te manipuler ?”
Elle le fixa intensément.
“ - Regarde-moi Zoro. Après tout ce qu’on a vécu tu n’as pas confiance en moi ? C’est moi, c’est Lux.”
Dans sa voix il y avait une note de désespoir. Si Zoro refusait d’essayer avec elle … elle ignorait ce qu’elle pourrait faire. Elle n’avait pas de plan B. Pas d’issue de secours. La convocation de Sou Reï l’avait piégée. Elle quittait ses terres aujourd’hui, et elle devait partir avec Zoro. Celui-ci avait une énième question, qui tira une mine embêtée au joli minois de Lux.
“ - Je sais bien que ça fait louche, mais je ne peux pas te le dire. Si on veut briser cet enchantement, il faut être malin. Y aller de manière progressive.”
Elle ne pouvait pas se permettre qu’il ne lui fasse pas confiance. Aussi, elle attrapa lentement le poignard qu’elle avait enchanté pour guider Zoro à travers la neige, qu’il avait gardé depuis. Elle le saisit, le plaça dans la main du guerrier.
“ - Je te jure sur ma vie que je ne cherche pas à te manipuler, que j’essaie vraiment de t’aider, et qu’il y a bien quelqu’un qui a modifié nos esprits pendant les derniers mois.”

Contextuelle:

Dernière lune sous la neige [chasse Lux] - Page 2 Ed3c2810

"The world has seen enough darkness"_Lux

Dernière lune sous la neige

Les longues et périlleuses recherches que lui dissimulaient Luxanna depuis des semaines s'étaient soldées par un échec, ainsi la jeune fille se résolut à tenter le tout pour le tout en confrontant directement le sabreur par le dialogue, pour le moment peu convaincu. Visiblement, cet énigmatique enchantement dont le bretteur serait apparemment victime ne souhaitait pas révéler sa complexe notice. Se montrant sceptique face à cette histoire plus que louche, l'homme surveillait le moindre changement facial de sa blondinette, comme dans l'objectif de percer la supercherie à jour. Pour le moment, il croyait dur comme fer que la possédée de l'affaire, c'était elle et qu'elle essayait de l'entraîner dans sa chute contre son gré. En effet, si la belle était assujettie à un maléfice, elle ne savait pas ce qu'elle faisait, ne contrôlait ni ses paroles ni ses actes, ce qui la déresponsabilisait d'office à l'œil du sabreur. De ce fait, bien qu'il n'appréciait pas ce qu'il se passait, il n'en voulait absolument pas à celle qu'il aimait. Elle était la victime dans cette histoire.

Le pirate partait du postulat que Luxanna n'était plus elle-même à cette heure. De nombreux détails appuyaient sa théorie. Premièrement, la seule personne qui avait changé drastiquement de comportement depuis leur rencontre, c'était elle, récemment. En effet, du point de vue des souvenirs tronqués de l'épéiste, elle n'avait par exemple jamais exprimé une quelconque réticence envers Sou Rei. Le seul changement notable se résumait à ce drôle de comportement qu'elle arborait depuis quelques semaines, froide, distante et à fleur de peau. Ses sautes d'humeur inhabituelles attestaient que sa personnalité avait été sabotée. Deuxièmement, ses explications s'avéraient bien maigres, faciles et sans queue ni tête : aucun socle solide pour appuyer ses propos. Elle se reposait uniquement sur le potentiel de ses yeux angéliques qui espéraient hypnotiser le samouraï coûte que coûte. Une espèce de regard suppliant qui ne laissait pas le cheveux vert indifférent, tel était son seul argument, diablement efficace ! Mais etait-ce suffisant pour déstabiliser la raison de l'épéiste ? Il ne fallait pas oublier que si Zoro n'était certes pas le couteau le plus aiguisé du couloir, cela ne l'empêchait pas d'utiliser sa raison bien plus que ses émotions, du moins dans une majorité de cas. Sur le bateau avec Luffy et les autres de l'époque, il endossait parfois le rôle de celui qui ramenait l'équipage sur terre quand ils commençaient à partir en couilles, de part son côté absolument cartésien. De ce fait, les beaux yeux de sa belle ne pesaient pas assez lourd contre la rationalité renforcée par l'influence du sennou qui se défendait comme il le pouvait.

- S'il s'était affaibli, je ressentirais quelque chose de changée... Or, la seule chose qui a changé dans cette pièce, c'est toi.

Elle continua de faire fausse route en invoquant comme argument d'autorité : la confiance. Le bretteur ricana nerveusement, la reluquant avec condescendance :

- C'est exactement ce que dirait quelqu'un qui tente de me rouler. Trouve autre chose... Qui que tu sois, tu n'es pas Lux.

Peut-être que Luxanna aurait tout intérêt à convaincre son amant en le confrontant à des incohérences mémorielles plutôt qu'en essayant de l'amadouer par les sentiments ? Il n'était pas sensible et ému face aux yeux doux de cette femme, seule la logique semblait posséder un poids actuellement car ce n'était pas sa Lux, il ne parvenait plus à l'identifier. Menacé, le sennou se mettait en état d'alerte et accentuait la méfiance naturelle du bretteur fois dix; à la limite d'un début de paranoïa. Il ne parvenait plus à reconnaître celle qu'il aimait, exagérant ses infimes changements d'attitudes de ces dernières semaines liées à son inquiétude en "changement radical". Il ferma son unique oeil ouvert, développant un début de migraine inexplicable. Et puis, évidemment, elle faisait le coup du " je ne peux pas te dire "... Oui... Parce que la personne concernée était certainement la responsable de tout ce cirque, la responsable de l'état de Lux. Ce foutu insecte qui lui faisait l'affront de lui mentir :

- Evidemment... Tu ne peux pas me le dire, hein ? Que c'est surprenant..

Murmura sarcastiquement le jeune homme. Comment voulait-elle établir un lien de confiance en lui dissimulant des choses ? Pourquoi n'essayait-elle pas de lui expliquer la vérité, toute la vérité ?

Ce fut alors que la demoiselle vint se saisir du poignet du sabreur pour placer le poignard lumineux contre sa paume. Le contact inattendu et glacé de l'objet contre sa peau chaude le fit frémir et rouvrir son iris, grisée par la colère, instantanément. Quelle folie cette saloperie tentait-elle encore d'opérer pour le persuader ?

- Quoique que tu essayes de faire, ne le fais pas et ramène-la, monstre...

Oui, la théorie selon laquelle une créature diabolique ait pénétré l'esprit de sa blondinette devenait la théorie la plus probable. A vrai dire, ce qui aurait pu être émis comme une simple hypothèse en temps habituel car de nature sceptique, le sennou le lui confirmait comme s'il s'agissait de la seule explication tenable. Tout ce qu'était Zoro, le sennou l'intensifiait. Ainsi, ses doutes se transformaient en certitudes, sa méfiance en paranoïa, ses micros gènes en malaise général et sa nonchalance en cynisme.

- Rien ne tient. Comment peux-tu penser que je goberais une histoire pareille aussi gratuitement ?

La railla-t-il, odieux au possible car insulté dans son ego, ou dans son sennou ? Comment cette petite effrontée osait-elle le prendre pour un jambon ? Un manque de respect inouï ! Il s'agitait légèrement, serrant subitement le manche du poignard, abaissant la tête avant de prononcer sur un ton sombre :

- Je ne sais pas à quoi tu joues, ni d'où tu viens, ni ce que tu veux.. Mais je te conseille de..

Il s'interrompit avant de prononcer la fin de ses menaces, relevant silencieusement la tête, d'un air subitement calme et ferme. Il observa un instant la princesse, sévèrement, et prit à son tour son petit poignet pour y replacer le poignard. Il l'obligea à refermer sa poigne autour du manche et dirigea son frêle poignet de force de façon à ce que la pointe de la lame se retrouve contre sa propre poitrine, prête à percer son cœur. Il décala de sa main libre son kimono pour que la femme ait accès à la chair de l'homme. A sa guise, elle était en position de le planter.

- Transperce-moi le cœur, qu'on en finisse. Je refuse d'écouter ton numéro ridicule plus longtemps. Je ne te permets plus de jouer, d'insulter les sentiments que je ressens pour cette femme.

Il imaginait que le but de la manœuvre de cette créature, c'était de le tuer. Mais en tant qu'être largement inférieur en terme de puissance, elle avait élaboré ce stratagème pour l'affaiblir et le prendre en traître. Il préférait aller droit au but et lui faciliter la tâche car cette chose l'insupportait inexplicablement, de façon de plus en plus irrationnelle.

Fiche (c) Espe

Dernière lune sous la neige

Ft Zoro

Dans sa croisade contre le Sennou, la magicienne rencontrait une première difficulté : la paranoïa du sabreur. Ce dernier était déjà d’un naturel méfiant - surtout en comparaison de sa dulcinée, l’enchantement qui manipulait son esprit décuplait ce trait de caractère au grand damn de la demoiselle. Elle avait espéré de toute son âme que le lien entre eux pouvait repousser cette méfiance. Qu’il lui faisait confiance, suffisamment pour la laisser faire. Mais elle n’avait pas envisagé que quelque chose de bien plus fourbe ne se mette en travers de son chemin. Le problème n’était pas qu’il se défiait de Lux. Le problème, c’était qu’il pensait qu’un usurpateur se tenait devant lui.

Alors qu’il énonçait sa théorie, la magicienne demeura muette. Prise au dépourvue, elle ne savait plus quoi dire. Comment passer par-dessus une telle méfiance ? Il semblait que tout ce qu’elle pouvait dire serait retenu contre elle. Sous ses grands yeux bleus qui affichaient un air surpris, le guerrier empoigna sa main, la força à fermer le poing sur le manche du poignard, et le dirigea contre son cœur. Pourquoi faisait-il ça ? Si vraiment il croyait que ce n’était pas Lux, pourquoi il ne la combattait pas ? Il aurait pu dégainer un katana, voir trois, et mettre fin à ce qu’il estimait être une mascarade d’un coup de sabre. Pourquoi prendre ce risque ? Elle ne comprenait pas.

Elle ne comprenait pas, mais elle vit là une opportunité de réveiller des souvenirs chez le guerrier. Elle posa sa main libre sur celle de Zoro, pour qu’il libère la seconde, qu’il tenait encore. Une fois qu’elle eut récupéré le contrôle de son bras, elle jeta le poignard derrière elle, qui atterrit sur une botte de foin, dans un geste exactement similaire à celui du sabreur, environ deux ans auparavant.

Il obtint sa réponse, tandis qu'un relâchement soudain se manifesta en lui. Au même moment, les muscles tendus de la demoiselle se décontractèrent, sa gorge tonique vint s'attendrir, laissant la lame pénétrer sa chair légèrement plus. Un infime petit filet de sang perla hors de son petit cou élégant et le pirate balança subitement le poignard dans le vide à côté d'eux.

Puis elle esquissa un sourire.
“ - Je triche, si il y avait vraiment eu une centaine de mètres de vide derrière moi je ne l’aurais pas jeté, j’avoue.”
Sans crainte, elle se leva et contourna deux bottes de paille pour aller le récupérer.
“ - Je tiens trop à ce poignard pour le jeter d’une falaise.”
Une fois qu’elle le récupéra, elle le glissa dans sa ceinture et revint se tenir devant Zoro. Elle était grande. Presque autant que lui.
“ - Je comprends que tu te méfies. Accorde-moi un peu de temps pour te prouver que c’est moi. Qu’est-ce que tu risques de plus de toute façon ? Tu étais prêt à me laisser te poignarder. ”

Cette fois, elle ne se rassit pas. Elle resta tout près de Zoro. Elle pouvait sentir son odeur, observer la tension dans sa mâchoire. Elle reprit à voix basse.
“ - On s’est rencontrés à Feng. Une histoire étrange avec un philtre dont on a voulu trouver l’antidote. C’était … compliqué au début. Tu as un caractère de cochon, tu le sais ça ? C’était un peu électrique. Tu m’as même tirée dans les rues avant de me jeter par terre, espèce de goujat. Tu voulais tellement trouver une solution à ton problème. On aurait dit que ce philtre, qu’il se soit activé sur moi … On aurait dit que c’était la pire chose qu’il puisse t’arriver.”

Alors qu’elle raconte, Luxanna se remémorait aussi leur rencontre. Une vague de nostalgie l’emporta, mais loin de se sentir noyée, elle était comme une barque bercée par les flots.

“ - On a finit par trouver un antidote, chez un marchand bizarre. Tellement bizarre que ses … femmes nous avaient attaqués, et que j’avais pris l’un de tes sabres pour me défendre. J’ai appris à ce moment à quel point tes sabres te sont précieux. Mais jusque-là, tous ceux qui l’avaient bu s’étaient suicidés. Alors j’étais super inquiète. Et tu as accepté qu’on attende le lendemain ensemble pour me rassurer.

Et j’ai appris à te connaître. A voir plus loin que ton caractère de cochon. Tu m’as emmenée en haut des montagnes les plus proches de Feng. On a passé la nuit sous les étoiles. Tu as jeté ce poignard du haut de la falaise après avoir “testé” je ne sais quoi. Et quand tu es parti … Je n’ai pas pu m’empêcher de le récupérer. Et je l’ai gardé. Il a changé de main entre toi et moi quelques fois depuis. Mais j’y tiens vraiment.”

Elle plongea son regard dans le sien.

“ - Et jamais je ne m’en servirai pour te blesser.”

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Dernière lune sous la neige

Il ne la combattait pas car quelle que soit la créature maléfique derrière ce mauvais tour, il s’agissait du corps de Luxanna. Il en était convaincu. Sensitif, il ne se ferait pas tromper par un artifice de cette envergure. Par conséquent, découper le corps de sa future fiancée ne faisait pas partie des options envisageables. En revanche, il émettait un puissant doute sur la personne au contrôle de son esprit. Ainsi, si les plans de l’entité ou de la chose aux manettes de Luxanna visaient à l’assassiner lui, il leur ouvrait grand les portes, leur facilitant l’accès. Une manière de mesurer les intentions de sa chère et tendre.

A la place, elle emmena délicatement sa main vers celui du bretteur pour permettre de se libérer. Il la laissa agir comme bon lui semblait, attentif au moindre de ses faits et gestes dans le but de la débusquer à vif. Cependant, elle ne tenta rien de démesuré, à croire que ce qui la manipulait était soit perverse, soit maline, soit espérait autre chose que la mort du cheveux vert. Probablement prendre le contrôle du guerrier également, la théorie la plus plausible actuellement.

Le fil de ses réflexions s’interrompit par un geste surprenant et incompréhensif de la part de sa dulcinée possédée. Prise par un élan dont on ne savait où, elle balança le poignard sur une botte de foin en arrière, attestant de sa bonne foi. Noyé dans sa paranoïa, les connexions avec cette scène du passé ne s’établirent pas de suite. Il tentait tout d’abord de chercher un sens nécessairement malveillant à cet acte mais son sourire radieux vint le perturber. Elle exprima, avec ce petit air attendrissant propre à sa jolie poupée, tricher car le poignard ne fut pas jeté dans le ravin comme la scène originelle. Cette fois-ci, les ponts se connectèrent et il comprit la référence. Cette manigance rondement menée était censée servir de preuve à sa bonne foi ?

Il l’observa se lever, sans piper un mot, tel un enfant fixant un adulte, curieux de connaître la suite des événements. Elle déclara tenir à l’objet coupant. Habile ! Très habile ! Et pourtant, que ces mots proviennent de Lux ou d’une autre chose, cela vint apporter un rayon de lumière réconfortant à son coeur.
Elle lui demanda de lui laisser une chance pour le convaincre. Et en effet, il n’avait plus rien à perdre de toute façon. Si la chose s’était emparée de Lux, cette vie perdait une partie de son sens.

- Tu as 5 minutes.

Lui accorda-t-il sèchement, la scrutant comme une étrangère. Ses premiers arguments consistèrent à bâtir un court récapitulatif de leur rencontre. Plongé dans un état second, certaines bribes ne lui revenaient pas mais en revanche, elle omit un élément capital qu’il n’oublierait jamais :

- Électrique ? Mh...

Ricana-t-il dans sa barbe (inexistante).

Pourquoi ne dis-tu pas les termes ? Pourquoi ne dis-tu pas combien tu m'as haï... Tes yeux...si.. méprisants... Comment pourrai-je les oublier ?

Il décala son visage, le relevant vers le plafond :

- Oui, c’était la pire chose... Parce qu’avec quelqu'un d'autre, j'aurais fini par passer à autre chose... Mais il a fallu que ça tombe sur toi.. Toi.. La seule qui était capable de me...

Il bouffa son dernier mot dans une légère grimace.

Si ce philtre n’était pas tombé sur Luxanna, il se serait guéri et aurait refait sa vie dans son coin comme si de rien était. Mais il avait fallu que ça tombe sur elle ! Sur la plus belle des lumières, comment résister ? Le philtre s’estompa bien plus rapidement qu’ils ne le pensaient, faisant place à de véritables sentiments dés les premiers échanges.
Il écouta la suite de son récit avec la horde de femelles sous aphrodisiaque, totalement hystérique, et la valeur de ses katanas. Oui, elle en connaissait des choses sur lui, des choses personnelles mais si Luxanna se faisait posséder par un esprit malin, qu’est-ce qu’il lui prouvait qu’il n’avait pas accès à sa mémoire, à ses souvenirs qu’il fouillait à sa guise comme de vulgaires dossiers. Après tout, elle exposait des faits froidement, mais indiquait très peu ses ressentis pour une femme émotionnelle.

- Merci pour ce charmant résumé.

Elle réussit cependant à procéder à une jolie galipette mentale pour relier ce récit au poignard, retour à la case départ, et en remit une couche pour affirmer qu’elle n’aurait jamais pu s’en servir pour le blesser. Ainsi, ce poignard possédait une forte valeur sentimentale pour elle.
Pourquoi ne lui partageait-elle pas ?

Ses prunelles verdoyantes se plongèrent dans les siens, couleur azurs, telle une gousse d’herbe se jetant dans l’océan. Son regard vacillait, le silence s’invita une nouvelle fois, il manquait quelque chose de cruciale à ce récit, quelque chose qui changerait la donne. Luxanna oserait-elle parler à coeur ouvert ?

- Tu as accès à ses souvenirs mais pas à ses profonds ressentis, tu te contentes d'énumérer les faits comme un soldat en interprétant à la va vite ce que tu as pu trouver... l'intérieur de son coeur...Sa lumière... t'est inaccessible, mh ? ... Il sourit, tristement, pensant avoir percé la bête à jour, non sans une pointe de regret. Sa Luxanna n’était plus. Il reprit sa fermeté, feintant l’indifférence face à la situation qui au fond, le terrorisait. Pourquoi m’as-tu amené ici ?

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Ft Zoro

Malgré tous ses efforts, la jolie blonde continua de se heurter à un mur de méfiance. Zoro se défiait d’elle, ou plutôt, de la créature qu’il pensait être au contrôle de son corps. Alors qu’elle évoquait de doux souvenirs pour elle, le guerrier souligna le pléonasme utilisé. C’est vrai que cela avait été plus qu’électrique. Elle l’avait détesté. Mais cela n’avait aucune valeur, aucune profondeur. Elle avait détesté être traitée de cette manière parce qu’elle était habituée aux ronds de jambe de la Cour. Mais haï ? Non. Peut-être même n’avait-elle jamais haï qui que ce soit. Elle n’avait peut-être pas assez souffert pour cela. Ou peut-être son cœur était-il réellement pur. Quoi qu’il en était, Lux répondit avec honnêteté.

“ - Ce n’est pas vrai. Je t’ai détesté, oui, parce que personne ne s’était jamais permis d’agir avec moi comme tu l’as fait. Mais c’était la réaction à chaud d’une jeune fille heurtée dans son égo. Je m’en rappelle, factuellement. Mais ça a été bien vite oublié tu sais.”

C’était aussi le trait caractéristique de la kaëchijin qui s’emportait dans le rire ou la colère avec facilité. Quand on était dans l’émotion facilement, le souvenir des mauvais moments passait rapidement en arrière-plan. Sinon le monde aurait eu tôt fait de briser ses espoirs. C’était un des secrets pour continuer à croire : on ne pouvait pas avoir un souvenir de la douleur ou de la colère trop affûté. On ne pouvait pas être rancunier.

Et c’était tant mieux parce que le sabreur venait de réussir à blesser sa demoiselle préférée. Elle serra les dents, et murmura une remarque.
“ - Quand tu dis ça, on dirait que tu aurais préféré ne pas m’avoir rencontrée.”
L’imbécile venait littéralement de dire que si au moins le philtre s’était activé sur quelqu’un d’autre, il serait passé à autre chose et aurait pu poursuivre sa vie. Le sabreur n’avait jamais pensé à aimer. Il était trop préoccupé par son objectif pour laisser quoi que ce soit entraver sa route vers les sommets, pas même ses sentiments. L’arrivée de Lux dans sa vie ne lui avait pas vraiment laissé le choix, et quand bien même elle ne lui avait jamais rien demandé, il disait cela comme si elle le gênait pour avancer. Pourtant, Lux était du genre à aider ses proches à réaliser leurs objectifs. Elle ne demanderait pas à Zoro de rester “sagement à la maison”, elle ne l’empêcherait pas de courir des risques s’il allait s’entraîner sur des échos de la menace, elle n’imposerait rien. Pourquoi semblait-il tant regretter sa présence ? Les larmes lui montèrent aux yeux, mais tâchant de garder sa dignité, elle détourna le regard pour les contenir discrètement.

Une fois qu’elle fut certaine que ses yeux n’en feraient pas qu’à leur tête, elle les plongea à nouveau dans l'œil unique du sabreur, et reprit.
“ - Je t’ai amené ici parce que je dois te convaincre de partir avec moi. Parce que je ne partirai pas sans toi. C’est impossible. Je n’envisage simplement pas … De te laisser derrière moi. Parce que…”
Lux chercha ses mots. Elle n’avait pas prévu que ce soit facile de briser le Sennou, mais elle n’avait pas prévu non plus qu’elle devrait prouver qu’elle était Lux. Elle était en train de s’emmêler les pinceaux, ce n’était pas censé se passer comme ça.
“ - Je ne pourrais jamais te trahir, t’abandonner, Zoro. Ce serait comme …”
Les mots venaient dans le désordre sans qu’elle ne parvienne à organiser ses pensées. Ses iris s’illuminaient sans qu’elle ne le contrôle, mais pas avec la froideur de sa colère, plutôt d’une lueur douce.
“ - Comme m’arracher le cœur pour le laisser sur place pendant que je m’en vais.”

“ - Mon cœur est à toi. N’en doute pas.” lui avait-elle dit avant d’arriver à Heï.

“ - Parce que je ne peux pas m’empêcher de t’aimer. Parce que je …”

Elle se tut subitement. Et leva vers lui des yeux embués.
“ - Si tu ne me crois pas, ou si tu étais sérieux en disant que c’était la pire chose qui te soit arrivée. Dégaine Shusui. Parce que je ne retourne pas à Heï. Et je ne pars pas sans toi.”
Mais si le sabreur dégainait son arme. Luxanna la ferait briller de sa magie blanche. Et si elle devait mourir pour que Zoro réalise son erreur, si sa mort pouvait être un choc suffisant pour le libérer du Sennou, elle l’acceptait.

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Se dire que sa petite lumière avait pu le détester une fois dans sa vie, ne serait-ce seulement quelques heures, relevait de l’insoutenable. Oh bien sûr, il encaissait et vivrait avec cette réalité qui appartenait au passé : «Ce qui est fait est fait» comme dirait l’autre, on ne revenait pas en arrière... mais il s’en mordit la lèvre jusqu’au sang. Elle en profita pour le corriger : de haine elle passait à la détestation. Pour Zoro, elle jouait avec les mots car cela revenait au même. Il s’en contrefichait de savoir que la haine possédait une connotation plus forte, Luxanna avait éprouvé de l’hostilité à son égard, tels étaient les faits et c’était déjà trop.

- Ton ego...

Relança-t-il avec un sourire en coin. Que savait-elle de l’ego ? Elle, la bonté incarnée. Oui, elle avait son petit caractère, oui elle ne se laissait pas marcher sur les pieds mais son ego n’arrivait pas à la cheville du sabreur. Preuve en était, elle galérait à lui faire accepter une réalité pourtant simple : il s’était fait berner par un dirigeant, il était devenu la pute de Sou Reï contre son gré. Par méfiance, mais aussi par ego, il assumait difficilement.

Blesser sa blondinette ne faisait pas partie de son plan initial mais découvrir ses émotions écorchées à cet instant précis l’interpella. Enfin, il la voyait manifester quelque chose de cohérent avec la Lux de sa connaissance. Seule une femme amoureuse était disposée à manifester autant de déceptions et de frustrations sur son visage. Une entité, aussi comédienne soit-elle, ne simulerait jamais aussi spontanément cette blessure.
Quelque part, le fait de l’avoir froissé donnait du crédit à ce qu’elle prétendait être. Il se radoucit, subitement sceptique à l’idée de causer du tort à son véritable amour, et se permit de pencher sa tête sur le côté :

- La pire... Mais aussi la meilleure...

Il espérait qu’elle savait.
Ses petits yeux célestes s’imbibaient de larmes tout juste retenues comme il avait déjà pu observer à de multiples reprises. A croire que lui déclencher une montée de larmes semblait monnaie courante. Encore une réaction difficilement reproductible pour un visiteur externe. Les graines de la vérité se semaient progressivement, sa blondinette devait encore faire preuve d’un peu de patience.
Il écouta sa justification, provenant du fin fond des tripes, de telle sorte qu’il en sentit les siennes vibrer. Son projet : se barrer et emmener son homme loin de cette misère. S’il comprenait bien ses bégaiements étouffés, elle refusait de l’abandonner, préférant la mort à la trahison. Elle employa même ce fameux verbe, le plus beau et perturbant de tous : le verbe aimer. Ce verbe... Qui se faisait avant de se dire... Qui se disait quand il n’y avait plus rien à dire... il comprit, à cet instant, qu’elle se tenait prête à le convaincre par tous les moyens possibles.
Au même moment, une espèce de cadenas symbolique s’ouvrit dans la mémoire du bretteur. Il naviguait toujours sur une mer d’illusions provoquée par Sou Rei mais son esprit semblait comme prêt à recevoir la lumière de la demoiselle.

Il s’exécuta en silence à sa demande de dégainer Shusui et laissa tomber l’arme sur un cube de paille devant la jeune femme. Par ce geste, il l’invitait implicitement à l’illuminer avec sa lumière pure, dépourvue de vices, pour l’aider à guérir. Il lui laissait une dernière chance.

- Raconte-moi ton histoire une nouvelle fois.

Quémanda-t-il en croisant les bras, en position «écoute».

Fiche (c) Espe

Dernière lune sous la neige

Ft Zoro

Le sabreur méfiant s’était aussi montré maladroit. Il était habile avec ses lames, bien moins avec la demoiselle en face de lui. Il l’avait blessée, et si elle avait fait au mieux pour ne pas le montrer, c’était loin d’être son fort. Il esquissa une petite tentative pour rassurer la demoiselle, et même si ce n’était pas grand chose, c’était mieux que rien. Surtout si on connaissait un peu le guerrier, ce n’était vraiment pas si mal.

Toute chamboulée par la situation, la paranoïa de Zoro, et tout le reste, Lux eut un moment d’hésitation lorsqu’il déposa l’arme à côté d’elle et lui demanda de raconter à nouveau, lui laissant sa chance. Puis son héroïsme un peu naïf reprit le dessus, elle déglutit et s’empara du sabre à deux mains. A peine avait-elle empoigné l’arme que la lame noire se nimbait d’une lumière parfaitement blanche. C’était initialement prévu pour convaincre le guerrier qu’elle était bien Lux, la seule et l’unique, mais cela eut surtout pour effet de la réconforter. Ce sabre lui faisait l’effet d’un ami sur lequel compter, et elle était toujours touchée que Zoro accepte de le lui confier en connaissant à quel point il tenait à ses armes. Préférant ne pas abuser, elle le lui rendit néanmoins et se concentra sur son objectif. Elle était déterminée à réussir.

“ - D’accord. Alors, si je reprends rapidement du début. Quelqu’un nous a jeté un sort, qui manipule notre esprit : nos souvenirs, nos convictions, mais de ce que j’ai compris, seulement ce qui touche un domaine particulier. Et comme ce sort s’affaiblit avec le temps, si on fait entrer en contradiction certaines informations, il peut céder sous la volonté de l’esprit. C’est ce qui s’est passé pour moi, c’est ce que je veux essayer sur toi. Si on y parvient, tu retrouveras tes souvenirs non déformés.”

Elle attendit un signe quelconque de la part de Zoro. Puis elle reprit.

“ - Par exemple, tu te souviens de notre rencontre à Feng ? En pleine capitale ?”

Là dessus, il ne devait pas y avoir de problème.

“ - Et tu te souviens quand on s’est revus … après ton attaque contre la tribu de Kaën ?”

Cette fois-ci, le souvenir était probablement bien moins agréable mais nécessaire.

“ - Pourquoi la première fois qu’on s’est rencontrés, tu n’as pas fait de vague ? Pourquoi la deuxième fois, tu faisais des actes de guerre contre Kaën, et la première fois, quand des gardes ont essayé de t’arrêter à cause de moi, tu les as assommé sans même les blesser ? Des gardes Kaëchijins, des soldats, des militaires ennemis. Pas la moindre égratinure.”

Là se faisait le premier test de la magicienne. Allait-il se souvenir correctement ou le Sennou avait-il affecté cette partie de sa mémoire ? Et si c’était le cas, réussirait-il à expliquer cette incohérence ? Zoro avait beau éviter les tueries pour Lux, il n’était pas tendre avec ses ennemis. La tribu qu’il avait attaquée une fois qu’il avait commencé à servir Sou Reï avait beaucoup souffert de son passage. Des blessés partout, dont certains avaient péri de leurs blessures plus tard. Des bâtiments dévastés.

C’était loin d’être tout ce qu’elle avait à souligner comme incohérence, mais elle veillait à ne pas mettre en lumière trop vite son implication pour Reïfuu. Elle craignait qu’il ne se braque, que le Sennou se défende comme il l’avait fait pour elle. D’un autre côté, si le sith n’avait pas insisté, peut-être n’aurait-elle pas brisé l’enchantement. Elle devait aller jusqu’au bout, mais sans qu’il ne change d’avis et se fasse la malle entre temps.

"The world has seen enough darkness"_Lux

Dernière lune sous la neige

Elle marqua un temps de pause avant de s'emparer du trésor de Wano entre ses petites mains brûlantes au milieu de la glace. Aussitôt, la lumière fut. Le sabre ténébreux regagna son éclat, l'éclat de l'amour, l'éclat de la chaleur. Il perçut sa belle, maîtresse de cette prouesse, qu'elle seule serait en mesure de reproduire au millimètre près. Ce fut alors qu'une chose étonnante se produisit : l'iris spectatrice de l'homme s'illumina d'une douce étoile dansante. Si à première vue, on pourrait l'associer au simple reflet de sa magie contre sa cornée, un infime détail rendait l'interprétation de cette scène différente, plus intense... Sa pupille vacillait d'émotion et semblait rechercher la pureté qui se logeait au coeur de cette lumière des neiges, se frotter à la chaleur qu'elle dégageait. Il ne pleura pas, mais son oeil n'était plus aussi sec que d'habitude, ce qui ne lui ressemblait guère, lui, le fier sabreur au regard dur et imperturbable. Il avait l'impression d'assister à la naissance d'un ange en hiver.

C'était elle.

Elle amorça la situation, il écouta d'une oreille distraite, obnubilé par la lumière, mais il buvait ses mots sans même les conscientiser. Elle passa dés lors aux faits, le questionnant sur leur rencontre à Feng. Comment oublier la première fois que son regard croisa le sien, incognito, dans cette rue de traverse. La sensation d'une brise d'été caressant son corps, cette brise fraîchement tiède réchauffée par les rayons d'un soleil au crépuscule, une température si parfaite qu'elle en provoquait des frissons. Tel fut le premier souvenir construit par rapport à Luxanna : un sentiment incomparable.

Elle compara cette scène lumineuse à une scène bien plus obscure. Subitement, des nuages noirs recouvrirent le ciel bleu, et son sourcil se fronça, toujours captivé par la source blanche contre sa lame. Il découvrit ces corps blessés sous un soleil de plomb, ces baraques ruinées dans un désert triste et fumant, il expérimenta à nouveau ce sentiment confus mêlé à une jalousie, une soif de faire le mal, de détruire le monde entier au nom d'une femme, mais pas que, au nom d'un homme, qu'il ne connaissait ni d'Eve, ni d'Adam. Un tyran qui plus est. Depuis quand se soumettait-il à un illustre inconnu ? Seul Luffy faisait office d'exception mais il n'existait pas deux personnes comme son capitaine à qui il vouait une loyauté infaillible. Zoro avait la particularité d'agir en électron libre, en vagabond insoumis, en guerrier solitaire. La question était plutôt : pourquoi obéissait-il au seigneur ? Que lui trouvait-il ? Pouvait-il se remémorer cette fois où il l'avait convaincu ?

Il y parvenait avec Luffy, il se souvenait des mots prononcés par son capitaine pour le convaincre de rejoindre sa pauvre barque du début. Pourtant, pour Sou Rei, il fut incapable de remettre des sons, des images, des mots sur le jour où son admiration pour lui était née. Elle semblait lui être tombée dessus gratuitement, sans aucune justification réelle. Une incohérence dans son comportement habituel bien plus significatif que les exemples de Luxanna, bien qu'ils avaient suffi à susciter un premier point de réflexion pour embrayer ensuite sur des raisonnements tortueux.

Il détourna alors un regard évasif vers les flocons de la nuit. Tiens, il se mettait à neiger comme un soir de noël, subitement, comme pour accompagner la splendeur du moment. Bercé par les paroles thérapeutiques de sa douce, il se leva, et se dirigea doucement vers la pluie de flocons jusqu'à se retrouver complètement dessous, les récupérant au creux de sa paume dans une délicatesse rare de sa part. Il avait l'impression de tenir dans sa main, à la place du flocon, un mini coffret, celui de ses souvenirs. Il ne manquait plus qu'une chose pour l'ouvrir totalement... Mais quelque chose l'empêchait d'aller au bout de la manoeuvre. Si près du but et pourtant, un élan lui manquait, comme paralysé par la peur...

Les flocons fondaient dans sa paume, les uns après les autres, comme s'il attendait une clé.

Fiche (c) Espe

Dernière lune sous la neige

Ft Zoro

Face aux questions de Luxanna, la sabreur demeura de marbre, mais il semblait qu’il réfléchissait bel et bien à ce qu’elle lui disait. Elle tâchait de l’observer pour savoir si elle était dans la bonne direction, si elle n’y allait pas trop vite, mais elle n’avait ni don ni entraînement en la matière, aussi elle tâtonnait beaucoup à l’aveuglette. Elle s’était tue et prenait une pause lorsqu’il commença à neiger. Zoro fut attiré par les flocons comme un papillon de nuit par la lumière, et se leva pour quitter l’abri et sentir les petits bouts de gel se déposer sur lui. Lux l’observait de ses grands yeux bleus, et descendit de la botte de paille sur laquelle elle était assise pour s’approcher de lui.

“ - Tu dois devenir le plus grand sabreur du monde. Et je sais que ce genre d’ambition est bien Reïfuujin mais … Tu n’as pas besoin d’être ici. Mieux, tu ne devrais pas être ici.”

De sa main douce, elle saisit celle de Zoro, dont la peau avait des cals typiques d’un homme qui maniait un sabre, qu’elle observa un moment.

“ - Tu sais au fond de toi que Sou Reï ne t’as pas convaincu. Tu peux devenir plus fort sans lui, et surtout, un guerrier aussi talentueux que toi ne peut pas être à son service. Tu as un sens de l’honneur trop marqué pour continuer de servir ce maître des illusions. Il n’est ni juste, ni bon, ni compréhensif. Et c’est pour cela que les élus à son service ne seront jamais loyaux. Rhadamantys essaiera de le détrôner dès qu’il s’estimera assez fort. Rinkyu Uchiha n’est jamais dans le pays, et a monté son clan en indépendant. Et toi et moi … Il ne pouvait pas nous avoir à ses côtés par la persuasion, il a été obligé de tricher. Mais ça doit s’arrêter maintenant.”

Gardant la main du guerrier dans les siennes, et plongea son regard si bleu dans celui de Zoro.

“ - Tu es meilleur que lui Zoro. On le sait tous les deux.”

C’était fait, elle avait prononcé le nom de Sou Reï, pire, l’avait critiqué à voix haute. Le Sennou de Zoro s’était-il suffisamment affaibli avec le temps pour qu’il cède, ou son essai allait-il lui revenir à la figure comme un boomerang ? Elle priait pour que l’esprit du guerrier soit suffisamment fort contre l’enchantement de Sou Reï, car elle n’osait pas imaginer ce qu’il se passerait en cas d’échec. En fait, si elle était plus prudente, elle se serait préparée à cette éventualité. Histoire de pouvoir se téléporter en cas de revirement trop brutal dans lequel le Reïfuujin la considérait comme une ennemie. Mais Lux n’était pas prudente, pas méfiante, non, elle était optimiste. Et quand on est optimiste … on n’a pas toujours de plan B.

"The world has seen enough darkness"_Lux

Dernière lune sous la neige

La délicatesse de la glace fondante dans sa paume rugueuse fut subitement remplacée par la caresse d'une lumière venue apposée sa main contre celle du guerrier. La vibration douloureusement saisissante de son contact ne s'amenuisait pas, même après tout ce temps. Elle lui procurait les effets d'une première fois, éternellement et ses paroles continuaient à couler comme du miel dans son coeur.
La femelle en remit une couche sur la présence injustifiée de son mâle ici. Il n'avait vraiment rien à foutre à Reifuu, Elle lui répétait, droit dans les yeux, pour ancrer ce message dans son esprit perturbé. Il buvait ses paroles, sans un mot, sans pensée, mais les digérait inconsciemment. Elle possédait la capacité pour le guérir et lui l'amour suffisamment grand pour prêter attention à ses soins.

La main passive, ouverte vers le ciel, tandis que la blondinette le la lui tenait avec tendresse, ses doigts finirent pas se refermer doucement sur la sienne tel un coquillage se recroquevillant sur lui-même. Au fil de ses paroles, il la serrait de plus en plus fort, comme s'il tentait de s'ancrer dans sa réalité ou qu'il encaissait une colossale souffrance. Heureusement, encore lucide, il se maîtrisa avant de lui broyer la main, cessant sa pression à la limite du supportable pour la demoiselle.

Il lui accordait un point important : Sou Reï n'était pas connu pour son sens de l'honneur et dès que l'illusion du sennou tentait de le persuader du contraire, les actes du seigneur blanc contredisaient sa pensée. Aucun guerrier de Reifuu lui vouait une réelle loyauté. Il était le seul dirigeant de Kosaten à ne pas parvenir à soumettre les élus de sa nation de leur plein gré. Même un monstre comme Zang détenait des sujets à son service. Il fallait dire que le seigneur ne jouissait pas des élus les plus faciles à gérer et à convaincre, Reifuu étant guidé par l'ambition, la compétition, l'individualité, la domination. Ce n'était pas ici que l'esprit d'équipe était au rendez-vous, chaque personnalité rêvant de conquérir les terres pour son propre compte, de réaliser ses projets et de dompter tout ceux croisés sur son passage. L'insubordination définissait la nation glaciale, on était loin d'un bon repas convivial où régnait un climat d'entraide et de franche camaraderie.

Quelque chose se fêlait en lui.. L'illusion. Mais cette fêlure le blessait comme un os infligerait de la douleur après une fêlure. Il revit des scènes, quelques images lui revenaient en tête, les vraies images, les vrais dialogues, les vrais visages. Reifuu venait de soulever sa flamboyante jupe où se déroulait le bal des horreurs.
Il cueillit ses petites prunelles célestes au milieu des flocons comme il récolterait des diamants dans une mine. Son regard strict, figé sur la jolie luciole de la nuit, mais malgré cette dureté refroidissante, son iris verdoyante manifestait une certaine lucidité. Une espèce de maturité que son attitude méfiante et réticente de tout à l'heure ne bénéficiait pas.

Pendant un court instant, il hallucina des cris mêlés à des supplications, tandis que des larmes coulaient sur les joues de sa petite poupée, au milieu d'un palais de glace. Oui, des bribes de ce jour funeste le harcelaient par épisode, au point de lui faire détourner l'oeil de sa dame préférée. Son corps se couvrait de honte, il était de plus en plus difficile de soutenir les yeux de la femme qu'il aimait après cette terrifiante découverte sur l'enfer qu'il venait de lui imposer.
Il décida de poser son regard mystérieusement au loin, sur l'horizon, et prononça solennellement :

- Viens... Il est temps de partir...

Ils ramassèrent les affaires potentiellement placées aux pieds des bottes de foin et se mirent en route sans plus tarder. Ils ne comptaient guère passer une minute de plus dans ces terres hostiles. Toutefois, alors qu'ils s'apprêtaient à s'éloigner de cet endroit si emblématique désormais : le lieu de la libération, une question s'implanta subitement dans le crâne du sabreur. Une question qui le démangea aussi tôt débarqué, une question qui n'eut pas l'intention de partir avant d'avoir été posée.

- Comment as-tu réussi à te libérer de cette emprise ?

Elle lui avait peut-être déjà expliqué tantôt pour le convaincre mais entre les faux souvenirs et les vrais souvenirs qui réapparaissaient un par un, sa mémoire s'avérait bien trop confuse et perturbée pour se rappeler de cette réponse, si réponse il y avait eu.

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Lux & Zoro 

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Dernière lune sous la neige

Ft Zoro

Tout en parlant, Luxanna avait pris la main du guerrier dans les siennes. Et alors qu’elle parlait, elle sentit qu’il la serrait, fort. Elle le serra en retour, une pression pour le soutenir, l’ancrer à la réalité. C’était une ancre de moins de soixante kilos, mais solide comme celle du plus grand navire qu’on puisse trouver. Parce que tant qu’il s’agirait d’aider Zoro, la magicienne serait aussi forte qu’il avait besoin qu’elle le soit.

Leurs regards se croisèrent, et elle eut le sentiment qu’elle l’avait récupéré. Qu’il était libre et lucide. Sa poitrine se gonfla d’espoir mais elle pinça les lèvres et retint une question, attendant une forme de confirmation. Il détourna son visage d’elle, et prononça enfin quelques mots, de quoi faire disparaître pour de bon les angoisses de la demoiselle. Elle poussa un soupir de soulagement et, sans prévenir, le prit un instant dans ses bras.
“ - Dieu merci …” murmura-t-elle en le serrant contre elle quelques secondes avant de le relâcher.

Sans plus attendre, Luxanna attrapa ses affaires, jeta son sac dans son dos et emboîta le pas de son compagnon. Elle était libre. Enfin libre. Elle allait quitter ces terres froides où elle n’avait pas sa place et rentrer à Kaën. Revoir Anastasia. Ne plus jamais revoir la Furie. Elle avait la sensation de pouvoir respirer à plein poumon pour la première fois depuis que le sith avait fait briser le Sennou de la blonde. En fait, c’était comme lorsqu’elle avait appris qu’à Kosaten, les nés-mages n’étaient pas des hors-la-loi. Elle n’avait plus à se cacher. A craindre le Roi et les militaires.

Zoro ne fit pas mention du fait qu’il se souvenait désormais avoir lui-même apposé l’outil de lobotomisation sur la jolie petite tête blonde de son amoureuse. En revanche, sa curiosité cherchait à savoir ce qu’il s’était passé pour elle. La concernée se rembrunit un peu. Ce n’était pas un bon souvenir, surtout maintenant que la Furie avait été encore pire à leur deuxième rencontre.

“ - Je venais de rencontrer ce nouvel élu Reïfuujin. Rapidement, on ne s’est pas très bien entendu. Il m’a demandé quelle était mon histoire, pour qu’une personne comme moi soit ici. Évidemment, comme j’étais sous Sennou, j’ai mal pris la remarque, et j’ai commencé à me justifier. Mais, peut-être que l’enchantement était déjà affaibli, j’ai commencé par dire la vérité, puis le Sennou a repris le dessus et j’avais soudain une raison tout à fait valable.”

Elle se souvenait vaguement de ce qu’elle avait dit alors. Comment, pour la paix, elle pensait sincèrement que Sou Reï devait unifier Kosaten. Que les Kaëchijins se déchiraient en luttes intestines. Ce n’était pas vraiment faux pour cette dernière partie, mais pour autant elle préférait les aider de l’intérieur.

“ - Ensuite … Il a jeté de l’huile sur le feu quand il a vu que je m’énervais. Il a tenu à me mettre devant mes contradictions, du genre, et si Sou Reï me demandait de tuer pour lui ? Entre mon esprit qui n’arrivait pas à gérer les contradictions, la colère, l’incompréhension … Mes émotions ont servi de catalyseur et ma magie a pris le dessus. J’ai perdu le contrôle de mes pouvoirs, et dans le même temps, le Sennou a cédé. Je me suis souvenu de tout. De la vérité. J’ai retrouvé mes vraies opinions, sur lui, sur Kaën, sur Reïfuu. J’ai réalisé que je n’étais son élue que parce qu’on m’y avait obligée. ”

Lux se tut. Finalement, toutes ses recherche sur le Sennou ne lui avaient apporté que de maigres réponses. Pour commencer, évidemment, elle n’avait rien trouvé qui parlait du Sennou en lui-même. Elle avait dû se contenter de livres sur les enchantements, les sorts d’hypnose et de manipulation d’esprit en général, ou encore d’ouvrage traitement des artefacts magiques.

“ - Je pense que l’instrument qu’utilise Sou Reï sert à catalyser l’enchantement magique. Personne d’autre ne peut faire ça. Manipuler un esprit pendant des mois et des mois. Mais malgré cet avancement, ça ne pouvait pas être parfait. J’imagine que le Sennou faiblit avec le temps.”

Elle se tourna vers Zoro et lui décocha un sourire lumineux.

“ - Et maintenant c’est du passé.”

Lux ne réalisait pas vraiment que le guerrier pouvait s’en vouloir de l’avoir mise dans cette situation. Elle ne lui en avait jamais voulu, et dès l’instant où son cœur s’était allégé en comprenant que lui aussi était libre, elle était passée à autre chose. Elle n’avait pas le cœur à regretter le temps passé à Reïfuu. Luxanna était une lumière, et elle illuminait le chemin loin devant.

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Dernière édition par Roronoa Zoro le Sam 5 Nov 2022 - 16:28, édité 1 fois

Dernière lune sous la neige

Les traits tendus de la demoiselle se décontractèrent subitement face aux paroles déterminées du pirate libéré. Si le soulagement avait un visage, il porterait celui de Luxanna à cet instant précis. Un poids de pression monumental se soulevait sur son coeur et émue par sa réussite, elle affectionna le jeune guerrier au creux de ses bras, légèrement serré contre lui. Elle récupérait l’homme libre de leurs débuts.

Toutefois, si la blondinette vivait une montée positive, le cheveux vert prenait la direction inverse. Son état descendit en flèche, bien que son expression faciale ne laissa rien transparaître de ces nouveaux tourments relevés des tréfonds. Les morceaux de scènes décousus lui aveuglaient ses pensées comme des flash éblouissants venus perturber le champ de vision.
Il jeta un dernier coup d’oeil à cet emplacement, un dernier coup d’oeil mélancolique avant de tourner le dos définitivement à ce chapitre périlleux aux retombées psychologiques virulentes. Il le sut, immédiatement, les prochains jours à venir ne constitueraient pas une partie de plaisir.
En attendant, elle lui narra son histoire. L’histoire de sa libération qu’elle devait à un nouvel élu fraîchement débarqué sur les terres de la glace. Évidemment, elle indiqua que la chaleur de sa lumière s’était heurtée au mur de glace inhérent aux reifuujins. Pourtant, il avait réussi l’exploit de briser les chaînes serrés autour de son esprit. S’il comprenait bien, il tenait à la confronter à ses contradictions, il insistait pour la mener vers la voie de la raison, quitte à déchaîner son courroux. Ce n’était pas un scénario logique. Le sabreur fronça les sourcils, perplexe face à ce comportement insensé. Pourquoi un élu au service de Sou Rei chercherait à libérer un de ses pions ? N’était-ce pas agir contre sa volonté ? Un haut acte de trahison. A croire que le seigneur des neiges comptait, une fois de plus, un ennemi dans ses rangs. A moins que ce tour ait été intentionnellement mis en place pour piéger la jeune femme et pouvoir justifier son assassinat par une raison valable. Il se souvenait en effet de sa première phrase : ils ne s’entendaient pas. Pourquoi diable un élu de Reifuu, connaissant leur mentalité mieux que quiconque, viendrait en aide à une élue d’origine ennemie de façon désintéressée ?

- Qui était-ce ?

L’interrogea-t-il sur un ton semblable à de la neutralité tandis qu’au fond de lui, il pressentait l’anguille sous la roche qui ne demandait qu’à sortir de son trou pour piquer à vif sa proie. Il n’aimait pas cette histoire. Oui, dans les faits, il avait contribué à la délivrer de son sortilège mais à quel prix ?

Elle évoqua ensuite le sujet d’un instrument. Si certaines photographies de ce jour terrifiant remontaient petit à petit, celle de l’instrument désigné le laissa dans un premier temps sceptique. Il émit, par réflexe, un regard teinté d’incompréhension vers la jeune femme, puis fut attaqué subitement par un éclair : il se vit, lui-même, tenir un instrument de torture contre sa dulcinée. Une image qui ne dura pas plus d’une seconde mais qui lui suffit à s’arrêter mystérieusement durant leur marche. Il s’immobilisa, scrutant son amour prendre légèrement de l’avance avant qu’elle ne réalise qu’il ne la suivait plus. Au moment où elle se retournerait pour s’interroger sur cet arrêt inexplicable, il la regarderait de son air fier habituel, tandis que son corps se happerait de tremblements intenses. Il tentait de garder la face, alors son expression contrastait avec la paralysie incontrôlable de son corps. Il n’arrivait plus à faire un seul pas devant lui. Ses membres se gelaient sous la neige : la cause de cet état n'était pas le froid mais l'effroi.

Il la fixait, mais son champ de vision se partageait entre la Lux de maintenant et la Lux de cette salle du palais. Un coup il la percevait sourire avec soulagement sous la neige, un coup il la percevait en larmes et résignée à subir une torture dont il semblait être le maître, instrument en mains. Il ne comprenait pas. Pourquoi lui générer une telle souffrance ? De ce qu’il savait, s’il y avait bien une chose qui ne s’était pas déformée sous le sennou, c’était les précieux sentiments éprouvés à son égard. Il se rappelait que son amour représentait l’unique élément intact de cette douloureuse aventure. Alors quand bien même il n’était pas conscient, comment avait-il pu se résoudre à lui planter cette monstruosité dans le petit crâne tout blond de sa lumière ? Il arrivait même à ressentir l’émotion de ce souvenir : il l’aimait, mais il le faisait tout de même, sans une once de remords. Qu’est-ce qui expliquait une telle sauvagerie de sa part ?

Il abaissa son regard vers le sol tandis que sa main fouilla dans sa poche pour rechercher la petite fleur aux fins cristaux gelés de tout à l’heure, qu’il comptait offrir à sa jolie Lux. Il la contempla quelques longues secondes au creux de sa paume, légèrement chiffonné par ses déplacements dans la poche, tout comme il avait chiffonné sa Lux au plus haut de ses sentiments. Il fit dés lors tomber la petite fleur sur le lit de neige à ses pieds, silencieusement. Il ne la ramassa pas. Mais son iris vacillante ne la quittait pas d’une pétale. Qu’est-ce qu’il avait fait bon sang ?

Il se rappelait, attentivement, les images de plus en plus fluides. Il ne possédait aucune excuse. Aucune. Et pourtant, il avait commis le plus grand déshonneur vis-à-vis de son amour. Il avait échoué à son rôle de protecteur. Il représentait le plus grand danger pour cette femme alors qu’il s’était promis de la protéger et de l’aimer comme il se devait.

Subitement, toujours dans un silence religieux rythmé par un léger souffle lugubre nocturne, il se posa à genoux devant la petite fleur et dégaina son sabre. Le blanc, celui de Kuina, qu’il planta fermement dans la neige, à côté de la fleur.

- Pourquoi as-tu tenu à m’attendre une fois tes souvenirs revenus ? Tu te rappelles... De ce que j’ai fait... hm ?

Releva-t-il son menton légèrement, sans pour autant aller clairement chercher son regard.

- Je me souviens de ce que je t'ai fait. Je me souviens de ce que je ressentais pour toi à ce moment là. Sou Rei n'a rien modifié vis-à-vis de.. nous.. de ce que tu es... pour moi... et pourtant, je l'ai fait. Je ne veux pas entendre dire que tout est de la faute de Sou Rei et qu'il m'a manipulé. Car tu sais quoi ? Je me souviens avoir été content de te planter cette chose ignoble dans ton crâne. Et pourtant, tu es encore là, à perdre ton temps avec un faiblard pour le sortir du pétrin dans lequel il s'est mis tout seul, comme un débutant. Tu te mets encore en danger pour quelqu'un qui a essayé de te nuire en sachant très bien qui tu étais à ce moment là. Pourquoi tu n'as pas filé aussitôt ta liberté retrouvée bon sang ?

Il se mit dés lors à ricaner nerveusement.

Pauvre fille... Ta gentillesse te perdra.

Même si présentement, il ne l'expliquait pas. C'était quand même prévisible que cet instrument n'avait rien d'une promenade de santé alors quand bien même Sou Rei le manipulait, comment avait-il pu lui faire gober n'importe quoi pour le convaincre ? Soit il était con, soit il était faible, soit il était mauvais. Peut-être les trois à la fois.

Lux & Zoro 

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Dernière lune sous la neige

Ft Zoro

Après avoir donné le surnom de la Furie à Zoro, Luxanna avait continué de marcher sans se rendre compte du malaise intérieur que subissait ce dernier. Alors que les souvenirs non modifiés revenaient prendre leur place légitime dans l’esprit du sabreur, celui-ci finit par se souvenir du pire. Cela avait de quoi le secouer, au sens figuré comme au sens propre il semblait. Il s’arrêta, et remarquant qu’il n’était plus à ses côtés, Luxanna se retourna, se demanda ce qu’il faisait. Elle le vit alors sortir une fleur gelée de sa poche, et fit demi-tour pour le rejoindre.
“ - Qu’est-ce qu’il se passe ?” demanda-t-elle de sa voix fluette.
Sans répondre immédiatement, il se laissa tomber à genoux dans la neige, et planta son sabre blanc à ses côtés. Sans croiser son regard, il lui posa une question, qui laissait deviner qu’il souffrait. Lux pinça les lèvres, et s’agenouilla elle aussi pour être à sa hauteur et le regarder dans les yeux. Elle ignorait encore s’il faisait référence à l’épisode de Kaën, ou celui du palais de Sou Reï.

Le guerrier reprit la parole alors qu’elle venait de se mettre à son niveau. Il se souvenait avoir apposé lui-même le Sennou à sa belle, tout en sachant désormais que ce n’était pas un objet qui “ il projette l'énergie de la nation en vous, afin de mieux la comprendre” comme l’avait prétendu le Roi, mais qui asservissait l’esprit des élus. Et Zoro ne voulait pas entendre d’excuse. Blessé, il finit par lâcher une remarque méchante à Luxanna, que celle-ci laissa glisser sans commentaire. Elle laissa passer quelques instants de silence, puis prit la parole. Son ton était celui de quelqu’un qui s’apprête à raconter une histoire.

“ - Un jour que je visitais Fossemont, un homme dont les vêtements étaient couverts de sang a été traîné sur la place publique par les gardes de la ville. Il avait assassiné sa femme et ses enfants dans leur lit, puis a tué trois personnes supplémentaires à la hache avant d’être maîtrisé. Je me souviens encore de ses hurlements désespérés. “Vous ne comprenez pas, c’étaient des monstres !” criait-il. Je sentais que quelque chose ne tournait pas rond, et même si j’ai demandé qu’on attende, il a été exécuté pour meurtre. Un instant plus tard tout le monde dans la foule sombrait et des spectres attaquaient de toutes parts. Il se trouvait qu’un démon avait été réveillé dans la forêt en bordure de la ville. Depuis des jours, tous les citoyens faisaient des cauchemars où se manifestaient leurs terreurs les plus profondes, personne ne dormait vraiment. Et cet homme avait été la cible de la folie insufflée par le démon.”

La demacienne prit une pause, laissant le temps à Zoro de digérer l’histoire, de faire le parallèle.
“ - L’aurais-tu jugé coupable Zoro ? Dans un pays où la magie est prohibée, où la moindre manifestation des arcanes terrorise tout le monde, aurais-tu exécuté un homme qui pensait avoir tué des démons ? Quand le tavernier sert une boisson empoisonnée par un assassin, à l’un de ses clients, condamne-tu l’assassin ou le tavernier ?”

Elle posa sa main le long de la mâchoire du guerrier et dirigea son visage vers le sien, l’obligeant à la regarder dans les yeux.

“ - Regarde-moi. Je t’ai pardonné à l’instant même où tu as posé ce morceau de métal sur moi. Je comprends que tu t’en veuilles, mais il faut que tu te pardonnes. Je ne prétends pas que ce soit facile. Mais il n’y a que toi qui puisses le faire. Et tu as tout le temps dont tu as besoin parce que je ne compte pas te lâcher”

Lux revint sur l’une des phrases prononcées par Zoro alors qu’il tentait de la repousser.

“ - Tu veux me protéger ? Alors continue de me rendre forte, comme tu l’as fait jusqu’ici. Je n’ai jamais autant progressé que quand j’étais avec toi, et j’ai encore un long chemin à faire. ”

Elle se souvenait encore de l’Elfe qu’elle n’avait pas pu sauver des griffes de La Furie. C’était un voleur qu’elle ne connaissait pas, aussi sa peine, bien que réelle, n’était en rien comparable à celle que Zoro ressentait en réalisant ce qu’il avait imposé à la demoiselle. Mais elle y avait pensé. En voyant le corps inerte de l’elfe, elle s’était demandé ce qu’il se passerait le jour où elle échouerait à protéger un être cher. Elle ne voulait pas connaître la réponse à cette question. Elle allait progresser, tous les jours un peu plus, et elle ne laisserait tomber personne.

La demoiselle se releva, et tendit la main vers le sabreur pour l’inciter à faire de même. Sa voix était dénuée de tout jugement.

“ - Tu peux décider que tu préfères m’abandonner pour ne pas risquer de me perdre. Ou te montrer fort et aller de l’avant.”

Zoro restait en partie Fuyujin dans l’âme. Allait-il vraiment abandonner ? Elle ne l’imaginait pas un instant.

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Dernière lune sous la neige

Luxanna ne tarda pas à noter l’absence du bretteur à ses côtés et le rejoignit aussitôt au sol. En imitant la position de son guerrier tourmenté, elle transmettait un message de soutien, comme si elle refusait de le laisser porter seul ce fardeau. Elle l’accompagnait dans cette espèce de culpabilité non exprimée verbalement mais qui se manifestait par son attitude agressive, presque repoussante. Il décrétait ne pas mériter sa bonté. Il la souillait et ne le supportait pas.
Au même moment, il suivit du regard une perle de glace sur la fleur se métamorphoser en goutte d’eau et glisser le long de la pétale, comme si le cœur de la plante pleurait avec lui.

Elle prit alors l’initiative de partager avec lui une anecdote de son monde mettant en scène un homme rongé par une folie démoniaque impossible à maîtriser. Il commit l’irréparable, en incapacité de nuancer la réalité des illusions, ce qui l’innocentait aux yeux de sa blonde. Comment condamner un homme trompé, à la réalité déformée, dépourvu de raison, persuadé de se défendre d’un danger imminent ? Maline comme elle était, elle impliqua le jeune homme au coeur meurtri dans le récit, l’invitant à participer sur le jugement à donner dans cette situation. Il était en effet beaucoup plus simple de prendre une décision en étant détaché de ses émotions et donc non concerné. Mais le sabreur ne pouvait se résoudre à excuser ses actes.

- Ni cet homme, ni le tavernier ne sont en coupables...

Jusqu’ici, il rejoignait son avis.

- Pires, ils sont faibles ! Ils ont manqué d’attention, ils sont tombés dans un piège, ils se sont fait bêtement manipulé...

La faiblesse était le pire des crimes pour Zoro.
A travers ces personnages, c’était bien entendu lui qu’il insultait avant tout. Mais elle le força à soutenir son regard si beau. Et c’était si dur. Il eut presque envie de la gifler pour qu’elle cesse de le contempler avec autant de tendresse et d’espoir. Il lui ruinait sa vie et elle ne l’admettait pas. Elle insista sur le fait qu’elle ne le lâcherait pas.. Évidemment... Une femme de principes aussi têtue ne renonçait jamais. Après tout, c’était ce qui lui avait plu en premier chez elle, et une nouvelle fois, elle ne se trahissait pas, fidèle à ses valeurs. La persuader de l’abandonner en chemin ne rimerait à rien, c’était peine perdue. Et puis, en bon égoïste, quand bien même il savait qu’il influençait négativement sa vie, avait-il réellement envie de la laisser partir ? Non, bien entendu. Si elle partait, autant rester ici pour toujours en attendant que la mort ne daigne venir l’emporter. Si elle partait, il ne se relèverait pas d’ici comme son katana planté droit comme un piquet de tomate l’indiquait.

S’il commençait à connaître les réactions de sa lumière sur le bout des doigts, elle aussi. Elle aurait pu démentir pour tenter de le rassurer ou pire, le prendre en pitié, mais sachant pertinemment combien son homme était fier au point de se sentir injurié si elle démontrait une compassion trop affichée, elle opta pour un détour plus éloquent pour le toucher : la persévérance. Elle lui tint des paroles fortes, digne d’une guerrière, pour l’inciter à continuer son combat sous peine de l’abandonner. Habile, elle retourna la situation pour faire en sorte que le fait de vouloir la quitter pour son bien revenait au contraire à l’abandonner faiblement, à s’avouer vaincu, titillant ainsi son ego. Elle prouvait à cet instant que la psychologie du guerrier ne possédait plus beaucoup de secrets pour elle.

Il garda le silence tandis qu’elle se redressa en lui tendant la main. Mais à la place de la lui attraper, il farfouilla quelque chose dans sa besace : une petite boîte tressé qu'il ouvrit. Quitte à être à genoux devant elle, et elle debout, en position parfaite de cérémonie, pourquoi ne pas profiter de l’occasion pour :

- Si malgré tout cela, tu continues à avoir foi en nous, alors autant que ce le soit pour toujours.

Il était temps de sceller leur liaison à jamais.. Un sublime anneau blanc orné d’un discret petit saphir se situait dans la paume du sabreur pendant qu’il releva un genou vers lui pour se mettre en position officiel.

- Lux... L.. Hm... Luxanna. ... J'aimerais que ton histoire et la mienne ne fassent plus qu'une, et ce, jusqu'à la fin des temps... Alors j'ai une question simple à te poser... Acceptes-tu de te lier avec moi, pour l'éternité... ?

La questionna-t-il sous les flocons de la nuit. Ignorant les questions officielles comme «veux-tu m’épouser» ou encore le classique «souhaites-tu devenir ma femme», il tourna l’interrogation à sa façon, et cela lui ressemblait plutôt bien. Il avait demandé conseils à Mei pour savoir comment se placer et si elle acceptait, il était censé lui passer l’anneau à... l’index ? Non.. Le majeur... Droit ! Ou gauche ?

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Luxanna n’avait pas parlé du démon de Fossemont pour rien. Elle était présente ce jour-là, comme elle était aux premières loges des actions de Zoro sous Sennou. Par cette comparaison, elle montrait qu’il ne bénéficiait pas d’un traitement de faveur spécial par le pardon qu’elle lui avait accordé très facilement. C’était simplement ce en quoi elle croyait. Il pouvait se mettre toutes les erreurs du monde sur le dos, elle ne changerait pas d’avis. Évidemment, si cela avait pu permettre au sabreur de reconnaître qu’il n’était pas responsable, cela aurait été mieux, mais la magicienne n’en attendait pas tant de cette tête de mule pour qui la faiblesse était le pire des défauts. Elle reçut donc ses grommellements qui insultaient les trois “faibles” de leurs histoire sans se démonter.

Elle avait donc poursuivi son discours pour encourager Zoro à aller de l’avant. Elle avait l’intime conviction qu’il était suffisamment fort pour tourner la page de ce chapitre Reïfujin, pour accepter de continuer le chemin qu’ils avaient décidé d’arpenter ensemble. Elle eut donc un moment d’étonnement lorsqu’il ne saisit pas la main qu’elle lui tendait pour qu’il se relève. D’étonnement, mais pas de doute. Il ne comptait pas l’abandonner, mais il y eu un moment de décalage dans cette situation qui résonnait de persévérance et de détermination. Un moment où, Lux resta ainsi la main dans le vide, tandis que le guerrier semblait chercher quelque chose.

Devant la boîte entrouverte qui contenant un bijou, non seulement magnifique, mais parfaitement accordé à l’apparence de Luxanna ainsi qu’à son caractère, la magicienne resta un court instant bouche-bée. Ils en avaient parlé, donc évidemment ce n’était pas le summum de la surprise, mais tout de même, cela lui faisait tout drôle. Ses yeux s’embuèrent légèrement d’émotions, elle alors que ses joues s’empourpraient, elle tendit la main en lui donnant la réponse :
“ - Ce serait un honneur de t’avoir à mes côtés jusqu’à la fin,” répondit-elle.
Le guerrier eut un temps de latence lorsqu’il fallut passer la bague du doigt de sa demoiselle, aussi l’aida-t-elle discrètement en alignant l’annulaire avec le bijou lorsqu’elle tendit sa main.

Observant un instant le bijou, Lux murmura :
“ - Elle est magnifique.”
Lorsque le jeune homme se releva, elle s’approcha et se hissa sur la pointe des pieds pour l’embrasser timidement, entremêlant leurs doigts. Puis elle recula d’un pas sans le lâcher., et esquissa un sourire rayonnant teinté d’une pointe de malice.
“ - Je savais que tu n’étais pas du genre à abandonner. Tu es l’homme le plus persévérant que je connaisse.”
Quelque part, dans l’univers de Runeterra, Garen était jaloux que sa petite sœur dise ça à quelqu’un d’autre que lui, même si l’ignorait. La petite lumière décidait de ses fiançailles, et c’était loin d’être celles du genre que tante Tiana aurait prévu pour elle. Sylas aussi, quelque part dans l’univers de Runeterra, devait être jaloux. Mais il n’y avait qu’une Luxanna Crownguard dans cet univers, et bientôt elle s'appellerait Luxanna Roronoa. Tant pis pour les retardataires.

Pendant un instant, la magicienne oublia même qu’elle fuyait le pays, et resta ainsi à profiter de leur proximité. Les deux élus avaient leurs différences, mais elle savait qu’elle était heureuse en sa présence, et même mieux, qu’elle était meilleure à ses côtés. Il la poussait en dehors de sa zone de confort, lui offrant toujours un filet de sécurité auquel se rattraper, tout en la laissant se débrouiller seule. Il lui offrait du challenge, et c’était aussi vrai lorsque leurs idées se confrontaient.
“ - Je suis ravie de partager ta vie,” lui confia-t-elle en ce moment intime.
Dans cette étendue enneigée à perte de vue, ils étaient seuls au monde. Pourtant bientôt la réalité allait les rattraper : ils devaient quitter le pays.

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Ce n’était pas tous les jours que vous verrez Roronoa Zoro se tenir un genou à terre devant quelqu’un. Pourtant, inutile de réfléchir une seule seconde, il mettrait en œuvre tout ce qu’il fallait pour obtenir sa lumière à ses côtés pour l’éternité. Il glissa l’anneau au bon doigt après son acceptation émue, non forcément aussi touché qu’elle dans la mesure où il ne prenait pas véritablement conscience de la symbolique autour du mariage. Pour lui, avec ou sans, il était lié à elle pour l’éternité mais s’il fallait apparemment l’officialiser aux yeux de... De qui ? De la tradition ? Du monde ? Dieu ? Alors qu’il en soit ainsi. Mais il ne s’agissait que d’une simple formalité matérialisée par un anneau sacré.

Il reluqua un instant l’anneau au doigt de sa fiancée et son oeil de lynx lorgna subitement sur une minuscule gouttelette rouge. Du sang... Qu’il se pressa d’effacer d’un coup de pouce discret sur le côté de son doigt. Probablement le sang de Saiko ou de Mei répandu...

Il se redressa, ramassant la petite fleur au passage qu’il décida de garder secrètement pour lui afin de préserver une partie d’elle à ses côtés en dépit de la distance. Aussitôt, la jeune femme se hissa sur la pointe des pieds pour rattraper le peu de hauteur qui les séparait de leur visage respectif. Elle déposa un baiser pour l’occasion. Sa tête entière vira au rouge pivoine face à cet élan d’audace auquel il ne s’attendait jamais, auquel il ne s’habituerait jamais alors que... C’était la base ?

Leurs doigts entrelacés se gelaient sous le froid comme pour fusionner entre eux et il ne tenta pas de s’en détacher. Elle cala quelques compliments sur sa persévérance, sur son bonheur de partager sa vie avec lui et il savoura également cette proximité au milieu de cette terre de nulle part. Le bretteur essaya de s’accrocher à un objet de l’espace pour mémoriser le lieu extraordinaire de cette nuit là. Son iris courut sur le décor jusqu’à s’arrêter sur un vieux chêne mort, si glamour. D’accord, ce serait cet arbre.

Il rabattit son regard sur la petite tête blonde de sa vie, glissa sa main froide et libre derrière sa nuque pour la forcer à ramener son visage vers le sien afin qu’il y colle un petit baiser au niveau de son front. Et puis, expéditif, il déclara :

- Partons !

Ils se mirent en route si rien ne le contre-indiquait vers le sud. Cependant, il profita de sa présence dans le hameau pour voler deux chevaux dans une écurie voisine.

- Ils nous doivent bien ça...

Justifia-t-il son vol aux yeux de sa belle.
Atteindre la frontière était la question de quelques jours mais avec des chevaux, ils raccourciraient le voyage.
A dos de dada, l’aventure vers de nouveaux horizons démarra, refermant derrière eux un sombre chapitre.

Sur le chemin, à un moment donné, Zoro en remit une couche au sujet d’une question à laquelle il n’avait pas obtenu réponse. Il brisa dés lors la glace :

- Quel était le nom de celui qui a déverrouillé ton enchantement ?

Il ne pouvait pas passer outre cette histoire. Il n’aimait pas ce qu’il avait entendu de cet homme.

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Ft Zoro

Alors qu’ils étaient encore à quelques centimètres l’un de l’autre, Zoro posa un baiser affectueux sur le front de sa belle, qui fit fondre cette dernière comme un glaçon au soleil. Un mince sourire étira ses lèvres, et elle emboîta le pas du guerrier sans commenter lorsqu’il se contenta de commander “Partons !”. Elle s’apprêtait à tracer droit vers le sud lorsque le sabreur fit un infime détour pour … passer dans les écuries d’un pauvre natif qui n’avait rien demandé à personne. Il eut beau justifier à Luxanna que ce n’était qu’un dédommagement pour ce que Reïfuu leur avait fait subir, elle refusa net de participer à ce vol. Et elle ne comptait pas le cautionner non plus.

“ - Certainement pas. Pour commencer, se faire justice soi-même ce n’est pas la justice, c’est de la vengeance. Et si on commence, ça ne s’arrête jamais. Ensuite, Sou Reï est responsable certes, mais pas le propriétaire de ces deux montures qui n’a rien demandé, et qui ne sait probablement pas grand-chose de ce qu’il se passe à Heï.”

Sennou ou pas, elle avait vécu parmi ses gens, elle ne comptait pas leur planter un couteau dans le dos en partant. Elle s’attendait évidemment à ce que Zoro proteste, mais Lux campa sur ses positions.

“ - Maintenant, grâce à ma magie, je suis plus rapide à pied qu’à cheval, et c’était déjà ton cas il y a longtemps. Alors il n’y a aucune excuse pour partir avec ce qui appartient à un Reïfuujin innocent.”

Il était vrai que les deux élus allaient se fatiguer plus vite à pied qu’à cheval, mais de toute façon, les montures se seraient elles aussi fatiguées, ce qui imposait de toute façon des haltes de temps en temps. Et Lux aurait préféré courir pieds nus dans la neige que s’abaisser à voler. Ou même marcher sur les mains s’il le fallait.

Zoro était peut-être têtu… mais la magicienne également, et puisque c’était la seule des deux qui pouvait les orienter pour sortir de ce foutu pays, elle resta simplement campée là jusqu’à ce qu’il se décide à rendre les chevaux.

Les deux élus finirent donc par partir à pieds, alternant entre la course et la marche. Et Luxanna n’avait pas menti, on était loin de leur rythme de voyage lorsqu’ils étaient venus depuis le désert de Kaën. Elle rattrapait sans mal la vitesse de son amoureux, mais si ce dernier semblait simplement être un athlète bien entraîné, Lux semblait plutôt sous l’effet d’un sort. Elle laissait une traînée lumineuse discrète et éphémère dans son sillage, et ses muscles ne montraient pas les mêmes efforts que celui d’un coureur à pleine vitesse.

Pendant l’un des moments où ils marchaient pour tenir la distance, Zoro relança un sujet qui semblait titiller sa curiosité. Luxanna répondit sans l’ombre d’une hésitation … mais sans apporter aucun détail non plus.
“ - La Furie. Il ne donne pas d’autre nom.”
La magicienne ne comprenait pas l’intérêt du sabreur pour le sith. Ce dernier était un Reïfuujin, fondamentalement cruel et vil. Elle ne voulait pas en parler, elle ne voulait pas y repenser, elle tournait les talons et quittait cette nation pour de bon, laissant La Furie dans le passé avec le reste. Et pourtant voilà qu’elle y pensait. Elle voyait encore le corps de l’Elfe meurtri, brisé. En dehors du Sennou, c’était la seule chose difficile à vivre qu’elle avait subi à cause de Reïfuu. Mais c’était suffisant pour lui donner des frissons chaque fois qu’elle y repensait.

C’était aussi une source de détermination. Elle progresserait encore. Elle continuerait de s’entraîner et d’apprendre de nouveaux sorts. Et les prochains seraient le soin, ainsi qu’une version revisitée de sa cage de lumière. Après tout, si elle pouvait rendre sa magie suffisamment solide pour entraver quelqu’un, elle devait bien pouvoir la rendre résistante aux attaques non ?

Note:

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Contre toute attente, enfin pas tellement au fond mais sur le moment si, Luxanna se rebella contre le vol de chevaux, refusant d’avancer avec son cul posé sur le dos de l’animal. Evidemment... A quel instant avait-il pu penser que se marier changerait Madame la loi incarnée... Il roula de l’oeil. A peine fiancée et déjà barbante ! De plus, il réalisa combien elle sur-interpréta sa réplique, imaginant tout un délire de vengeance vis-à-vis de Sou Rei. Il arqua un sourcil hautain et lui répondit :

- Ils nous le doivent.. A toi en particulier, pour les avoir débarrassé de ce fantôme...

La réctifia-t-il tout simplement sans en rajouter, tout en passant devant elle vers sa monture. Cependant, la demoiselle ne démordit pas de ses positions. Têtue comme une mule, elle tirait la tronche jusqu’à ce que le sabreur céde, déblatérant ses arguments quant à sa vitesse. Lui qui désirait la jouer galant afin de lui offrir une balade romantique à cheval, elle lui foutait un bon gros doigt dans le cul...
Il s’approcha d’elle d’un faux air sévère.

- Tu mériterais que je te ligote à l’arrière de ce cheval...

Mais à la place, il soupira longuement et frappa le cul des animaux pour qu’ils se tirent. Il ne fallait pas compter sur lui pour les ramener à son propriétaire, il avait déjà assez fait d’efforts pour elle.

- T’as gagné, magicienne...

Sur la route, Le sabreur reconnut les progrès de sa lumière pour avancer à son rythme, ou du moins essayer. Il ralentissait le pas pour qu’elle puisse le guider à sa guise mais bien moins qu’autrefois et puis, ce n’était pas si désagréable de traîner de la patte en si bonne compagnie. Aucune raison de se presser à se quitter.
Il savourait leur balade vers le sud, très différente de leur voyage vers le nord. Bien moins de tension, arrivant le coeur lourd, sa Lux repartait le coeur léger. Zoro s’enfermait dans son silence, revisitant certaines scènes en boucle avec amertume. Il avait rendu visite à ce traître de Rhadamanthys, tout prenait ses origines avec lui !

Il écouta la réponse de sa belle au sujet de la furie et enregistra ce nom douteux. Il éprouvait les sentiments hostiles de sa lumière envers cette énergumène. Il entendait sa voix légèrement varier lorsqu’elle prononçait son nom, mal à l’aise. Cette histoire de sennou était bien louche, il se programma un moment pour opérer des recherches sur lui une fois arrivé à destination.

Mais alors qu’ils se trouvaient sur le chemin, très près de la frontière, un corbeau sortit de nulle part croassa avant de foncer droit vers le sabreur qui se mit en garde. Au dernier moment, le corbeau se réajusta au-dessus du pirate pour l’esquiver et lâcha un mystérieux papier dans sa main. Qui était-ce ?
Il s’arrêta et déballa aussitôt le papier après avoir jeté un furtif regard silencieux à sa compagne ;

Une invitation de Rhada à venir assister à son duel face à Sou Rei. Alors ça y était, le jour était venu pour le grand blond masqué de détrôner le roi des glaces. Il en profita pour exprimer ses regrets avant de probablement mourir. Il écrit même le nom de Luxanna, moment dont profita le sabreur pour lever un regard succinct vers sa jolie princesse. Puis il se replongea dans la suite de sa missive très... funeste. Cela ressemblait aux derniers mots d’un mourant, au dernier discours d’un honorable guerrier. Il déchira la lettre et la jeta en confettis derrière lui. Sa décision était prise, il retournerait une dernière fois à ce maudit parlais. Pour ce qui était des excuses, il réfléchirait en route.

- Il se passe quelque chose d’important, quelque chose qui va changer la face du monde. Je dois y retourner.

Il attrapa les mains de son élue préférée :

- Je te rejoindrai. Je te raconterai. Je te le promets.

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Deux têtes de mules et pas une pour rattraper l’autre. Si Lux se sentit un peu gênée d’avoir extrapolé les paroles du guerrier, elle ne revint pas sur sa parole. Elle n’avait pas affronté cette créature pour se permettre de se servir chez l’habitant sans rien demander, cela restait du vol. Elle ne grimperait pas sur ces chevaux, et elle irait à pied, point à la ligne. Sauf que Zoro n’avait pas dit son dernier mot. Constatant que sa demoiselle ne changerait pas d’avis, plutôt que remettre les chevaux à l’écurie … il leur rendit la liberté d’une claque sur la croupe.
“- Mais ?!” s’étonna la magicienne avant de regarder d’un air outré son fiancé. “ C’est malin tiens.”

Ils avaient cumulé le pire des deux options à force de camper sur leurs positions. Ils étaient à pied. Et le pauvre natif n’avait plus ses cheveux. Enfin, provisoirement, comme Lux l’espérait.
“ - Ils reviendront quand ils auront faim…” grommela la magicienne en se mettant en route.
Elle se disait que trouver un brin d’herbe dans cette toundra était parfois compliqué, alors le granulé et la chaleur de l’écurie pouvaient peut-être être un appât suffisant pour que le fermier récupère ses chevaux. Il ne fallait pas oublier qu’un animal domestiqué toute sa vie ne savait pas survivre seul en réalité.

Une fois en route, Zoro était revenu sur le sujet de La Furie, et la demacienne avait été soulagée qu’il n’insiste pas, en profitant pour passer rapidement à autre chose.

Le trajet se déroulait bien plus vite qu’à l’aller, et ils seraient sortis de ce pays en un rien de temps. Mais c’était sans compter la lettre que reçut le pirate. Ils s’arrêtèrent le temps qu’ils lisent le contenu du message, et lorsqu’il annonça qu’il faisait demi-tour, la mâchoire de Luxanna en tomba.
“ - Tu plaisantes ?”
Les bras ballants d’étonnement, elle ne résista d’abord pas lorsque Zoro lui prit les mains pour lui faire une promesse sans même y réfléchir. Le bleu des yeux qu’il regardait se couvrir d’un ton orageux et elle récupéra ses mains, rompant le contact avec le sabreur.
“ - Après tout ce qu’on a vécu là-bas tu vas y retourner ?! ”
Elle ne comprenait pas. Comment pouvait-il remettre si facilement sa liberté en jeu ? Elle aurait aimé lire cette lettre.

Mais la jeune femme ne comprenait toujours pas.
“ - Pourquoi ? Pourquoi tu veux y retourner ?!”
Malheureusement, Zoro ne comptait pas changer d’avis. Il ne comptait vraisemblablement même pas lui expliquer. Alors le visage de sa demoiselle se fixe ferme, et décidé. Elle ne pouvait pas l’en empêcher ?
“ - Très bien. Je viens avec toi. Je ne te laisserai pas y retourner seul.”
De toute façon, il ne pouvait pas l’en empêcher. Il ne pourrait pas la semer. Elle avait certes moins de condition physique, mais son sort de téléportation suffirait à arriver à Heï en même temps que lui, quitte à répéter son utilisation. Elle arriverait peut-être épuisée, mais elle pouvait parcourir la distance aussi vite que lui.

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Il volait les chevaux, elle n’était pas contente.
Il libérait les chevaux, elle n’était toujours pas contente.
Une femme éternellement insatisfaite.
La désapprobation se lisait sur son visage, notamment par un froncement de sourcils plutôt évocateur. Cette nana l’enquiquinait comme pas possible. Elle pouvait s’estimer heureuse qu’il soit complètement morgane d’elle parce que n’importe qui d’autre à sa place se serait fait envoyer balader. Elle bénéficiait donc d’un pass droit privilégié.

La bougonne murmura un commentaire dans le but de rassurer son petit cœur de guimauve. Rabat-joie, le sabreur fit exprès de la contredire :

- A condition qu’ils ne tombent pas sur un grizzli des neiges en chemin qui a également faim...

Répliqua-t-il tandis qu'un long sourire carnassier se dessina sur sa mâchoire pour s’amuser d’elle. Il trouvait, par moment, un malin plaisir à torturer cette âme pure et naïve qu’il aimait tant. Jamais sérieusement, bien entendu...

Pour en revenir au sujet qui fâchait, à savoir la lettre, la blondinette ne vit pas d’un bon œil ce retour inopiné. Elle en rompit brutalement le contact établi entre leurs mains et teignit son visage d’un ombrageux nuage. Évidemment, elle n’aimait pas l’idée et évidemment, elle ne souhaitait pas le lâcher.

Plongée dans l’incompréhension la plus totale et justifiée, la princesse questionna la décision du sabreur à la limite de la crise d’hystérie. Comment lui expliquer sa volonté de rebrousser chemin vers la capitale des malheurs ? Ce choix rentrait en contradiction avec leur vécu comme si le pirate ne tirait aucune leçon des événements. Mais il ne fallait pas oublier que Zoro suivait davantage ses principes que son expérience. Des principes guerriers qu’il ne jugea pas pertinent de partager avec la demoiselle qui ne comprendrait pas.. Il ne s’agissait pas de principes logiques ou raisonnés alors à quoi bon tenter de justifier son choix ?

- Une page de l’histoire se tourne, quelqu’un est entrain de concrétiser son objectif. Je dois y assister, ce n’est pas discutable.

Une affaire de respect pour un camarade en somme, mais aussi une affaire de devoir envers l’histoire de ce pays dont ils faisaient tous les deux parties, quand bien même celle-ci ne comportait pas que de bons souvenirs.
Il lui tourna le dos, n’ayant aucune intention de la convaincre car il ne pourrait pas et alors qu’il s’apprêta à faire un premier pas dans la direction opposée, la jeune femme annonça son envie de l’accompagner. Il détourna un visage interpellé vers elle. Il n’était pas fan de l’idée et lui fit savoir :

- Non. Tu rentres chez toi. Je te rejoindrai.

Mais aussi différents soient-ils, un point commun les réunissait : l’obstination. Au moins aussi tête de mule l’un que l’autre. Il se préparait à argumenter et entrouvrit la bouche pour ce faire mais dés lors qu’il croisa le regard absolument fermé de la magicienne, il se tut, les mots coincés dans sa gorge car il comprit que ce serait peine perdue. A la place, il expira, blasé et démarra sa marche en sens inverse.

- Fais ce qui te chante..

Elle n’en démordrait pas, sauf s’il l’assommait. Option non-envisageable.
Oui, Zoro était un protecteur forcené mais contrairement aux guerriers clichés, il croyait aussi en la responsabilité de chaque personne majeure. Il exprimait ne pas être d’accord mais il ne contraindrait personne. Dans son équipage par exemple, il était le seul membre à ne pas s’inquiéter à outre-mesure pour les plus faibles qui décidaient de participer à une terrible bataille, respectant plutôt leur courage, quand bien même l’idée ne le branchait pas. Car oui, il laissait aux suicidaires leur libre-arbitre mais son instinct protecteur le poussait à garder un œil sur eux et accourir à leur secours au moindre signe de danger. Avec Luxanna, ce fait doublait en vérité.

- Si tu me suis, je t’interdis de sortir de mon champ de vision.

Oui parce que s’il acceptait que sa bien-aimée s’expose à la menace, il ne fallait pas non plus abuser et elle avait tout intérêt à lui obéir au doigt et à l'oeil.

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Ft Zoro

L’Histoire avec un grand H. Voilà quelle était l’excuse du guerrier pour retourner droit vers son bourreau. C’était loin de satisfaire Lux. Des évènements historiques, il y en avait eu un paquet, et il n’avait pas tenu à assister à chacun d’eux. Et puis que se passait-il à Heï qui soit si important ? Était-ce grave ? Elle espérait que ce n’était rien de grave. Certes, elle quittait ce pays le plus vite possible, et elle comptait retourner à Kaën, ennemie jurée de la nation du nord. Mais elle détesterait qu’il arrive quoi que ce soit aux habitants de la capitale. Certains d’entre eux avaient été ses voisins, ses amis, son boucher préféré ou encore un garde prévenant.

De toute façon, elle finirait par savoir si Zoro tenait à y aller, parce qu’elle ne comptait pas le laisser retourner là-bas seul. S' il se faisait prendre, elle voulait le savoir. Elle voulait être en mesure d’agir. Ne pas attendre les bras croisés de savoir si Sou Reï lui avait à nouveau imposé le Sennou.

Luxanna s’était préparée à devoir insister, avait déjà mille arguments près à sortir la barrière de ses lèvres … et son fiancé accepta sans aucune difficulté qu’elle l’accompagne. Elle en resta coite un instant. C’était donc si simple ? Malgré son caractère têtu ?
“ - Parfait,” articula-t-elle pour se donner un peu de contenance.
Il ajouta cependant une condition, que la jeune femme eut tôt fait d’accepter. Bien qu’il était inenvisageable pour elle de changer d’avis, l’idée de retourner à Heï lui retournait les entrailles. La présence constante de Zoro serait bien la seule chose qui la rassurerait.

Alors que les deux élus venaient de traverser une bonne partie du pays, et à pied, sur demande de la demoiselle, il fallait désormais repartir dans l’autre sens. Ce foutu corbeau n’avait-il pas pu arriver plus tôt ? Les deux élus filèrent donc aussi vite que leur condition leur permettait, en direction de la capitale, demandant sur la fin un coup de main à un fermier qui se dirigeait vers celle-ci en carriole.

Traverser la cité donnait des frissons à Lux, mais en un certain sens, cela la rassurait de voir qu’il ne se passait rien de particulier. Du moins, jusqu’à ce qu’ils arrivent au palais. La magicienne était terrifiée à l’idée de devoir entrer. Aller jusque chez Sou Reï, alors qu’il savait vraisemblablement qu’elle avait brisé le Sennou, c’était du suicide. Heureusement, Zoro n’entre pas, et resta sur les escaliers qui menaient au palais. On sentait les vibrations du combat jusque dans les murs, et le guerrier semblait s’en contenter. La magicienne quant à elle, resta en retrait. Suffisamment proche pour que Zoro puisse l’avoir à l'œil, comme il l’avait demandé, tout en étant le plus loin possible de ce lieu maudit. Elle s’était adossée au bâtiment voisin, et gardait un œil fixe sur son fiancé, en silence. Il avait intérêt à lui expliquer le détail de cette histoire une fois que ce serait terminé. Et de décamper à la vitesse de la lumière avec elle.

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