Le vainqueur - et le vaincu Ft Zayro

Quête:

Le jour se levait encore sur cette cité de paix, Shuto Tokai. Et comme à mon habitude, je ne m’allongeai pas sur le lit de la chambre que j’avais prise. J’étais plutôt assis au coin de la pièce, une jambe repliée et l’autre tendue. Mon katana, appuyée sur mon épaule était ma seule berceuse.

Aux premières lueurs, mes paupières s’ouvrirent. Je sus qu’il était temps que je me mette en route. Je fis les étirements habituels, exécutai quelques exercices de musculation avant de rapidement prendre un bain.

En une demi-heure de mouvements et d’exercices, j’étais fin prêt à attaquer la journée. En un geste, mon voile me recouvrit totalement et mon masque d’argile rejoint immédiatement mon visage. De toute ma hauteur, j’étais redevenu l’ombre, une personne qui n’existait plus. Une ombre sous la seule nomination de Shiro. Et pour aller plus loin, on pourrait trouver Shiro Shinigami.

Sur mon chevet, il y avait une note publicitaire que j’avais dégrafée d’un mur. Le message parlait d’une guilde qui cherchait des guerriers aguerris, capables de réaliser toutes les tâches. Des plus louables aux plus exécrables. Ils cherchaient des jeunes, des vieux, des plus compétents, des moins compétents. Aucun profil particulier.

Il était intéressant d’avoir une source de revenu pour mes premiers mois dans ce nouveau monde. Air anonymement pour des personnes dont je ne connaissais ni d’Adam, ni d’Ève, était exactement ce que je cherchais.

Pour moi, il était donc question que j’aille m’inscrire à cette guilde et par la suite, observer ce qu’il en sera. Mais…

Pour une raison que je n’arrivais pas à comprendre, j’avais un mauvais pressentiment. Peut-être aurais-je pu aller le faire demain. Qui savait ce que cette journée me réservait ?

- Non…

Avouais-je finalement en souriant en coin. Je n’étais personne et n’avait rien. On ne pouvait rien contre moi et je me débrouillais pour ne laisser aucune trace. Sous l’insigne de Shiro Shinigami, je ne pouvais rien craindre.

Enfonçant le document publicitaire dans ma poche, je sortis de la pièce payant mon dû à l’aubergiste. D’un pas confiant, je traversai la ville qui venait à peine de se lever. Les boutiques et les commerces s’ouvraient à peine. Évidemment, il y avait les plus matinaux qui grappillaient les sous des lève-tôt de la ville.

Mon pas continua son cheminement jusqu’à ce que je me retrouve devant le lieu indiqué sur l’affiche publicitaire. Ici également, ils venaient à peine d’ouvrir. Il n’y avait donc que la réceptionniste et les tables et chaises vides.

À mon approche, elle m’interpella chaleureusement, demandant ce qu’elle pouvait faire pour moi. En un seul geste, sans dire un mot, j’extirpai de ma poche l’affiche publicitaire qui annonçait les recrutements.

Comprenant alors la raison de ma présence, elle dégaina une feuille à remplir avec un stylo pour le compléter.

Sur la case « nom », ce fut Shiro Shinigami que je remplis. Le reste des questions fut répondu sur la base des faits minimes. Je ne me présentais pas comme un guerrier aguerri, mais prêt à prendre des risques plus importants si l’occasion se présentait.

Le remplissage ne prit pas plus d’une minute suite à quoi, je remerciai la jeune femme.

Cette petite étape achevée, je tournai mes pas et entrepris de sortir d’ici au plus vite. Je devais donc seulement, attendre la réponse de la guilde.

Du moins, je voulais me retourner et partir aussitôt. Mais à l’instant même où je fis volte-face, je reconnus alors la silhouette imposante du colosse – messager de la mort. Il était bien trop proche. Relevant doucement la tête, je perçus finalement le visage dur et fort du monstre.

Par réflexe, ma main fusa pour tenter de prendre mon katana accroché à ma côte gauche. Mais alors que je voulus me battre, il mentionna directement mes deux noms – le faux et le vrai. Incroyable ! Alors sa foutue marque était belle et bien active. Il savait tout de ce que j’avais pu faire, de ce que je faisais et ce que je planifiais de faire.

La pauvre dame toute souriante tenta de calmer la situation, mais elle ne put que se faire décapiter sans même finir sa phrase. Et en moins de temps qu’il ne fallut pour le dire, on était encerclés de guerriers – et plus tard, par des soldats…

Tu parles d’une matinée pourrie….

- Je constate tristement que vous avez l’intégralité de vos capacités… contrairement à moi, Jinn.

M’avait-il suivi jusqu’ici ? Si c’était le cas, j’ignorais totalement ce qu’il me voulait. Quel était le nouveau plan foireux cette fois ? Je n’aimais pas cet effet. De perte de contrôle…

Ma colère monta rapidement. On ne pouvait pas vivre une vie tranquille avec Zayro dans ce monde – il constituait le blocage psychologique pour tout. Et pire ! Ma force actuelle m’empêchait de l’affronter. Ni lui, ni la totalité des hommes qui étaient autour de nous. De tous les moments du monde, il a fallu qu’il apparaisse aujourd’hui.

- Que me voulez-vous Jinn ? Je n’ai rien qui peut vous intéresser actuellement. Passez votre chemin.

À ces mots, je tentai de contourner le titan. Mais voyant avec tristesse le monde qui m’attendait à l’extérieur, je compris vite que je n’avais donc pas d’autres choix que d’échanger avec lui.

À nouveau je me retournai face à lui et demandai :

- Le monde est en état de chaos… j’ai été surpris de ce que Rhadamantys se présente à moi comme le plus gradé de Fuyu… ou devrais-je dire Reïfuu. N’êtes-vous donc devenu que l’ombre de vous-même ? Plus fort, mais moins ambitieux ?

Je savais bien que ses objectifs étaient aussi secrets que la raison de sa violence gratuite. Je ne pouvais donc simuler une quelconque maîtrise du sujet. J’ajoutai encore :

- Les Zayriens ont disparus il y a 1000 ans. Le conglomérat et tout ce à quoi vous avez pu être mêlé de près comme de loin. Vous n’êtes plus rien à cette époque. Si ce n’est un concentré brut de puissance sans but et sans objectif.

Étais-je en train de jouer avec le feu ? Bon dieu oui ! Mais avais-je raison dans mes propos ? J’en étais persuadé. Si j’étais contraint de discuter ici, c’était bien parce qu’il avait mis en place ce spectacle malsain. Mais à présent, que cherchait-il ? Et surtout, que me cherchait-il ?

Soudainement, les gens qui nous encerclèrent se mirent à bouger. Tristement, la seule chose que je voulais était de m’inscrire. Maintenant, ils s’en prenaient à moi également. Dégainant rapidement mon épée pour contrer certaines offensives, je tentai au mieux de ne tuer personne. Je ne tenais pas à aggraver mon cas.

Qu’allait-il se passer ? Je n’étais que le triste acteur d’une scène que je n’avais pas désirée. Zayro Jinn… maudit sois-tu !

La situation changea du tout au tout. Pour une raison qui m’échappait, il avait réussi à dénicher un brigand dissimulé sous les traits de la jeune réceptionniste. Mais quelque chose clochait… Ça ne semblait pas tout à fait exact. Mon instinct me criait clairement qu’il avait bousillé une innocente. Pire même, qu’il l’avait utilisé pour assurer son entrée dans la guilde. Il ne fallait pas se tromper, c’était bien pensé de la part du colosse.

Il se pourrait bien, qu’au sein de son esprit tordu, soit né une lueur d’intelligence. Avec des alliés, Zayro devenait bien plus invincible qu’il ne l’était déjà. Si même l’élu le plus puissant de ce monde avait reconnu l’importance d’alliés, il était inconcevable que je n’en fasse pas autant.

Quant à sa réputation, il se vanta du fait que le monde ne connaissait plus rien de ce qu’il avait maintenant. Ainsi, il pouvait agir dans l’ombre et surprendre ses ennemis. C’était bien pensé. Mais il se leurrait à lui-même. Sa réputation était une arme qu’il pouvait utiliser pour faire plier des évènements directement en sa faveur.

- Mentez-vous autant que vous le voulez Zayro… Il n’en demeure pas moins vrai que vous vous éclipsez. Peut-être cela est-il volontaire… Mais qu’importe. Mon retour changera la donne. Vous aurez le privilège d’observer le spectacle en première loge. C’est un avantage qui n’est réservé qu’à très peu de personnes. Soyez honoré !

Uno Jinn… il semblerait que le colosse ait un clone. Qu’est-ce que c’était encore que cette histoire ? Il fallait croire que celui que j’avais en face de moi n’avait rien de ce que j’avais connu de lui. Pratiquement aucune mort n’avait été déplorée jusqu’à présent. Il ne m’avait rien fait, si ce n’était siéger dans son trône de suffisance. Et pour clôturer la danse, il avait même un double à qui il me chargeait de lui inculquer la notion de l’échec.

Non seulement n'avais-je rien à faire de cette Uno, mais en plus, la remarque ne méritait pas d'avoir une réponse. Alors, comme un silencieux courant d'air, Uno apparut et disparut de notre conversation.

Visiblement, il ne comptait pas se mêler de mes affaires, et n’allait pas interférer pour le moment avec ce que je voulais faire.

- Vous avez changé Zayro Jinn… Visiblement ce millénaire de sommeil vous aura appris bien plus de choses que je ne le pensais. Malgré tout, il vous reste encore des choses à apprendre… Votre chemin est différent du précédent, j’ai bien envie de voir ce qu’il engendrera.

Effectivement, on était dans la guilde actuellement. Et peut-être que nous allions nous croiser à l’occasion d’une mission ou deux. Mais d’ici là, contrairement à lui, j’avais une véritable mission. Rebâtir mon clan. Cette nouvelle vie m’avait donné une opportunité sans égale. Je n’allais pas la gaspiller.

- Complaisez-vous dans vos alliances microbiennes. Je trouverai un moyen de vous défaire. Cela pourrait prendre un an, dix ans ou même mille ans. Mais je vais vous envoyer dans l’au-delà. D’ici là, Jinn… observez en silence la montée de l’empereur Uchiha.

À ces mots, je tournai les talons, m’approchant pas à pas de la porte. Était-il stressant de rencontrer le colosse ? Bien évidemment ! Mais sa nouvelle entité était plus perturbante. Si le chaos fait chair était devenu un homme prudent… qu’allait-il advenir de ce monde ?

Je parlais peut-être avec trop d’assurances. Il fallait que j’aie un œil sur lui en permanence. Un juste retour des choses à en juger par la situation actuelle, n’est-il pas ?

La rencontre avait été achevée… du moins, c’était ce que je pensais… Parce qu’avant que je m’en aille plus loin, je fus frappé du prix de mon insolence.

Comme quoi, même si le colosse avait changé, il n’en demeurait pas un être qui exigeait le respect et rien de moins. Plutôt que de me le dire, il commença déjà par écraser ma tête contre le mur, ce qui brisa instantanément mon masque, laissant alors un visage défiguré et ensanglanté. Par les cieux ! Le mécréant n’avait donc aucun honneur ? Frapper un élu sans défense ?!

Alors même que je tentai de reprendre mes esprits, une chaleur vive commença à se propager sur mon bras, déchirant les vêtements que j’avais pour laisser perler des gouttes épaisses de sang. La chaleur était dévorante, voire malsaine… Mais je n’allais pas lui offrir le plaisir de me voir souffrir.

Des veines de douleur et la mâchoire serrée, j’endurai ce supplice infernal, lent et progressif qui semblait durer une éternité. Mon physique souffrait, mais mon esprit lui se torturait dans la douleur jusqu’à en subir quelques séquelles. Une épreuve difficile qui déboucha sur un affaiblissement de mon audition. Je ne pouvais que percevoir le mouvement de ses lèvres, sans en comprendre un mot.

Mon bras… je ne le ressentais même plus. Ce monstre avait décidément un réel problème avec mon bras… après l’avoir tranché à notre première rencontre, maintenant encore il le…


Cette fois ci, mon os venait d’être sectionné. Le sang qui s’écoulait était tout aussi important que la douleur qui me tirailla les entrailles. Mais dans une peine insoupçonnable, je me cambrai, tentant en vain de bloquer l’effusion de sang qui continuait sans fin depuis mon bras. Tremblant comme une feuille devant une telle perte de sang, mon esprit semblait ne plus clairement saisir la réalité.

Je vomissais mon sang, encore et encore. Et espérais que je puisse enfin partir tranquillement. Mais avant que je ne pus même accepter la réalité de la situation actuelle, je fus encore porté par le crâne et écrasé par la pression de sa main. La violence de la pression était telle que mes os commençaient à céder.

Là… Ça en était trop… Je ne pus retenir mes cris de douleur incessants et perturbants. Les yeux rougis par les hémorragies internes, le tissu délabré et le vêtement détruit par la puissance Zayrienne, j’étais déjà préparé à mourir. Malheureusement, son objectif n’était pas de me tuer, et je le savais.

Il voulait me détruire, comme il l’avait tant l’habitude de le faire. Le cœur battant la chamade, je serai au mieux les dents pour contenir ma douleur. Mais en vain, il rajouta encore une couche en me faisant ingérer une puissance que je ne connaissais que trop bien. Ses misérables atomes dévastateurs.

Les séquelles ne se firent pas attendre. Me roulant par terre vomissant mes entrailles ensanglantées… je rampai pour essayer de quitter le regard de la foule. La douleur était telle que j’avais l’impression de voir mes intestins trempés dans les flammes d’un volcan. Je n’étais plus véritablement vivant, mais mon corps mi- conscient mi- inconscient avançait. À chaque mouvement d’avancé, je voyais de moins en moins le monde autour de moi.

Finalement, un carrosse passa par-là. Les sabots des chevaux frappants à toute puissance le sol dans leur chemin, ils ne faisaient que s’avancer sans craindre qui que ce soit. J’eus à peine le temps de tourner la tête dans la direction des chevaux que leur puissant sabot s’abattit violemment sur mon crâne, mettant de ce fait fin à ce supplice. Le visage n’était pas reconnaissable. Le corps quant à lui brillait dans un élan de disparition…

À peine rencontré, j’étais déjà mort.