Dehors les boches !

Repasser derrière les conneries de l’Uchiha devenait monnaie courante en Reifuu, tel était le destin qui attendait les rois élisant des betteraviers aussi irresponsables à des postes élevés.

Les orcs pullulaient à Reifuu, délogés de leur lieu originel, mais depuis quelques temps des plaintes volaient par pigeon voyageur jusqu’à la capitale. Des plaintes de villages, braves et honnêtes, travaillant dans les forges tout au long de la journée mais incapables de fermer l’oeil de la nuit au moment de se ressourcer. Pourquoi ? Parce que ces nouveaux habitants possédaient un sens de la fête légèrement colossal et un mode de vie quelque peu différent. Ainsi donc, des tam-tam, des rires gras, des cris bestiaux s’étiraient jusqu’au petit matin quand elles n’étaient pas soutenues par l’éclat de bastons. Il fallait dire que l’alcool coulait à flot dans ces soirées et des orcs bourrés n’étaient pas forcément le spectacle le plus poétique à contempler.

La goutte d’eau déborda du vase le soir où torchés comme des pelles, certains d’entre eux s’accaparèrent des volailles de la ferme pour les cuire vivantes, rôties sur une branche par-dessus les cendres d’un intense feu de camp. Abassourdis par la disparition de leurs poules, les villageois s’emplirent d’une rancœur déplaisante, agacés par les manières irrespectueuses de ces créatures. La cohabitation se faisait difficile quand l’un des deux partis se sentait écrasé et non considéré par l’autre.

La situation dégénéra particulièrement dans l’un des villages puisqu’un paysan à bout prit fourche et faucille pour aller le planter dans les fesses d’un orc de passage, un soir où lui-même avait picolé. Le scandale se répandit dans les zones alentours puisque pour se défendre, l’orc arracha à main nue la tête de l’inconscient avant de le planter sur un piquet à l’entrée du camp, mesurant 2 têtes de plus que le pauvre malheureux. Cette tête affichée représentait la menace immédiate qui s’abatterait sur les villageois qui tenteraient d’attenter à la bonne vie des orks. Cependant, cet incident diplomatique attisait les haines puisque les citoyens visualisaient cet acte comme une provocation insoutenable tandis qu’ils se sentaient pris en otage dans leur propre maison. Ils ne se sentaient plus chez eux, obligés de se plier à des étrangers.

De passage à Reifuu, un empereur de Fuyu avait donc été missionné pour apaiser les tensions, quitte à utiliser la force pour adoucir les moeurs. Par ailleurs, envoyer Roronoa Zoro donnait une idée de la manière dont les autorités souhaitaient que cette histoire se règle car le bonhomme n’était franchement pas un exemple de rhétorique. Il savait persuader mais non par les mots. Un homme avant lui fut envoyé pour discuter avec les deux partis mais était revenu bredouille, avec un joli coquard fleurissant en soleil autour de l’oeil. Alors on passait à l’étape supérieure et envoyer le bretteur sur le terrain ne présageait pas d’organiser un pique-nique.

Un transporteur l’emmena donc vers le village à problème, espérant que son action ici bas serve d’exemples aux bleds alentours.

- Quel bon vent vous amène mon p'tit monsieur  ?


Se fit attraper l'empereur de Fuyu à peine le pied posé dans le village. Un vieillard rachitique assis sur une marche à l'entrée fumait de la sauge. Visiblement, il ne savait pas à qui il avait affaire.

- J'aimerais bien savoir. On m'a rapporté des tensions avec les orks, que se passe-t-il ?

Un temps de silence s'incrusta entre les deux hommes qui échangèrent un long regard statique. Le petit vieux s'autorisa un espace pour souffler la fumée bloquée dans sa gorge et répondit d'un ton plat :

- Oh vous êtes ici pour les orks... Tout va bien pourtant. Ils se servent dans nos jardins, se lavent dans nos bassins, jettent leurs détritus dans la rue, empêchent les adultes de dormir et terrorisent les enfants quand ils ne nous diffament pas. Je ne vois rien de problématique, vous faites fausse route !

Le sabreur fronça les sourcils, non réceptif à ce foutage de gueule. Le guerrier faisait le déplacement pour venir les aider et ce malandrin se trouvait malin de tourner en ridicule la question du sabreur :

- Epargnez-moi votre ironie vieillard, rien ne m'oblige à mobiliser mon énergie pour vous !

S'exclama-t-il sans vendre son identité, qui changerait sûrement la donne dans l'esprit étriqué du vieillard. Heureusement, un enfant rattrapa le tir et courut vers l'empereur :

- Eh les gars ! C'est Roronoa Zoro, l'empereur du roi Rhadamanthys !!
- Regardez, le papy papillon discute avec ! Embraya le second.
- Qu'est-ce qu'ils se disent ? Qu'est-ce qu'il se disent ? Rajouta le troisième.

Le trio de queniots détalèrent vers la discussion électrique tandis que le fumeur de sauge modifia son expression du tout au tout quand il comprit quel homme avait accepté de faire le déplacement pour son cas. En effet, rien ne l'obligeait. Et pourtant, il était là, prêt à filer un coup de main à ces habitants. Automatiquement, le vieillard jeta sa pipe et s'inclina, à plat ventre contre le sol, suppliant l'empereur de le supplier car il s'était adressé à lui comme du n'importe quoi. Le cheveux vert le laissa faire, dans l'indifférence la plus totale, avant de lui demander de se lever car "profondément gênant".

Cette fois-ci, une petite troupe d'une dizaine de personne s'agglutina autour du pirate, chacun racontant une anecdote personnelle sur sa relation avec les orks pour que le bonhomme situe le souci. Ils se faisaient le porte parole pour le reste du village, probablement entrain de bosser.

- Ils m'ont boulotté mes poulets !
- Et moi dragué ma gamine !
- Je peux plus dormir !
- Pourquoi doit-on les supporter ?! Ils n'ont aucune manière !
- L'autre jour, l'un d'eux a chié au milieu de la route !
- Bon sang mais faites quelques chose..

Encerclé, l'empereur de Fuyu s'était transformé en bureau officiel des plaintes. Sauf qu'il ne parvenait plus à discerner grand chose dans ce brouhaha inaudible, telle une espèce de grosse glue difforme et mélangée avec des substances inconnues. Préservant le silence, faisant preuve d'une patience légendaire tandis que ses oreilles crevaient à petits feux, il prit une soudaine grande bouffée d'air, emplissant ses poumons jusqu'à gonfler les pecs au maximum. Puis, hurla :

- LA FERME !!!!!! OU JE VOUS EMBROCHE TOUS !

Pousser la gueulante eut pour effet de couper net ce souk de villageois à tel point qu'on entendit les mouches voler, chacun le fixant avec des yeux globuleux, médusés.
Ah ce que ça faisait du bien un peu de calme, il venait de sauver ses esgourdes d'une surdité inévitable.

- Bon ! Reprenons. Si j'comprends bien, ces orks vous pourrissent la vie alors que vous avez rien demandé et mangent à vos tables.

Les villageois acquiescèrent d'un mouvement de tête, n'osant plus sortir le moindre mot sous peine de se retrouver avec une fourche dans l'urètre.

- Je vais aller m'entretenir avec vos chers voisins. Continuez vos affaires habituelles.

Le bretteur prit son baluchon et se dirigea vers le camp des squatteurs indésirables à l'entrée du village. Les orks, mesurant 3 têtes de plus que lui, regardèrent le jeune homme d'un air semi-méprisant.

- Petit humain venir ici pour quelle raison ?!

S'exprima l'un d'entre eux, calmement assis pendant que les autres vaquer à leurs occupations. Le sabreur se focalisa particulièrement sur l'anneau de vache entre ses deux narines. Il ressemblait à un buffle à mettre aux enchères.

- Petit humain veut s'entretenir avec vous.

Cette histoire le gonflait à l'avance alors ils n'avaient pas intérêt à casser les couilles comme les villageois. Les orks, pas si cons que ça, saisirent la venue du pirate assez rapidement et argumentèrent sur leur version des faits. Soi-disant que certains d'entre eux étaient arrivés en reconnaissance pour tenter de marchander et échanger des connaissances mais dévorés par la peur, les humains les auraient chassé massivement. Régulièrement, dés que l'un d'entre eux franchissant le seuil du village, une marée de cailloux s'abattaient sur eux, ce qui leur donnait des désirs de vengeance, n'étant pas une espèce encline à se faire marcher dessus. La soumission ? Très peu pour eux.

- Mais vous comprenez que votre mode de vie n'est peut-être pas compatible avec le leur. Vous ne faites sûrement rien de répréhensible de votre côté mais chez les humains, les interprétations sont différentes. Une pratique classique chez vous peut apparaître comme une pratique irrespectueuse et déshonorante chez un humain, comme se servir dans son poulailler par exemple sans demander la permission. Nous ne sommes pas aussi communautaires que vous, la notion de propriété est importante à Reifuu.

Certains orks se grattèrent le sommet du crâne, interrogatif face à ce discours culturel. Comprenant que les orks n'étaient pas les plus futés, il se rendit compte qu'il les avait sûrement sur-estimé. Il soupira, car c'était peine perdue de leur faire comprendre la notion de différence culturelle :

- Bon, nommez un porte parole et je vais l'escorter là bas pour discuter avec le chef du village afin de trouver un terrain d'entente.

Comme prévu, il fut emmené au village où Zoro demanda une maison dans lequel discuter à trois : chef des orks, chef du village, et Zoro en médiateur entre les deux. Chacun s'assit à l'une des extrêmités de la table, face à face, et ils allaient discuter comme des bonhommes.

- Messieurs, trouvez moi une solution. Et j'peux vous dire que vous avez tout intérêt à trouver une solution à l'amiable parce que ça va barder.

Malheureusement, si les regards semblaient s'éclaircir de bonne foi, ils se voilèrent aussitôt. Il suffit que l'un ouvrit un peu trop sa gueule et l'autre ne loupait pas sur le moindre dérapage. Résultat, au bout de 5 minutes de négociation, ils se criaient dessus comme du poisson pourri. Le sabreur, d'apparence stoïque, observa la scène en gardant le silence quand subitement, la table fut tranchée en deux. L'incompréhension coupa tout aussi nettement les fureurs distinctes pour se tourner vers l'auteur de cette table tombant en lambeaux. Zoro avait perdu patience.

Il s'avança dans une démarche funèbre et attrapa soudainement les nuques de l'orque l'homme plus petit, il rapprocha dés lors leurs tronches l'une contre l'autre pour les écraser mutuellement.

- Si le dialogue ne suffit pas, on va utiliser la force pour vous rabibocher.

Bien entendu, le duo tenta de se débattre mais l'opération fut vaine sous la poigne solide d'un super-élu. Cependant, le hurlement d'une femme le fit lâcher lorsqu'elle entra en trombe dans la salle :

- J'ai eu une vision ! Un homme arrive, plus puissant que vous monsieur Roronoa. J'ai vu votre affrontement avec ce monstre et votre mort. Fuyez s'il vous plaît.

Comment prendre au sérieux les affirmations d'une folle pareille ? Quelqu'un de plus puissant était en route pour lui faire la peau ? Comment ne pas être sur-excité ?Zoro comptait bien l'attendre de pieds fermes si ces informations s'avéraient exactes. Cependant, la femme le pria sous peine que leur village soit rasé après le décès du bretteur. Malheureusement il n'était pas assez fou et égoïste pour entraîner deux villages dans sa chute, malgré sa curiosité de rencontrer ce drôle d'énergumène.
Les villageois jurèrent au cheveux vert que cette femme possédait un don des dieux, capable de lire l'avenir, une espèce de chaman en somme. Et si le sabreur se montrait rationnel, il constatait que Kosaten respectait des règles différentes. Ce genre d'événement était donc tout à fait possible. Face à la tenacité des villageois, il décida de ne pas prendre le risque et de s'en aller comme il fut venu.

Il laissa le relais au prochain visiteur... Insoupçonné.