Echange dans une ambiance festive - Ft Megan

- …

Observant au fond de la taverne, dans un coin où les regards ne passaient pas trop, ma chaise était dos contre le mur, la table juste à ma droite. La coupe de sake était près de moi, à moitié vide. Et les jeux de lumière de la pièce rendaient toute la partie supérieure de mon corps invisible. Comme masqué dans l’ombre des escaliers qui étaient au-dessus de moi, donnant à l’étage d’au-dessus.

Oui, j’étais de retour dans cette maudite cité : Shutô Tokai. La mission en laquelle j’avais posé pas mal d’espoir a tourné en bourrique. J’espérais trouver un artefact de ce fameux docteur Kô. Mais en fin de compte, après être retourné à son laboratoire, il ne s’agissait que d’une magie aux effets impressionnants. Mais si dangereuse qu’elle avait été classée comme interdite.

Finalement, ça n’en valait pas la peine. Une petite enquête était encore nécessaire, question de savoir si le grabuge causé avait eu un rapport quelconque avec moi, ou la femme casserole qui m’accompagnait. Heureusement également, nous n’avions laissé aucune trace.

Mais pour moi, c’était clairement retour à la case départ. Que pouvais-je faire d’autre si ce n’était de venir me sustenter tranquillement dans cette taverne ? Déposant mon masque sur la table, la tête toujours plongée dans l’ombre, je pris une autre gorgée de sake avant de reposer le bocal sur la table. Puis, soudainement, je fus interpelé par les personnes qui parlaient dans la pièce.

Homme sur la table en face de la mienne, accompagné de deux autres compères. Son premier compère avait un œil en moins. Le second, une dent en moins.

Principal : T’as entendu parler de la guilde toi ?

Œil en moins : J’entends parler de beaucoup de choses… Une guilde… tu parles de laquelle d’abord ?

Principal : Quel idiot tu fais toi… la guilde des aventuriers. Il se dit qu’on peut trouver des quêtes aussi faciles que de piquer un bonbon à un bébé… aux plus difficiles comme affronter les centres de Fenghuang…

Dent en moins : On peut en tirer combien ?

Œil en moins : toujours en train de t’intéresser à l’argent toi… peut être, pourrais-tu enfin t’acheter une dent en or cette fois. Plutôt que de rêvasser sur une fille de nuit pour une relation à vie.

Dent en moins : toi ta gueule ! On garde le sens des priorités… l’argent d’abord.

Sans nécessairement écouter ce qu’ils avaient à dire plus longtemps, je me rendis compte alors qu’il fallait effectivement que je m’inscrive à cette guilde. En plus d’être une bonne source de revenus, c’était également un excellent moyen d’avoir des informations sur les évènements du monde. D’ailleurs, à ce sujet-là, plus j’en savais, mieux c’était.

La soirée était plutôt belle. Et les festivités battaient leur plein dans la taverne. Une musique joyeuse, des hommes qui buvaient, pissaient à l’arrière et d’autres qui dansaient en de charmantes compagnies. Tout était si lumineux – sauf au fond de la pièce, à l’ombre des escaliers. Où se trouvait un homme. Croisant les pieds et buvant du sake, sans qu’on puisse voir clairement son visage.

Ma coupe de Sake se vidait peu à peu. Il n’en resterait plus rien, sous peu. Mon séjour dans ces lieux allait donc arriver à sa fin. C’était du moins, ce que je pensais. Parce que peu de temps après ma réflexion, une jeune femme ouvrit soudainement les battants de la porte pour s’introduire à la taverne. Mon œil mi-clos, ma tête ombrée s’inclina légèrement dans sa direction pour l’observer quelques instants.

Elle avait une apparence plutôt singulière. Loin des kimonos et des vêtements de la région. Elle s’habillait trop court, faisant penser à une fille de joie. Mais en même temps, son style vestimentaire était davantage barbare, comme une louve sauvage. Une bête qui était laissée à elle-même dans un monde cruel.

Sans rien faire d’autres, j’écoutai son intervention vis-à-vis des personnes qui étaient justes en face. Finalement, ma coupe de sake se vida. J’avais donc fini avec ce dernier et plus rien ne me retenait ici… En principe.

Cependant, j’avais trouvé de quoi m’occuper quelque peu avant de m’en aller. Quand elle s’exclama, j’attendis de voir les réactions. En dehors de quelques sifflements indécents, rien de bien sérieux.

- Vous… élue…

Soufflais-je à son encontre, profitant de la proximité qu’il y avait entre nous. Ma main gantée se leva dans le sens de la paume, le bras tendue vers elle. Oui, je l’interpellais. De là où elle était, elle n’aurait pas pu voir grand-chose à partir de la partie inférieure de mon cou, si ce n’était mon œil rouge et la silhouette assombrie de mon visage.

Finalement, ma main couverte, indiqua la place assise juste à ma gauche. Ce n’était peut-être pas l’endroit parfait pour discuter des choses intéressantes, mais pour sûre, j’allais la guider pour le peu de temps que j’avais à disposition.

- Venez découvrir ici, les secrets de ce monde. Les rouages de ce qui le composent. Venez apprendre comment survivre, comment grandir et comment finalement, avoir non pas de l’or, mais des yens. Monnaie utilisée sur ce continent depuis plus de mille ans.

Cela dit, je reposai paresseusement ma joue sur mon poing fermé ; mon coude faisant office de support. Peut-être venait-elle d’arriver dans ce monde. Peut-être connaissait-elle déjà comment ça marchait. Il était impossible de savoir ce qu’il en état en avance. La seule chose de sure, était qu’elle voulait rejoindre la guilde et je savais exactement comment y arriver :

- Je pourrais vous aider à rejoindre la guilde des aventuriers si vous le voulez. Mais est-ce que cela vous aidera d’une quelconque façon ? Auriez-vous l’ensemble des éléments dont vous aurez besoin pour survivre ? J’ignore d’où vous venez… mais ce monde est cruel. Bien plus encore que tout ce que vous avez pu voir jusqu’ici.

Cela dit, le tavernier avança dans notre direction. Bien évidemment, il ne voyait pas mon visage assombri non plus. Mais, il voyait bien sa nouvelle cliente disposant d’outils bizarres. D’étranges barres de métal et de cuivre qu’elle gardait dans ses fourreaux.

Serveuse taverne : Euh… Excusez-moi m’dame… vous prenez un peu de sake ? Un peu de ragoût ? Des sushis ? Qu’est-ce qui vous ferait plaisir ?

Sans même laisser le temps à la serveuse de terminer sa présentation, je répondis directement :

- Apportez du sake, un plat de ragoût et ne nous interrompez plus….

Acquiesçant joyeusement, la serveuse s’en alla appliquer les ordres. D’ici là, j’observai la jeune femme du coin de l’œil, la tête tournée ailleurs. Maintenant, c’était à elle de préciser ce qu’elle souhaitait.

Finalement, la brune vint s’asseoir à ma table. À ses propos, elle n’était pas tant intéressée par les éléments qui parrainaient ce monde. Cela faisait si longtemps que je n’avais pas rencontré de personnes aussi… simples ? Je devais le reconnaître : les simplets m’ennuyaient énormément. Rien ne m’intéressait davantage que l’ambition. L’ambition d’une grandeur infinie dans un monde où les dés semblaient déjà avoir été jetés. Si elle n’en était pas là… tant pis. Le monde allait lui donner cette soif inavouée d’accomplissement.

Elle communiqua en énonçant énormément de choses intéressantes. Sa cité d’origine semblait être Roanapur… De plus, je ne m’étais pas trompé. Elle n’était là que depuis quelques heures seulement. Sur la question de la dangerosité, elle semblait préparée. Les choses qu’elle avait accrochées semblaient être des armes, des outils de combat. Bien étranges et bien petits. Mais mon interlocutrice semblait en avoir une confiance aveugle.

Megan Sakkari… élue d’outre-monde qui avait trois heures d’existence. Maintenant, elle savait bien que j’étais en mesure de l’aider. Même partiellement.

- L’argent se gagne… Aujourd’hui, je suis plutôt prêt à vous fournir un peu d’argent, de quoi passer la nuit et vous sustenter à l’aube. En contrepartie, vous devez être prête à me rendre service quand je reviendrai à vous. Cela pourrait être demain, dans un an ou jamais.

Mon visage alla fixer un instant le sien, et alors que les festivités battaient leur plein, nous étions là, l’un près de l’autre, à échanger sur le possible destin qu’elle aurait en ce monde.

- Considérez mon assistance comme un coup de chance. Je m’ennuie un peu et j’en profite pour donner un peu de temps à un élément de ce monde. Un élément qui pourrait peut-être influencer le cours des évènements dans l’avenir.

Il était temps de se présenter. Mais tôt ou tard, elle finirait certainement par entendre parler de moi :

- Je suis Shiro Shinigami… L’ennemi du monde. Mais aujourd’hui, j’aide les élus à survivre plus longtemps dans cet univers. N’est-ce pas ironique ?

Laissant quelques secondes de calme, je repris :

- Pour la guilde, il est facile d’y adhérer. Un simple remplissage de formulaire suffit. Cependant il faut avoir conscience du fait que vous n’aurez pas immédiatement de l’argent. Vous allez devoir accomplir des basses besognes pour avoir de quoi vivre. Le temps de monter en puissance et de retrouver votre puissance d’antan.

Je terminai à peine mon monologue que l’assiette commandée accompagnée du Sake et d’une coupe supplémentaire arrivèrent. Il était temps pour moi de commencer. Je rechargeai mon verre, mon visage toujours masqué par la faible luminosité de la zone. Quand tout fut déposé, je commençai donc :

- Sakkari… vous êtes arrivé dans un monde déchiré par un jeu de pouvoirs. Les quatre nations phares du continent préparent leurs forces continuellement en vue de la future menace qui arrive. Mais peut être devrais-je commencer par le début.

Avalant une petite gorgée, mon regard se balada dans la pièce, et dans ce tableau jovial, le monde semblait presque se mouvoir au ralenti. Comme si, toute cette façade de joie n’avait plus d’importance. Plus aucune.

- Les anciens dieux se livrent bataille depuis des millénaires. Mais suite à une malédiction les empêchant de prendre leurs formes, ils appellent à eux, des personnes natives d’univers divers. Ces personnes appelées sont censées agir et servir selon les idéaux de ces dieux-là. Se battre, protéger, construire, étudier, etc. Pour une raison étrange, ces personnes sont appelées élus. Condamnés à vivre dans un monde qui ne leur appartient pas, impliqué dans une bataille qui ne les concerne pas.

Bien sûr, les choses avaient changé. Ce n’était plus tout à fait cela. Mais pour comprendre la situation, il faut retourner aux sources :

- Mais il y a 1000 ans, le grand cataclysme s’est abattu sur ce continent, brisant le règne des dieux. Ces derniers ont été dissipés et leurs pouvoirs ont été dispersés. La conséquence claire est que les élus aujourd’hui arrivent à ce monde non pas du fait direct de la volonté des dieux, mais par des failles. Des failles qui sont les conséquences du pouvoir des divins. Voici donc ce que vous êtes désormais. Une élue.

Plus je parlais, plus le monde semblait se pâlir. En réalité, c’était juste que les autres importaient de moins en moins. On approchait du point essentiel.

- Avez-vous entendu parler des nations de ce monde ?

Elle avait quand même fait trois heures. Peut-être avait-elle déjà pu trouver quelque chose. Ou bien, pour une ironie particulière, l’ennemie du monde était la seule aide qu’elle avait à disposition.

La légèreté avec laquelle elle accepta mon aide était quelque peu déconcertante. Peut-être avais-je affaire à une Kaen-jin. Les élus de cette nation avaient un caractère impulsif. Sans toujours revoir les choses à profondeurs, ils aimaient bien foncer dans le tas et voir par après ce que les conséquences seraient. Surtout si, à première vue, l’action posée allait dans leurs intérêts.

Sur le moment, je ne pus retenir le sourire hébété. Mais bon, à l’ombre qui dissimulait mon visage, elle n’aurait pu qu’apercevoir un étirement étrange du visage. À l’écoute de mon nom, elle éclata de rire. Ce qui était assez étrange. Surtout que ce nom fabriqué n’était pas sélectionné au hasard.

Shiro - 白 – clair et lumineux et Shinigami - 死神 – dieu de la mort. En somme, dieux lumineux de la mort… Même par mon nom, je laissais bien transparaître ma fonction en ce monde. Propager la mort et briller au milieu d’elle. Mais sans faire davantage de précisions sur le sujet, mon attention se tourna plutôt sur les mots qu’elle prononça par la suite. Japon. Japonais. Rien de tout cela ne m’était connu néanmoins, la raison de la destruction du monde était plus évidente.

- En tout temps et en tout lieu, le monde s’est toujours mieux porté à la suite d’un grand chaos. Seulement, Kosaten n’a pas été fidèle à cette description. Le chaos du cataclysme n’a fait que décupler le déséquilibre mondial. Il est temps qu’un chaos encore plus grand s’abatte sur ce dernier. Un chaos si grand qu’il forcera le monde à apprendre de ses erreurs. Et moi, Shiro, suis celui qui mènerait ce chaos jusqu’ici.

Par la suite, elle mentionna enfin un sujet intéressant, ses armes… Il semblait que ça soit sa seule et unique défense. Elle devait être mieux préparée. À moins que ces outils puissent neutraliser une barrière magique surpuissante, elle ne pouvait rien faire d’intéressant.

- En ce monde, la magie existe. La magie, l’alchimie, la technologie et la techno magie. Vous devriez vous armer davantage. Si dans votre monde, ces deux armes suffisent à vous défendre, soit ces armes sont extrêmement puissantes, assez pour réduire ce bâtiment et cette ville en charpie ; soit vous devez être mieux outillée. Mais dites m’en plus à son sujet… qu’est-ce qu’ils peuvent faire exactement ? Ils arrêtent le temps ? Manipule les particules de l’air ?

Soudainement, elle mentionna les formules de politesse. Tutoyer, vouvoyer. Cela m’importait bien peu à vrai dire. Par contre, pour une question de principe, je ne tutoyais jamais personne. Qu’il s’agisse d’un gamin en bas âge ou du plus âgé et du plus sage des hommes. Alors, sa remarque passa comme elle arriva, sans prise en compte.

Quand elle décida finalement d’allumer une sorte de cigarette, elle s’adressa à moi. En un simple signe de tête, je déclinai. Je n’avais non seulement pas de feu, mais en plus n’en voulait pas. Au risque d’éclairer la zone assombrie dans laquelle j’étais afin que mon visage soit dévoilé.

Attendant tranquillement qu’elle trouve une solution pour son problème, je veillai bien à regarder ailleurs si une tentative de luminosité forte s’approchait de mon visage.

Une fois en place, je commençai par jeter sur la table une carte. Dans son atterrissage, elle se déroula pour présenter trois continents. Kosaten, Mukai (qui semblait n’avoir qu’un seul nom en son sein – tenkasuru) et les zones inexplorées plus à l'Est. Des gribouillis sans sens.

- Le continent le plus à l’Ouest est exactement là où nous sommes : Kosaten. Il est réparti en cinq zones : Reïfuu au nord, empire des glaces au régime militaire sévère…

Kaen au sud, cité du soleil et du désert. Il est actuellement sous la tutelle d’un triumvirat. Les chefs des plus grands clans de leur pays.

À l'Ouest, Shintan. Cité technologique dont on ne sait quasiment rien. Si ce n’est qu’ils ont un potentiel technologique extrêmement avancé. Jiban… est leur capitale.

Finalement à l'Est, Shuzâ, la nation de la fertilité et de la richesse. Actuellement sous la coupe d’un despote. Il se dit qu’il mange les humains vivants…

Et finalement, au cœur de tous ces quatre états et nations, les territoires neutres. Disposant en son sein la cité Shutô Tokai. Ici, vous serez loin de tous les conflits politico-militaires qui menacent le monde. Pour le moment.

Gardant le silence un instant, je plongeai à nouveau mon regard vers la Sakkari. Vérifiant si elle avait bien capté les informations. Cela dit, je repris ailleurs. Annonçant le continent avec une seule mention : tenkasuru.

- Le deuxième continent est le mukai. Plus à l'Est encore que les terres de l'Est. Pour des raisons obscures, leur population, l’empire Tenkasuru, n’apprécie pas beaucoup les élus. Je vous recommanderais de ne pas vous y approcher. Ils constituent actuellement la plus grande menace pour le continent Kosatenien.

Et si vous allez encore plus à l'Est, vous y trouvez les autres îles encore inexplorées par les hommes. Du moins, sur les cartes que j’ai pu trouver, il n’y avait aucune indication de ce côté-là. Et d’ailleurs, cela ne m’intéresse pas.

Par la suite, je pris une autre gorgée de sake, attendant de voir ce qu’elle allait me poser comme question sur la base des éléments qu’elle avait déjà à disposition.

Elle n’avait aucune connaissance en magie. Dans son monde, cela n’existait pas. Je pouvais la comprendre. Dans le mien, tout se faisait sur la base du chakra. L’énergie vitale se combinait à l’énergie physique. Et par le biais des mudras, l’ensemble était mélangé de façon homogène pour générer une technique particulière : c’était alors le ninjutsu. Selon les affinités de chaque individu, on pouvait manipuler des éléments. La magie n’était pas totalement pareille.

Elle permettait de faire des choses incroyables et sa seule limite était l’imagination de son utilisateur. Mais bien sûr, étant une forme de science, il n’était pas donné à tout le monde de l’utiliser selon son bon vouloir. Surtout les élus qui venaient d’un monde où la magie n’était pas vraiment pratiquée.

Ses armes, elles, projetaient des choses à grande vitesse. La forte vitesse serait donc le secret qui confèrerait le pouvoir de destruction à ses projectiles. Mais peu importe l’intensité de la vitesse qu’elle appliquait, les projectiles ne pouvaient aller au-delà de quelques centimètres de pierre. Il était évident qu’il s’agissait d’un miracle technologique, mais peu utile contre les surpuissances et les nombreux monstres qui peuplaient le monde.

Commençons déjà par parler de la magie. Difficile d’expliquer un concept que je ne maîtrisais pas à une personne qui n’en avait jamais entendu parler :

- Le corps humain dispose d’une sorte d’énergie vitale, sans laquelle la vie ne serait pas. Cela pourrait se matérialiser comme la force qui permet à vos muscles de bouger ou bien ce qui permet à votre voix de s’élever. En suivant un entraînement particulièrement intense, il est possible de développer cette énergie pour la transformer en n’importe quelle ressource. Cela peut prendre la forme d’un bouclier, d’une épée, d’un jet de flammes, d’eau et j’en passe.

Observant quelques peu la réaction de mon interlocutrice, je repris calmement à la suite :

- Dans ce monde, il y a des personnes qui dédient des années au perfectionnement et à l’augmentation de leur énergie vitale. Au point où ils réalisent des prouesses qui échappent à la compréhension humaine. Comme se déplacer dans les airs sans appareils, communiquer par télépathie, et ainsi de suite. C’est ça la magie. À Kosaten, vous trouverez d’excellents mages et de très médiocres. Contre ces derniers, vos armes ne suffiront pas toujours. Vous devriez vous entraîner et perfectionner votre maîtrise de la magie pour mieux vous protéger. Les règles du jeu ont changé. Vous allez devoir trouver un moyen de vous y habituer à présent.

Sur la carte, Megan semblait avoir tout compris. Toutefois, contre toute attente, elle me questionna sur une zone que je n’avais pas encore visitée, les croisements commerciaux. J’ignorais totalement l’intérêt d’un endroit pareil, surtout pour elle. Peut-être avais-je affaire à une commerçante dans l’âme. Ça expliquerait peut être sa simplicité. Une commerçante armée pour se défendre au cas où les choses iraient mal… Rien n’était certain, mais j’avais la sensation d’être près du but.

- Cette zone ne m’a jamais intéressé. Je n’ai donc aucune information sur ce sujet. Toutefois, il semble être le lieu par excellent des échanges commerciaux entre les zones neutres, Kaën et Shuzâ. Pour le reste, il faudrait vous rendre sur place. Et… je doute fort qu’une carte redessine l’ensemble des chemins qui y sont. Je n’en ai aucune certitude.

Pour les armes, la question était évidente. Si elle avait un peu de chances, elle aurait pu trouver une technomage dans les zones neutres. Mais de toute évidence, il fallait qu’elle se rende à Shintan. Mais ne m’étant jamais rendue sur place, je n’aurais pas été en mesure de lui dire comment s’y intégrer.

- En restant dans les zones neutres, particulièrement à Shutô Tokai, vous aurez des chances de croiser quelqu’un qui pourrait vous aider. Mais pour en être certaine, rapprochez-vous de Shintan. La cité aura les réponses à l’ensemble de vos questions.

Enfin… une question intéressante arriva. Finalement, elle était peut-être plus ambitieuse que je ne le pensais. On était désormais loin de la jeune femme qui voulait juste de quoi se sustenter et se reposait. Elle voulait peser un peu plus dans l’échiquier mondial.

- Shintan est la cité la plus sécurisée et la plus protectrice. Aucune information n’a pu circuler à son sujet. Tout ce que l’on sait, c’est qu’ils sont le temple du savoir que renferment cette dimension et de plusieurs autres. Ils sont assez neutres. La cité est pilotée par Reisha aux dernières nouvelles. Vous devriez vous rappeler d’elle. La vision de la caverne azurée est un spectacle auquel la majorité des élus assiste lors de leur arrivée. Mais si vous ne vous en rappelez, ce n’est pas grave. Vous connaîtrez Reisha d’une façon ou d’une autre.


Reïfuu est la cité la plus militarisée. Elle fonde ses idéaux et ses valeurs sur la guerre, la victoire, le courage et la franchise. Vivre loin de cette population garantira une vie plus longue en ce monde. Elle est dirigée par Sou Reï, le monarque. On dit qu’il est immortel et incroyablement dangereux.


Shuzâ suit le même régime que Reïfuu. Il est dangereux et mortel de s’aventurer sur ces terres – particulièrement quand vous êtes autour de la capitale. Il est dirigé par Zang, un monstre qui mange les hommes vivants. Hommes, femmes, enfants et même ses soldats. Par contre, son peuple est composé de marchands. Ce sont les personnes qui sont certainement le plus en lien avec les zones neutres.


Kaën, peuple situé au sud. Actuellement dans les conflits internes pour des raisons qui ne m’intéressent pas. Il est piloté par un triumvirat viral qui représente les trois grands clans de la nation. La vie est un peu plus souple. Vous pourrez facilement y vivre paisiblement. Pour peu qu’aucune guerre n’éclate de ce côté-là.

Maintenant que les questions étaient répondues, je repris calmement :

- Que comptez-vous faire à présent ? Megan Sakkari

La magie l’agaçait. Elle ne savait pas véritablement comment digérer les informations qu’elle avait. Mais bon, il ne s’agissait que d’informations. La façon dont elle interprèterait ces données importantes dépendait totalement d’elle. Malheureusement, je n’avais pas assez de puissance pour lui faire une trop grande démonstration. Mais en relevant légèrement ma main gauche, je retirai le gant qui y était pour lui présenter ma main.

Froissant légèrement des sourcils, je fis radier un soudain faisceau électrique lumineux qui illumina légèrement mon visage, dévoilant un court instant, dans cette quasi ombre totale, mon œil bleu azur. Le rayonnement électrique fit comme un bruit d’éclatements avant de se dissiper rapidement dans le néant – remettant l’ombre comme elle était.

- Vous n’êtes pas dans un zoo… Mais dans une jungle dangereuse où vous devrez être armée pour le combat. Ou mourir face à une personne plus armée que vous. Aussi simplement que ça.

Vint alors les questions multiples sur les pratiquants de la magie. Ainsi que les zones à éviter sur la carte. Il était vrai qu’à l’époque, il y avait les zones inexplorées. Composées de monstres et de bêtes puissantes. Mais après le cataclysme, cette région avait disparue, devenant partie intégrante de Shuzâ. Dès lors, plus aucun endroit n’était particulièrement hostile.

- Dans cette salle, il devrait y avoir environs 3 à 4 personnes qui maîtrisent la magie. C’est aussi courant que la pratique du sport de compétition. Vous n’en trouverez pas partout, mais ils ne sont pas si rares à trouver que ça. Ceux qui sont les plus redoutables et les plus puissants sont un peu plus difficiles à dénicher. Mais vous pourrez les trouver en observant attentivement autour de vous.

Sur la question des zones, je réfléchis quelques instants avant de boire une gorgée de nectar alcoolique. Cela fait, je repris :

- Il n’y a pas véritablement de zones dangereuses à proprement parler… Vous pouvez vous faire attaquer dans vos voyages quand vous vous éloignez trop de la civilisation. Vous les découvrirez lors de vos voyages si vous êtes une grande aventurière. Ou jamais, si vous êtes véritablement prudente, et toujours au cœur des grandes villes.

Mon esprit alla encore fouiller quelques informations avant de revenir à la réalité :

- Reïfuu aime bien contraindre. Votre liberté se portera toujours mieux loin de la nation des glaces. Du moins, si vous êtes attrapé dans vos délits, il y a des chances que votre volonté soit manipulée. Je n’en sais pas plus.

Face aux noms codés qu’elle énonça, je répondis :

- Ces noms-là ne sont pas familiers dans ce monde. Et pour Reïfuu… Ils sont calmes, mais pas pour autant innocents. Je vous recommanderai de prendre davantage d’informations sur les natifs qui y vivent. Mais comme tout, méfiez-vous de ce qui semble d’apparence trop facile. Vous vous y prenez bien, mais redoublez encore d’efforts. M’enfin… le monde vous apprendra d’une façon ou d’une autre ce qui vaudra la peine d’être observé. Zang, despote de Shuzâ ne se déplace pas beaucoup. Il se dit qu’à son dernier déplacement, il a trainé derrière lui des montagnes de cadavres… Cela peut être une bonne chose qu’il reste en place. De votre perspective du moins.

Elle parla alors de la sa sorte de pipe… Effectivement, il y en avait en ce monde. Et peut-être dans tous les mondes confondus. Où les petites saveurs du quotidien pouvaient être appréciées.

- Vous en trouverez au sein de cette cité. Elles n’ont pas la même forme, mais ça ne devrait pas poser problème. Quant à moi, je n’ai plus de faction si ce n’est le chaos. Vous ne devriez sincèrement pas être trop à l’aise en ma présence. Même si cela va dans votre intérêt de l’être.

Concernant les cartes et leurs disponibilités, je pensais avoir pourtant été clair sur le sujet :

- Vous trouverez cette carte dans toutes les petites brocantes autour du continent. Il faudra être prêt à payer le bon prix pour la bonne carte, c’est tout.

Finalement, elle mentionna le service que j’allais lui offrir et tenta de négocier un service ‘’raisonnable’’. Il n’y avait rien de raisonnable dans mes services. Et elle n’avait pas compris cela. Prenant mon masque pour le ramener à mon visage, je rabattis mon voile sur ma tête en une capuche. Ma main alla reprendre la carte et de ma poche je sortis une petite bourse bien pleine :

- Megan Sakkari… Dans les jours à venir, je vais tuer et assassiner plusieurs centaines de personnes. Je brûlerais les villages, fomenterai une révolution et de ce fait, propagerai la mort sur ce monde. Quand je viendrai à vous, ça ne sera pas pour demander un repas. Et dès lors… vous allez me rendre le service que je voudrais. Que vous le vouliez ou non.

Je lâchai la bourse sur sa table, m’avançant jusqu’à me placer à sa gauche, debout, observant la porte.

- Tâchez de rester en vie d’ici là… Ça me décevrait beaucoup que vous mourriez peu de temps après votre arrivée. À bientôt… élue.

Sur ces mots, je m’en allai sans regarder en arrière. Les choses avaient été dites et désormais elle avait de quoi persévérer dans sa voix.