Entre "Dieux"

Octavia se retrouva rapidement perplexe en continuant son voyage vers Kaen. Ayant consulté plusieurs cartes, elle était bien déterminée à tomber un jour sur Feng mais le chemin pour retrouver la capitale était bien étrange. Une forêt … De cendre ? Il semblerait que les arbres aient du mal à vivre en ces lieux. Difficile de capter le soleil lorsqu’il semblait neiger régulièrement des cendres. Cela rendait le paysage … Gris mais non sans une certaine beauté nostalgique. Une beauté qu’elle aurait bien abandonné au profit de la bonne santé d’un endroit pourtant promettant d’être si magnifique.

Heureusement qu’elle sut trouver un petit village en bordure de cette forêt, lui permettant de s’approvisionné avant de devoir attaquer une longue traversée, plus longue encore que tout ce qu’elle avait fait jusqu’ici. Les déserts … Ce n’était pas réellement l’élément d’Octavia. Non, la créature qu’elle était se voyait bien d’avantage évoluer dans les eaux les plus sauvages plutôt que les températures les plus ardentes. Dommage, vraiment. Peut-être qu’elle sera forcée de tourner le dos à Kaen si elle ne pouvait pas supporter la chaleur. Même si cette nation serait peut-être digne de recevoir son coup de pouce.

Cependant, avant de poursuivre son long périple, jaugeant le pour et le contre de sa traversée, se voyant presque forcée d’abandonner sa caravane ici puisqu’elle n’était pas du tout bien équipée pour les voyages dans le sable … Elle ouïe dire qu’un Hermite fut forcé à l’exile dans la forêt. Forcé, c’était peut-être un grand mot mais de ce qu’elle comprit des quelques conversations qu’elle entendit et celles auxquelles elle participa, un vieil homme semblait défendre avec une telle ferveur la véracité de ses contes et légendes. De ce fait, se sentant incompris certainement, il décida de quitter le village pour trouver sa place ailleurs. Quelles contes et légendes cependant ? Qu’est-ce qui était si important dans ses histoires qui le forcèrent à partir ? Et bien … Une histoire d’élu ? D’anciens élus.

Si on ne le croyait pas, Octavia savait que ce que cet homme pouvait raconter pouvait être la vérité vrai. Après tout, Adam était l’un de ces anciens élus et il était bien vivant, en chair et en os. Ce brave renard avait fondé son clan par le passé et aujourd’hui, il était encore debout apparemment. Que les anciens élus de Kosaten aient donc laissé une trace persistante sur le monde ? Elle le croyait fermement. Ce n’était pas le genre d’information qu’elle recherchait cependant. Le présent est la chose la plus importante. Le passé permet surtout de ne pas répéter les erreurs et donc, elle ne devrait pas l’ignorer mais l’instant présent ? Elle devait détecter les problèmes du monde actuel, les conflits, les crises, les malheurs … Elle avait déjà détecté un gros point noir en Shuza, en la personne de ce cher Zang … Cela allait très certainement être sur sa liste des choses à faire et des nuisible à écraser …

Elle décida tout de même de rendre visite à cet homme. Qui sait, peut-être cela lui sera utile, d’une manière ou d’une autre. C’est ainsi qu’elle fit temporairement demi-tour, reprenant sa charmante caravane de sorcière, comme on pourrait la qualifier, et l’élégante dame reprit sa route à travers les arbres grisé. Après de longues minutes, voir même heures, à emprunter la direction générale qu’on lui indiqua, Octavia se retrouva coincée dans un chemin impraticable. Il fallait dire qu’en charrette, elle était forcée de prendre les chemins prévus à cet effet mais lorsque les dits chemins se retrouvaient barrer par des arbres morts …

La géante sortit de son véhicule, pipe dorée à la main et fit quelques pas autour de la calèche pour faire face aux troncs sur sa route. Elle resta pensive, dubitative, venant caresser d’une main l’un de ses chevaux en silence. Bouger les arbres serait une activité bien trop éreintante pour elle. Elle était loin d’avoir recouvert la totalité de sa puissance magique ou physique. Tant pis. Elle vint détacher les lanières de ses chevaux avec les tentacules de ses cheveux pour venir les attacher à un arbre, un peu plus loin. Elle ne laissait aucun détail au hasard, aimant s’occuper du bien être de ceux qui l’entoure, les animaux également… Elle trouva un coin riche en herbe relativement fraiche qu’elle éclaircit de toute cendre d’un rapide balayage d’un fouet d’eau, venant caresser la tête de ses deux chevaux avec affection.

« Je reviens très vite ~ » Elle leur offrit ses simples mots avant d’abandonner sa caravane en toute confiance, sachant qu’à part nombre objets décoratif, il n’y avait rien d’extrêmement précieux à l’intérieur, pour l’instant.

Mais avant de passer délicatement au-dessus des troncs, elle offrit un dernier coup d’œil aux alentours, observant lentement chaque branche, chaque feuillage grisé, chaque rayon de soleil perçant à travers la poussière … Ses yeux s’aiguisèrent un peu, tout comme son sourire. Était-ce le vieil homme ? Ou quelqu’un d’autre ? Elle n’était pas seule ici en tout cas. Elle le sentait. Un regard. Une présence. Qu’importe. D’après ses informations, la demeure de cet Hermite devrait se trouver plus haut dans la forêt, une affaire d’une dizaine de minutes de marche ou un peu plus. Cependant, elle ne put s’empêcher d’hausser la voix d’un ton taquin, comptant sur le fait que quelqu’un était en effet dans les parages.

« Bien le bonjour à vous ! Cette forêt possède un certain charme morbide, vous ne trouvez pas ? Une balade en son centre, c’est presque un voyage surréaliste dans un autre monde ~ »

Et au pire, s’il n’y avait personne ? Et bien, personne ne sera donc là pour être témoins d’une femme bien trop élégante pour voyager dans la nature sauvage, en train de se ridiculiser à parler toute seule !

Octavia avait bel et bien vu une créature volante passer au dessus de la forêt il y a quelques instants. Cependant, elle ne fit pas le lien entre cette chose et la personne avec qui elle semblait parler pour l’instant. Non, elle sentait juste un regard, une présence, quelque chose. Les humains appellerait ça le 6eme sens, la créature appellerait ça tout simplement un trouble dans les énergies de la nature. Quand bien même elle ne parlait pas aux plantes mais plutôt aux coraux, la « magie » dans son monde se résumait à une grande communion avec la nature. Elle-même était, sans surprise, une grande adepte de l’eau mais lorsque l’on ressent les énergies magies de la nature, il y avait qu’une infime différence entre les éléments. Quelque part, elle se sentit un peu fière d’avoir repéré cette personne : elle n’avait pas TOUT perdu de ses capacités, juste une immense partie.

Dans tout les cas, alors qu’elle continuait à marcher dans les cendres, une voix lui répondit. Elle n’était donc pas folle, ce qui était une bonne chose. Elle connaissait les humains cependant. Même si son attitude pouvait laisser penser le contraire, elle savait que tout n’était pas tout rose, que cela soit dans leur monde ou pour chaque individu. Cependant, le fait qu’il accepte de se prêter au jeu ? Cela l’amusait déjà beaucoup. Cependant, le fait qu’il ne se montrait pas en disait également beaucoup sur cet homme, d’après sa voix.

Est-ce qu’il la craignait ? Est-ce qu’il préparait quelque chose ? Dans tout les cas, il y a quelque chose derrière le fait qu’il ne sorte pas de sa cachette. Une personne n’ayant rien à craindre et honnête se présenterait et viendrait lui faire la conversation. Allait-elle lui en tenir rigueur cependant ? Pas encore. Octavia avait traversé les âges. Elle avait la fausse impression d’avoir déjà tout vu des dizaines de fois alors qu’en réalité, elle avait vu beaucoup des dizaines de fois, pas tout. Elle était cependant confiante de pouvoir se sortir d’à peu près n’importe quelle situation et si pas, si elle devait se faire capturer par exemple ? Ainsi soit-il. Elle se laisserait emportée par le courant jusqu’à voir où cela la mènera.

« Oh, vous exagérez, mon cher. C’est un peu gris, en effet, mais la lumière sur les cendres, on dirait presque de la neige sans en être … » Elle vint s’asseoir sur un tronc juste pour pivoter et passer au dessus, haussant les épaules d’un air presque insouciant. « Enfin, les gouts et les couleurs, n’est-ce pas ? ~ » Avant de continuer sa marche de l’autre coté.

Cependant, Octavia comprit bien vite ce qui se passait dans la tête de l’inconnu. Ou du moins, elle croyait comprendre. Il devait savoir qu’elle cherchait quelque chose, cela serait logique. Après tout, cet endroit est hostile même pour les animaux de la forêt alors pourquoi une « humaine » viendrait trainer par ici si elle n’avait pas un objectif précis ? Bien observé. Allaient-ils se livrer à une petite joute d’esprit ? Peut-être. Octavia allait très certainement s’amuser avec ça, en tout cas.

« Ooh ? Quelle audace de votre part de croire que je suis sans protection. Nous nous connaissons à peine, mon cher. Vous risquez être déçu si vous vous arrêtez simplement à mon physique et à mes manières. Ou bien peut-être avez-vous tout à fait raison de croire ce que vous croyez ? Qui sait ? ~ »

Elle ne put s’empêcher de porter une main à ses lèvres pour cacher un petit rire. Oh, oui, quelle surprise s’il s’arrêtait à ça … Elle continua cependant pour répondre à sa prochaine question.

« Faut-il une raison pour se balader dans les bois ? Que les cendres vous rappellent de mauvais souvenir ne veut pas dire que c’est le cas pour tout le monde. Ou bien peut-être que quelque chose soit caché dans cette forêt et que je me dirige dans la bonne direction ?»

Lui cacher la vérité ? Ce n’était pas réellement son attention. Le faire languir ? Tout à fait. Cela n’avait rien de méchant, ce n’était qu’un petit jeu amusant à ses yeux. Elle reprit avec une pointe d’excitation dans la voix après avoir feinté un hoquet de surprise.

« Oh, que l’idée est vivifiante. Me voila donc sur la piste d’un trésor caché, n’est-ce pas ? Kosaten est réellement un monde plein de mystère et de découverte ~ »

Ses paroles pourraient la faire passer pour plus bête qu’elle ne l’était mais en même temps, elle ne semblait pas cacher ses sous-entendus et ses tons joueur, peu sérieux. Elle en savait plus que ce qu’elle prétendait connaître. Après tout, si ça se trouvait, elle était en train de parler à cet Hermite qu’elle cherchait. Cela ne serait pas surprenant. Elle laissa même entrevoir qu’elle n’était pas d’ici, même si son apparence devait hurler ce fait bien plus fort que ses petits sous-entendu. Elle continua donc sur le ton du jeu.

« Et vous, mon cher ? Etes-vous en quête de ce fameux trésor également ? Je n’empiète pas sur votre traque, rassurez-moi ? » Elle stoppa sa marche et se mit à regarder autour d’elle avec amusement, détaillant chaque arbre comme pour essayer de percevoir cet étrange inconnu. « Mais nous ne somme pas obligé d’en faire une compétition, vous savez ? La paix et le partage sont deux choses grandement appréciées par cette pauvre dame, fragile et esseulée ~ »

Une onde de choc la surpris … Après tout, c’est ce que faisaient les ondes de choc en générale, non ? Surtout quand celles-ci venaient du nulle part et quand celle-ci semblait avoir comme déclencheur … Une simple réalité évoquée sur un ton un peu trop léger ? Oh, cela allait être une de ses personnes, n’est-ce pas ? Elle aurait cru à un assassin ou un homme de l’ombre en générale en vue de sa manie de se cacher mais non, elle devait sans doute faire face à un sacré maniaque pour ainsi prendre la mouche après quoi ? Un bonjour et une ou deux phrases en plus ? Il semblait qu’elle avait également tiré sur une corde sensible en parlant de la paix, elle qui croyait prouver sa bonne volonté pour une entente mutuelle avec ça … Mais tout de même, elle ne sautait pas à la gorge des gens lorsqu’on lui disait adorer torturer des esclaves … Un exemple parmi tant d’autre, certes. Le point étant qu’Octavia n’est pas une adoratrice de la violence gratuite, et ce malgré le caractère violent de sa constitution elle-même

Dans tout les cas, à n’en pas douter, Octavia perdit un peu de son sourire taquin après une telle réprimande et en réalité, elle était un peu plus énervée que son visage passif ne pouvait le représenter.  Encore une fois, elle trouvait la raison de cet énervement totalement déplorable mais soit, elle s’arrêta donc pour l’écouter… Et même sortir sa pipe couleur or de son voile de tentacule qui lui servait de chevelure. Une griffure sur le coté de cette pipe, un feu vert flambant un instant avant d’inhaler une profonde bouffée de fumée. Il fallait garder son calme et se relaxer. Pourtant ce n’est pas avec une voix douce et fluette qu’elle reprit… C’était avec une voix profonde. Ou plus aigue ? C’était avec plusieurs voix qui parlaient en tant qu’une seule.

« Je suis heureuse de l’apprendre… Cependant, ne vous méprenez pas sur mes intentions. Mes mots étaient sérieux et sincère. Et ce que je ne supporte pas … » Elle prit une pause pour inhaler une nouvelle bouffée … Et lorsqu’elle l’expira, elle reprit un sourire qui lui était plus habituel, ainsi que sa voix normale. « … Ce que l’on ne croit pas en ma sincérité. » La grande dame se tourna alors un peu, par hasard réellement et s’arrêta, fixant l’homme qui venait de dévoiler sa cachette avec un petit sourire en coin. « Ah, vous voila. »

Si cet homme cherchait à la sonder, non pas de corps ou de réaction mais sonder quelque chose de plus profond encore, il trouvera très certainement la prestance d’une créature sombre, ayant habité des millénaires dans les ténèbres glaciales des abysses marines. Après tout, Octavia avait beau être une belle dame, ses yeux la trahissait. Le jaune putride de ses pupilles cachait quelque chose de primal, de sauvage… Quelque chose qui n’était pas humain. Et pourtant, provenant de cette même créature infernal… Une animosité inexistante. Si elle était en effet un animal, elle serait … Un agneau, très certainement. Oh, même si elle est loin d’être assez craintive pour être un agneau. Voyons voir. Une meilleure analogie, bien que bien perchée, serait qu’elle serait un adorable capybara. Ses grosses boules de poil capable de se lier d’amitié avec les plus grands ou les plus petits mammifères ou même les crocodiles les plus féroces.

« Je suis une élue, oui, mais si c’est la paix que vous recherchez, puisque vous en parlez avec tant d’ardeur, alors je peux vous assurer que nous avons les mêmes objectifs. Vous avez vu bien des choses, mon cher, mais vous n’êtes pas le seul… Je viens d’un monde ravagé par les guerres … J’ai vu tomber des générations et des générations d’humains … »

Elle finit ses mots avec une pointe d’amertume, de tristesse et de culpabilité. Ce qu’elle s’empêchait bien de dire était qu’elle était involontairement la cause d’un grand, grand nombre de ces mots … Elle qui n’a jamais participé à aucune guerre et n’a jamais tué que par extrême nécessité ou pour protéger de honnêtes gens … Elle avait cependant fournis la magie à l’humanité de son monde Elle avait fournis … Tant d’armes.  Mais lorsqu’elle se rendit compte que l’autre personne ne parlait plus et gardait le silence, son attention fut à nouveau captivée par cette personne, relevant la tête vers lui avec un fin sourire … Un haussement de sourcils l’interrogeant en silence sur le pourquoi de tant de sérieux.

Un bruit cependant vint briser ce silence pesant entre les deux individu. Là où …  Ce qui semblait être un ninja ? Oui, il y en avait aussi dans son monde, ils avaient un petit quelque chose de similaire, lui et eux. Bref, il se mit en garde immédiatement là où Octavia… Tourna simplement la tête d’un air moyennement intéressé. Pire, elle tira à nouveau sur sa pipe comme si de rien n’était. Des buissons surgit subitement un vieil homme qui, après le choc initial passé de son entrée pour le moins … Imprudente ? Semblait on ne peu plus amusant. C’était rafraichissant après tant de sérieux, même si le Kraken qu’elle était pouvait très clairement douter de l’intégrité de sa santé mentale.

Empereur de Fuyu, cependant ? Fuyu … Cela lui disait quelque chose. N’était-ce pas … Le mot que son cher Adam avait utilisé pour qualifier une des nations actuelle ? Fuyu, mais oui. C’était une nation de l’ancienne Kosaten. Cette conversation lui revenait à l’esprit.  Lorsqu’elle entendit ça, Octavia fixa l’autre élu, lui adressant un regard et une petite grimace qui voulait dire « félicitation, vous avez réussit dans la vie » mais elle ne dit mot … A la place, elle stoppa le vieil homme en se penchant un peu en avant. La géante vint ensuite l’intercepter en venant poser sa main contre sa joue, la lui tenir tendrement et même la caresser du pouce. Cet homme n’était clairement pas le plus beau, ni le plus élégants, ni le plus sain d’une manière générale mais il semblait cruellement avoir souffert de la solitude. Un peu de gentillesse n’allait tuer personne ici.

« Bien le bonjour, vénérable ~ Je suis flattée de provoquer une telle joie dans votre cœur mais calmez vous un instant, mon cher. Nous somme venu quérir votre sagesse. » Elle regarda à nouveau le ninja, ricanant un peu. « Je ne savais pas qu’il était empereur, mais s’il désire en révéler plus sur lui-même, il le fera en temps voulu ~ Par contre, le fait que vous le reconnaissez est très surprenant. Après tout, j’ai cru comprendre que les élus avaient disparu il y a un bon millier d’année … Bien avant votre temps, j’oserais dire. »

Elle se redressa alors un peu … Et commença, presque amusement, à retirer une à une les feuilles et branches qui ornaient le cuir chevelu du vieil homme.  Il était claire qu’elle n’avait aucune malice dans ses intention envers ce vieux fou qui désormais semblait légèrement subjugué face aux attention de la grande dame. En plus d’être une élue, elle lui adressait des gestes de tendresse indéniable, et tout ça avec un sourire toujours aussi innocent … Même si les plus mal intentionné pourraient sans doute voir ça comme une forme de manipulation, de charme.

« Mais je pense que notre empereur et moi-même sommes venu pour la même chose, n’est-ce pas ? Ô vénérable, racontez nous tout ce que vous savez. Les élus ont disparu depuis si longtemps et ils semblent être revenu, anciens … » Elle pointa d’un élégant geste de la main vers Heiwa. « Comme nouveau … » Puis elle porta cette même gestuelle vers elle. « Donc comment cela s’est passé ? Pourquoi un tel retour ? Pouvez vous éclairez nos lanternes ? ~ »

Octavia était prête à offrir toute la gentillesse du monde, que n’importe quel homme ou n’importe quelle créature pouvait offrir à une autre. Elle était, après tout, connue sous tant de noms mais elle affectionnait l’un d’eux en particulier : Ezili. Déesse des eaux, de la beauté et de l’amour. Un surnom et une légende qu’elle avait forgée en apportant une aide gratuite et désintéressée de tout bénéfice à un peuple vivant dans les marécages. Elle appréciait autant ce nom pour la simple raison qu’elle trouvait que la légende derrière lui ressemblait bien, contrairement à ceux comme le « Kraken » ou « Calypso ». Deux créatures ou divinité destructrices. Pourquoi étaient-ce ses surnoms les plus populaires ?

Dans tous les cas, oui, Octavia faisait preuve de gentillesse et d’affection, même envers un homme comme lui. Cependant … Cependant … Après tant de jubilation de d’excitation, après s’être détaché de son étreinte affective pour danser encore autour d’eux, de leur faire miroiter la réponse à leurs question et donner un espoir de compréhension … Le fait que tout retomba avec une telle platitude fit légèrement disparaitre le sourire d’Octavia. Elle vint même à tourner la tête en silence vers le ninja pour le fixer un instant avec dépit et lassitude. Oh, elle n’allait pas s’énerver. Jamais. Pas pour des broutilles comme celles-là, mais elle pouvait tout de même ressentir de la déception. Déception à ne pas avoir réponses à ses questions mais aussi déception de comprendre que malgré la chance qu’elle ait donné au vieux fou, il semblerait qu’ils ne puissent lui faire confiance. Pas outre-mesure en tout cas.

Il leur proposa ensuite de venir manger avec lui et si l’idée de s’assoir quelque part pour se relaxer ne lui déplaisait pas, elle n’était pas sûre de savoir… Tenir une conversation saine avec cet homme. Encore moins en présence de l’autre Elu qui parlait avec un tel calme, sauf l’unique fois où il fit trembler la terre, ce qui montra, à ses yeux, beaucoup plus de sa personnalité en cet unique instant que sur les nombreuses minutes qu’ils ont passé à parler. Madama était vue comme une déesse dans son monde mais la vérité était tout autre. Elle n’était ni omnisciente, ni omnipotente, ni aucune autre qualité divine. En réalité, son air chantonnant le cachait très bien mais l’excentricité de l’homme dépassait clairement la sienne et cela pourrait la perturbé sur la durée… Et c’est pourquoi elle usa habillement de la petite pirouette que le vieil homme lui proposa lui-même, penchant un peu la tête sur le côté avec une expression complaisante.

« Hmm, cela serait avec plaisir, mon brave. Cependant, je pense que le temps nous est compté, n’est-ce pas ? Comme vous devez le savoir, les élus sont lâché dans la nature, sans instructions aucunes. C’était également mon cas … Mais si notre devoir est d’empêcher une menace ? Il vaut mieux ne pas procrastiné. »

Elle marqua une pause… Et semblait désirer rajouter quelque chose avant que l’homme ne s’approche subitement d’elle. Il était clairement plus petit qu’elle, comme l’était la plupart, mais le mouvement soudain la fit tout de même reculer d’un pas et ouvrir les yeux en grand avec confusion. Il leva même un doigt vers le ciel en l’agitant un peu pour marquer ses paroles.

« Ooh, comportement attendu d’une déesse telle que vous, mademoiselle ! Tout à fait honorable, admirable, oui oui … Mais il faut vous détendre aussi. Votre cœur doit se dire que vous n’avez encore rien fait de mal, ici ! Et mes avis que vous ne ferez rien de mal non plus dans un futur proche. Vous plus que d’autres apprenez de vos erreurs !»

Suite à ses mots, il était clair que le visage d’Octavia sembla se décomposer. Choquée, surprise, surtout très curieuse de savoir comment un homme de Kosaten semblait décrire des choses véridique de son passé. La grande dame vint même pencher un peu la tête vers l’avant pour le questionner lourdement du regard. « Je vous demande pardon ? … »

« Oui oui ! Venez, venez ! Je vous promets, je fais d’excellentes racines grillées, Hahaha ! Je me doute que vous préféré le poisson mais … »

Ce qui paraissait être de vagues assomptions étaient en réalité d’autres vérités qui étaient très étranges dans la bouche d’un étranger, aussi banals étaient-elles. C’est pour cela qu’elle l’arrêta lorsqu’il commença à parler de poisson. C’est vrai, après-tout, qu’en tant que créature marine, Octavia s’était principalement nourrie d’animal aquatique durant des millénaires. Elle vint poser un doigt unique sur les lèvres du fou avec un regard légèrement plus sérieux, visiblement pas écœurée plus que cela par l’hygiène de l’humain pour oser faire cela.

« Un instant, mon brave … Que vous en sachiez beaucoup ou pas assez sur l’histoire de Kosaten est une chose … Mais par quel miracle pouvez-vous pointer avec une telle nonchalance ce que cette demoiselle a fait durant une vie passée ? »

Semblant respecter un minimum la femme devant lui, il retira délicatement, ou du moins aussi délicatement qu’il le pouvait, le doigt sur ses lèvres pousser un ricanement qui devint de plus en plus hystérique… Jusqu’à finalement parler de manière cohérente à nouveau. « Un bon magicien ne révèle jamais ses secrets, AHAHAHAH ! Je m’excuse si ça ne vous sied guère ! Laissez-moi … Laissez-moi … Oui … Vous guider ! Vous guider ! »

Encore une fois, Octavia regarda l’autre élu d’un air dépité, retirant sa main pour venir l’essuyer brièvement sur sa robe, au niveau de sa cuisse, reprenant une bouffée de fumé pour se relaxer. Elle ne savait pas comment elle devait recevoir cette nouvelle. D’un côté, elle n’avait rien à cacher mais de l’autre, il y avait une seule et unique chose qui pourrait compromettre son intégration ici … Que le mot se répande qu’elle n’a en réalité rien ou très peu d’humain. Le « très peu » venant du corps d’Octavia que la créature s’était appropriée. Avec le consentement de celle-ci, certes. Dans tout les cas, le vieillard se remit à danser un peu autour d’elle tout en lui offrant les conseils qu’elle n’avait visiblement pas quémandés.

« Vous allez perdre votre temps ! Oui, beaucoup de temps ! Car vous êtes toutes perdue, vous cherchez … Vous cherchez quoi, déjà ? Ah … Oui. Oui ! Vous allez hésiter, vous voulez bien faire alors qu’une seule … Une seule … Vous voyez ? Mais au fond, cela n’a pas d’importance, ahahah … Car les circonstances vous feront rencontrer en tant que … Mais le destin fera de vous des frères et sœurs ! Tout comme … Tout comme … Ahah … HAHAHA !»

Suite à ses mots, Octavia resta cloitrée dans un silence méditatif. Il manquait clairement des mots à certaines phrases, comme si son subconscient l’empêchait d’aller trop loin … Cependant, elle pouvait déduire par A plus B le gros du message, même si beaucoup de détails manquaient … L’hermite se tourna ensuite vers l’autre élu et s’approcha de la même manière pour tourner autour et l’observer d’encore plus près qu’Octavia.

« Et vous ? Et vous, ô empereur de Fuyu ? Voulez-vous des conseils, vous aussi ? Cela serait un honneur, un honneur ! Peut-être voulez-vous des informations sur … Ah. HAHA ! Non ! Vous y étiez, bien entendu ! »

Finir en tant que frères et sœurs ? L’homme pouvait être fou mais toutes les précisions qu’il avait données sur elle, elle ne pouvait ignorer ses mots. Elle perdrait donc son temps à faire ce qu’elle fait ? Et elle deviendra la sœur de quelqu’un d’autre à cause de telle ou telle circonstances ? Elle comprenait mais avait tellement de mal à se dire qu’elle serait la sœur d’un certain genre d’individu. A moins qu’il ne parlait pas de sa quête actuelle ? Si seulement il pouvait lui en dire un peu plus, ne serait-ce que pour éclairer un peu sa lanterne. Elle pouvait maudire l’existence pour n’avoir aucun talents pour la divination, obligée de se reposer sur ses études de l’existence pour constater les chemins à prendre les plus logique …

Mais bientôt, elle comprendrait qu’avoir plus d’information allait devenir bien difficile. Pas de lui, en tout cas. Pourquoi ? Et bien, parce qu’il osa approcher l’autre élu et qu’entre ses excuses, il laissa échapper bon nombre de détails qui fit sortir légèrement Octavia de sa transe de réflexion. Qu’il en savait beaucoup sur le passé ou même le futur de l’homme à ses cotés, elle n’en était pas impressionnée. Entendre qu’une menace était à venir ? Déjà entendu. Cependant, « il » ? Ils au pluriel, même. Ils n’accepteraient pas qu’il divulgue plus d’information ? C’était claire désormais : peut-être était il réellement fou et il inventait du non-sens mais encore une fois, Octavia le croyait. Alors, la seconde option est que quelqu’un l’informe. De manière conventionnelle ou bien magie, par lien psychique, par rêves ou visions. Peut importe la méthode, « ils » ne voulaient que les deux élus, ou même n’importe quel élu même, puisse en apprendre plus … Mais alors, cela voulait également dire qu’ils étaient dans une impasse.

Lle vieillard finit ses paroles sur un fou-rire qui lui sembla plus que douloureux. Par réflexe, même, Octavia leva un peu la main vers lui, un pied en avant, comme si elle aurait voulu le rattraper s’il tombait. Un geste trahissant la bonté dans son cœur noir de tendresse. Oui, elle aimait se désignait ainsi. Une insulte venant des dragons de son monde qui lui correspondait bien. Un cœur noir de tendresse. Mais au final, elle rétracta sa main en voyant que bien vite, l’homme se remit à sautiller et à danser en s’éloignant d’eux. Clairement, il s’attendait à ce qu’on le suive.

C’est pourquoi elle lança à nouveau un regard vers l’autre élu. Elle repensait à ce que l’hermite lui avait dit spécifiquement. Les circonstances les mènerons à devenir frères et sœurs. De qui il parlait ? Jusqu’où devait-elle croire l’implication de cette phrase ? Là étaient les questions à se poser mais même sans celle-ci, elle avait le désire de mettre les choses à plat avec cet homme. Le fait que l’autre s’éloigne était alors la parfaite opportunité pour cela.

« Mon cher … Je crains que nous ne somme parti du mauvais pied, vous et moi. »

Elle était convaincue de n’avoir rien fait de spécial pour mériter ce cri, plus tôt. Ou bien peut-être avait-elle simplement un ton trop léger pour certaines personnes, oui. Mais elle ? Elle n’avait jamais souhaitait aucune hostilité, ou susciter une quelconque forme de méfiance. La seule raison pourquoi elle ne s’était pas encore introduite venait du fait que l’homme devant elle s’était dissimulé pendant un long moment, rendant alors claire que ses intentions n’étaient pas des plus aimable. Quelqu’un qui n’a rien à se reprocher ne se cacherait pas. Certes, il pouvait la craindre, mais une fois qu’elle avait bien fait comprendre qu’elle n’était pas hostile … Enfin, soit. Elle s’approcha donc du ninja tout en restant à une distance respectable, voyant comment s’approcher trop de lui pouvait tourner.

« D’une manière ou d’une autre, vous devez avoir des raisons de ne pas me faire confiance. Cependant, j’ai tendance à croire cet homme. En quelques mots, il a bien résumé mon existence sur mon précédent monde, ses dons sont réels… Alors j’ai tendance à le croire lorsqu’il nous fait comprendre que nous ferons tous face au même ennemi alors pourquoi ne pas s’accorder à dire que nous ne somme pas ennemis ? » Elle retrouva pendant un instant un petit sourire de… « Circonstance ». « Ou bien si vous en êtes encore persuadé, signer une trêve au moins. »

Une main sur sa hanche, l’autre vient à être tendue vers lui. Cependant, même si son apparence noble pouvait insinuer le contraire, elle ne tendit pas celle-ci pour un baisemain, non. Pour une simple poignée de main. Elle ne lui était pas supérieure. Elle ne jugeait pas non plus qu’on lui doive des courbettes ou un respect réservé à une personne spéciale.

« Je possède de nombreux nom mais je préfère que l’on m’appelle Madama Octavia. Enchantée ~ »

S’il lui serre la main en retour, cela sera accueillit avec un sourire courtois. S’il refuse ? Et bien elle reposera tout simplement sa main sur sa hanche avec le même sourire, ne mentionnant pas son refus puisque cela serait peut-être plus malpoli que son refus.

« Il est évident également que cet homme est limité par une force qui le dépasse. Peut importe ce qu’il se passera, « ils » ne le laisseront tout nous dire. Cependant, il serait-être bon d’essayer de le ruser pour qu’il nous dise indirectement vers quelle personne nous devons nous diriger pour plus d’informations. Qui sait ? Peut-être a-t-il était touché par les dieux, ou peut-être est-ce un infâme enchanteur qui souhaite ne pas voir les élus de Kosaten connaitre la vérité pour d’obscures raisons. »

Elle pencha ensuite la tête un peu sur le coté. Elle était assez grande comparé à lui mais elle faisait surtout ça pour essayer de capter son regard. Avec ses yeux. Pas avec autre choses, pour être claire. Non, elle se doutait qu’il se ficherait de « ça ». Il avait l’air bien trop sérieux pour se soucier de ce genre de choses.

« Vous avez l’air d’être un homme intelligent. Cela serait normal pour quelqu’un qui a réussit à obtenir le titre d’Empereur de Fuyu. C’est pourquoi je vous demande humblement : pourriez-vous me porter assistance dans cette tâche ? »

Avant qu’il ne puisse répondre à sa question, les buissons dans lesquels était passé le devin provoqua un autre bruissement et l’homme en question vint en sortir en écartant les feuilles. Visiblement, il croyait qu’ils étaient derrière alors que les deux élus étaient resté sur place à l’initiative d’Octavia pour converser un peu.

« Eh bien, chers élus ? Qu’attendez-vous ? Venez, oui, venez venez ! Nous parlerons et nous discuterons de tout ce que vous voulez mais je dois vous faire honneur, oui oui ! J’ai de quoi manger, et boire même ! Approchez, cela serait un honneur… AHAHAH, OUI ! Un grand honneur ! J’ai vécu toute ma vie pour ce moment !»

Bien entendu, elle s’attendait à ce qu’il ne l’accueil pas à bras ouvert mais elle reçut réponses à bon nombre de questions à son égard. Comme elle l’avait deviné, cet homme a déjà subi bon nombre de trahison et faire confiance était devenue une chose difficile. C’était compréhensible, surtout avec son point de vue. Les guerres étaient plus que secondaire lorsqu’une réelle menace se lève et continuer de se soucier des différences entre humains en ses temps devenaient futile … Se faire trahir en tels temps de nécessité ? Oui, elle pouvait imaginer à quel point cela pouvait être à la fois désagréable et incompréhensible. Cela mettait d’ailleurs un poids en plus sur les épaules d’Octavia. S’ils venaient à un accord, elle se détesterait du plus profond de son âme de battre à nouveau un homme déjà à terre.

Le ninja s’approcha d’elle mais Octavia ne bougea pas, se contentant d’observer son vis-à-vis avec un air curieux alors qu’il élabore dans une bulle plus intime. Visiblement, il était d’accord avec son point de vue et encore une fois, elle devait également être d’accord sur la malheureuse nature humaine. Elle appréciait les Hommes, beaucoup oui. Il y avait tant de bonnes choses en eux … Mais aussi tant de mauvaises. Des divergences, au pire moment ? Oui, cela serait … Typiquement humain. Et une telle dissipation serait une erreur critique, surtout avec les enjeux qu’énonçait l’homme. Elle était d’accord … Mais elle en savait assez sur la nature humaine pour savoir que ceci allait être un jeu de chance, au final. Se préparer était la seule chose à faire, pour augmenter les chances … Mais si trahison il doit y avoir, trahison il y aura et les choses à faire pour contrecarrer ça … Sont minime.

Octavia soupira un peu, prenant un air plus concerné cette fois. « Je comprends parfaitement ce que vous pouvez ressentir, mon cher. Et je comprends également que même les plus belles paroles n’ont plus de réel poids à vos yeux. Nos valeurs ne sont pas les mêmes. Elles sont même différentes pour tout le monde. Mais peu importe celles-ci, il est inadmissible de faire passer les états d’âme en face de priorités de ce genre, je vous rassure que cela est entendu … »

Elle l’écouta s’accorder avec elle sauf pour un détail qui lui fit écarquiller lentement les yeux, penchant un peu sur le côté d’un air surpris mais d’avantage par émerveillement que par suspicions. « Quelle audace d’assumer cela, mon cher. Vous semblez savoir beaucoup de chose… Je ne devrais pas m’en étonner, cependant serait-ce les anciens dieux qui ont protégé les élus et donné à cet homme de telles capacités ? »

Il réitéra sa pensée sur sa confiance en elle ou non et vint ensuite serrer sa main, finalement. Non pas sur le long terme pour l’instant, mais en tout cas pour les instants à venir. C’était un soulagement en soit mais elle savait où tout ceci allait mener … Et cela l’inquiétait sincèrement. Elle ne reviendrait pas sur ses mots : lorsqu’il n’y aurait plus d’autres options, elle n’aura pas d’état d’âme si cela signifie sauver l’existence même. Cependant, elle ne connaissait pas encore assez bien cet homme, même avec toute sa bonne volonté, pour sceller un pacte qu’elle savait qu’elle pourrait tenir. Elle pouvait essayer de repartir sur de bonnes bases mais la première impression restait malheureusement la même. Un homme qui se cache et qui a eu un excès de colère pour quelque chose qui n’en valait pas la peine… Simplement avoir parlé de la paix avec légèreté.

Sa franchise la perdra un jour, sans doute, mais elle énonça sa vérité elle aussi. « Je garderais un œil sur tels élus dans ce cas. Cependant, laissez-moi vous expliquer quelques choses également … Mes actes parlerons plus que mes paroles et comme je l’ai dit, je vais pouvoir prendre les décisions difficiles au bon moment … Mais j’agis principalement pour le bien de tous. J’insiste : pour le bien de tous. Si sacrifice il doit y avoir, ainsi soit-il. Mais si une mort peut être évitée, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour l’éviter. Je ne doute pas de vos intentions, mon cher. Vous tenez la paix à cœur, je l’ai bien compris … Mais je ne vous connais pas assez également. Alors voici pour vous : je serais ravie d’étendre notre relation mon cher, à cette unique condition. »

Ainsi les termes du « contrat » posé, il ne pourra pas dire qu’elle l’aura trahit. C’était ce que son cœur, noir de tendresse, lui dictait. Sauver le monde ? Si tel était son fardeau, soit. Mais pas au prix des vies de ceux qui peuvent être épargné. Elle lui offrit donc un sourire courtois en lâchant sa main. Une fois ce poids légèrement retiré de ses épaules, elle laissa son air un peu plus sérieux s’évanouir. L’homme les interpella donc à nouveau et celui qui se fit appeler Nagato lui demanda aussi gentiment que possible de les laisser le suivre à distance raisonnable.
Ainsi ils reprirent la route en suivant le vieux fou, marchant côte à côte afin de pouvoir continuer leur discussion avant d’être confronté une nouvelle fois à la folie du vieillard. La géante continuant de se déplacer élégamment dans les feuilles et la cendre.

« Savez-vous d’autres choses sur l’entité qui a sauvé les élus par le passé ? J’ai entendu qu’il y avait des dieux en Kosaten mais jusqu’ici, je n’entends pas beaucoup parler d’eux. Comme s’ils n’étaient plus… Si eux n’ont pas su protéger Kosaten du premier cataclysme, alors il est sans doute tout à fait raisonnable de dire que si ce n’est pas eux qui ont sauvé les élus, alors l’origine de tout ça est quelque chose supérieur aux dieux… En ce qui concerne cet homme, si le questionner n’est pas fructueux puisqu’il perd le fil de ses pensées, je pourrais essayer d’interférer magiquement avec lui. Je suis pour le moins versée dans cet art, même si je ne garantit rien en vue de ma condition d’élu … »

Elle marqua cette conclusion d’un soupire. Fut un temps, elle était la maitresse incontesté de tout art ésotérique puisqu’elle en était sans doute la mère mais bien qu’elle garde la connaissance de son fonctionnement, sa faiblesse doublé des lois peut-être changeante de Kosaten rendait l’idée bien plus hasardeuse. Qui sait ce qui allait lui arriver si elle rentrait en communion avec lui ? Qui sait ce qui pourrait même lui arriver à lui ?

« Je ne vois malheureusement pas d’autres solutions. L’intimidation, la séduction, la sympathie, s’il ne fait que nous donner des informations incomplète, je crains que nous ne pourrons réellement exploiter le potentiel de cette pauvre âme … Il faudrait toucher à son pouvoir en lui-même et non à sa surface. »

Octavia ressentait une certaine fierté guillerette à l’idée d’intriguer ainsi Nagato, malgré le sérieux de leur conversation. Il l’écoutait religieusement mais elle décernait bien les faibles signaux sur les mots qui lui faisait réagir intérieurement. Elle ne montra cependant pas cet amusement, pas trop du moins, ayant compris que le sens de l’humour de l’homme à ses cotés était pour le moins … Relatif. Alors, à son tour, elle écouta religieusement ce qu’il avait à dire… Et ce qui se dit fut de précieuses informations. Pouvait-elle le croire ? Elle ne voyait pas pourquoi. Il était suspicieux au premier regard mais avait vécu à la précédente ère des élus. S’ils étaient destinés à travailler ensemble, la confiance allait être un point majeur à développer.

Ainsi, les Genchijiin, peu importe qui ils étaient, avaient trouvé un artefact assez puissant pour apporter la fin du monde. Une fin du monde qui n’aurait pas mit fin aux jours des dieux, cependant. La créature avait encore beaucoup de doute sur toute entité qui se faisaient appeler dieux. C’était une chose à prendre avec des pincettes lorsqu’on sait que dans son monde d’origine, tout humain appelait les créatures mystiques des « dieux ». Elle-même en était une, de déesse, à leurs yeux … Une vingtaine de créature extraordinaire dont la force n’était égale qu’à leur longévité. Dragons, phénix, quetzalcoaltus et … Krakens, comme elle, n’étaient que de simples animaux ayant perfectionné leurs dons magiques. Est-ce que ses créatures étaient réellement des êtes hors de ce monde ou bien n’étaient-ils que des créatures très puissantes ? Enfin, c’est ce qui passait dans l’esprit d’Octavia à chaque mention des dieux. Dans ce fameux panthéon, il y aurait donc également le père des dieux, un roi de la mort et au moins une entité qui serait au moins leur égal, d’après le ninja. Peut-être serait-ce une chose qu’elle pourrait approfondir dans le futur ? Qui pourrait bien détenir de telles informations ? Ou bien … Comment rencontrer ses fameux êtes surnaturels ?

Avec un soupire, Octavia regarda une de ses mains, l’air penaude. Dans sa paume, qu’elle orientait de façon à ce qu’il puisse difficilement l’apercevoir, sa peau se déplaçait, se tournait sur elle-même, s’ouvrit même pour faire apparaitre une chair mauve, mouvante, un œil vert également caché dans les muscles et les os… Un petit tour qu’elle cessa de faire dans l’instant. Il avait raison. Elle connaissait beaucoup de choses sur la magie mais la pratiquer maintenant serait inconscient. Le savoir, c’est le pouvoir mais malheureusement, cela ne fait pas tout. Elle ne pouvait même pas reprendre sa forme originelle à l’heure actuelle. Juste avoir manipulé ainsi sa main l’avait drainé plus que nécessaire.

« Vous avez raison. Kosaten nous a privés de tout. Il serait dans mon intérêt d’oublier ce dont j’étais capable par le passé. » Elle sourit en marchant à ses cotés. Par dépit. « Je suivrais vos sages conseils et patienterait avant de faire quelque chose qui s’approcherait de près ou de loin à un lien magique. Nous ferrons les choses de manières plus traditionnelle ~ »

Une longue marche s’en suit. Visiblement, le vieillard s’était aventuré loin de son chez lui. Au bout d’un moment cependant, Nagato reprit la parole et chercha clairement à sonder ses limites et par extension, sonder la solidité de leur possible alliance. Elle faillit répondre du tac-o-tac que la paix, ou tout concept même, était propre à soi-même et que c’était une précieuse rareté de trouver quelqu’un avec les exactes mêmes convictions que soit mais … Elle se retint. La « Paix » lui était précieuse. Tellement qu’il lui hurla dessus en guise de « bonjour ». Ce n’était pas l’angle qu’elle devait adopter… Elle répondrait simplement à sa question, non sans un air désolé décorant petit à petit son visage. Elle faisait mine de réfléchir mais la conclusion de cette question avait déjà été retournée encore et encore dans son esprit durant des centaines d’années puisque fut un temps où elle cherchait elle-même cette paix pour son monde ravagé.

« S’il n’y a pas d’autres choix … Si toute options ont été éliminée et si sauver une vie de plus reviendrait à condamner les autres … Si faire ce sacrifice veut dire que malgré toutes les pertes, le monde continuera de tourner … Alors je serais prête à le faire. » Cette conclusion n’était cependant la finalité de ses paroles. Il était important pour elle comme pour Nagato de savoir dans quoi ils s’engagent. « J’ai vécu des millions d’années, Nagato. Des millions d’années à essayer de donner un sens, non pas à ma vie, mais à la vie en générale. En des millions d’années, je n’ai pas su m’empêcher d’apprécier les humains, leur compagnie, leurs problèmes, leurs valeurs… Même ici, en Kosaten, j’ai rencontré des personnes et des élus que j’appellerais volontiers des « amis ». Mais ma tragiquement longue existence m’a fait comprendre que rien n’est éternel. Que je trouve l’amitié ou même l’amour, cela ne sera toujours que pour un temps. J’ai appris à dompter mes sentiments, à accepter les liens que l’on me propose tout en comprenant que dans le meilleur des cas, la mort va les briser. Lorsque le temps viendra… Je pleurerais mes proches. Encore. Je les garderais précieusement dans ma mémoire. J’aurais des regrets. J’aurais un vide en moi. De la culpabilité … Je n’aurais de cesse de demander leur pardon. Mais refuser de les sacrifier pour sauver l’existence ? Beaucoup ne comprendraient pas ces mots mais … Cela serait irresponsable de ma part. Je serais devenu le monstre que l’on assume que je suis. J’ai déjà tant de sang sur les mains. Cela serait hypocrite de ma part de ne plus vouloir me les salir. »

L’air désolé sur le visage d’Octavia ne reflétait pas l’intensité de sa tristesse en prononçant ses mots. La finalité de son raisonnement était horrible. Même elle, en le disant, trouvait cela … sale. Mais sa raison surpassait son cœur, aussi gros soit-il. Elle en souffrira, comme à chaque fois, une douleur à peine atténué par une lassitude certaine, mais la vie ne s’arrêtera pas. Pas tant qu’elle sera là pour y faire quelque chose.

Ils arrivèrent finalement dans une prairie. Clairière où nul arbre ne poussait, où la cendre recouvrait l’herbe et… Où une force magique conséquente protégeait les lieux et le préservait tel qu’il était. En son centre se trouvait un grand cercle de pierre, tout indicatif d’un lieu de culte ou lieu occulte, paysage formé par l’homme et ses croyances prenant vie ou formation naturelle donnant ainsi tout son mysticisme à l’endroit. Octavia se sentait … Mal à l’aise. Elle ressentait cette puissance magique et… Cela était presque trop. Sa vision était claire mais c’était comme si elle se brouillait quand même. Elle ne montra pas de signe de faiblesse … Autre qu’une main qui poussa une mèche de cheveux derrière son oreille avant que cette même main ne glisse sur sa gorge, comme si elle essayait d’étirer la parure d’or à son cou et au dessus de sa poitrine… Comme si elle cherchait à mieux respirer.

Le vieillard sauta dans le champ de vision, comme à son habitude, mais tout comme Nagato, elle ne sursauta pas et immédiatement, elle lui posa la question, un peu … Perturbée.

« Mon cher, vous … Savez choisir l’endroit de votre résidence. Par les profondeurs, sans vouloir vous vexer, comment pouvez-vous vivre ici ? »

Cela ne faisait aucun doute pour Octavia désormais. Peu importe la nature de l’endroit et de la magie s’y trouvant, habiter là avait clairement fait éclater la clairvoyance de l’homme. Constamment en contacte avec cet endroit ? Tout le monde serait devenu fou et imbue d’un quelconque pouvoir.

« Comment ? Mais c’est un endroit charmant ici, oui ! Charmant et très important, oui, très important ! Ils … Enfin, JE ! Me suis permis de construire mon petit chez moi au dessus des roches ! Attention, attention où vous mettez les pieds, ahah ! »

Plus loin se trouvait en effet une cabane pittoresque… Troncs et planches imparfaite faite mains décorant un unique, immense rocher au milieu du cercle, dans lequel il ou la nature avait creusé un creux pour former une petite grotte pour en faire l’intérieur de sa maison. A ne pas s’en méprendre, si le projet était ambitieux, il n’en était pas moins misérable. Ce n’était pas un travail finit, juste ce qu’un vieillard pouvait faire avec les moyens du bord, dans une forêt.

L’homme prit les devant en les guidant à l’intérieur du cercle et il vint leur ouvrir ce qui servait de porte à la demeure : ensemble de rondins assemblé ensemble par ce qui semblait être un mélange de tiges de métal volé et de résine. S’il n’était pas soigneux dans son travail, il était au moins ingénieux. Il les invita donc vivement à rentrer mais Octavia ne put s’empêcher de poser une question capitale, pour elle du moins. La nature de ce lieux était désormais bien plus intéressant à ses yeux que n’importe quoi d’autre.

« Et … Quel est donc ce charmant endroit, mon cher ? En quoi est-il important ? Est-ce … Un lieu de culte en Kaen ? La jonction des roches et admirable, tout comme votre bâtisse, c’est en effet un endroit spéciale. » Elle minimisait l’impacte de ses mots pour faire croire qu’elle avait besoin d’information supplémentaire mais elle pouvait très bien dire, même dans son état, que cet endroit n’avait rien de normal.

Elle viendra ensuite s’asseoir à la table improvisée du vieillard, jetant à peine un coup d’œil aux alentours. Des outils, de pauvres excuses de meuble pour répliquer ce qu’un citadin pouvait avoir, en foyer pour une marmite, une réserve conséquente de racine séchées … Et même un râtelier suspendu pour pouvoir y suspendre les prises de ses chasses. Une créature ressemblant vaguement à un lapin y pendant déjà, d’ailleurs.