Sharing secrets - feat Lexi

Sharing Secrets

Le démon rouge était venu dans ce désert glacé à la recherche de solitude, pour de “ l’introspection” selon ses dires, c’est-à-dire plus précisément, pour écouter les bandes sonores enregistrées par ses ombres de manière tranquille. Le but était d’apprendre ce qu’il y avait à savoir sur ses cibles sans être surpris par qui que ce soit. Visiblement, c’était rapé puisque Lexi Hil’Feyan lui était tombé dessus. Celle-ci en avait tiré de rapides conclusions, qu’Alastor prit soin de nier, débloquant le quiproquo qui s’était installé. Il le fit sans empressement, calmement, avec l’assurance de celui qui a raison et n’a rien à se reprocher. La première raison toucha juste : elle flattait habilement la marchombre, faisait appel à la raison et la logique, et rappelait qu’il souhaitait entretenir leur relation cordiale. Elle répondit rapidement, restant méfiante dans un premier temps.

“ - C’est aussi parce, malgré votre drôle d’apparence, vous m’êtes sympathique, que j’étais d’autant plus déçue d’en venir à une telle déduction.”

L’élu reprit cependant, passant à la suite de son argumentation, continuant de s’expliquer avec soin. D’après lui, il ne faisait pas faire à autrui ce qu’il ne pouvait faire lui-même. Étrange façon de se justifier, songea la marchombre, c’était à peu près sur qu’il lui arrivait de déléguer des tâches. Elle ignorait évidemment qu’il utilisait ses ombres pour l’espionnage, en revanche il était aussi un deal maker actif. Lors d’un échange de services, il devait bien y avoir des gens qui faisaient des choses pour lui. D’un autre côté, si quelqu’un pouvait comprendre qu’on ne veuille pas travailler en équipe ou faire appel à quelqu’un d’extérieur, c’était bien la marchombre, solitaire et indépendante par nature et principe. Elle ne releva donc pas, et le laissa poursuivre sans l’interrompre.

Alastor prétendait qu’il surveillait Rinkyu Uchiha, ce qui expliquait ainsi qu’il ait eu accès à leur entretien privé. Pour preuve, il activa son étrange pouvoir - et Lexi eut un mouvement de recul lorsque son ombre s’approcha d’elle, se déplaçant comme si elle avait une conscience propre - et la voix du Shinobi retentit à nouveau. Cette fois-ci, il ne s’adressait pas à l’élue de Shintân, mais à un interlocuteur inconnu. Le contenu était plutôt intéressant d’ailleurs. Ainsi, il réfléchissait à faire tomber une nation ? Elle serra les dents, et espéra qu’il avait retenu la leçon avait sa petite visite inopinée chez lui. Mais elle se concentra à nouveau sur son échange avec Alastor.

“ - Si vous êtes capable de l'espionner , lui, vous êtes capable de m'espionner, moi. Il n’y a pas d’exclusivité à cela, en revanche je vois que vous lui soutirez des informations importantes et délicates. Je doute que vos talents ne se résument à m’envoyer deux espions à mes trousses, dont j’ai pu me débarrasser rapidement. Cela joue en votre faveur.”

En réalité, elle avait sous-estimé la ténacité des espions en question. Elle ne s’en était pas réellement débarrassée, mais était tranquille pour le moment. Elle plissa les yeux, jaugea le démon de la radio un court instant. Il pouvait avoir menti, mais Lexi était rodée à l’analyse corporelle des gens, et savait reconnaître les moindres signes de mensonge, même les plus infimes, puisqu’elle était aidée par des sens surdéveloppés. S’il mentait, il était plus qu’excellent. Elle posa son verdict d’une voix soudain plus légère, et ce, malgré la menace qu’elle s’apprêtait à prononcer.

“ - Bien. Je vous crois. Néanmoins ne vous avisez pas de m’avoir menti ou de m’espionner un jour. Je dirais bien que je vous tuerais, mais avec ces histoires de royaume des morts qui ne gardent pas éternellement les élus, je mentirais. Alors disons simplement que vous détruire me suffira.”

La marchombre avait toujours eu pas mal de verve, et les menaces bien senties faisaient partie des choses qu’elle maniait sans effort. Cela valait lorsqu’un tavernier bourru tentait d’arnaquer une nouvelle élue, lorsqu’un autre élu puissant nuisait à son peuple, ou encore lorsqu’elle avait un doute sur l'honnêteté d’un démon. Ce dernier ayant désamorcé la situation, il crut nécessaire de l’avertir au sujet de l’homme qu’il surveillait, la mettant en garde, avant d’affirmer qu’il lui avait menti “sans la moindre hésitation”. Elle serra les mâchoires, laissa passer la déception. Contrôler ses sentiments, ne pas les laisser lui lier les poignets. Il ne resta qu’un calcul froid, de la réflexion, et de la curiosité.

“ - Pourquoi pouvez-vous affirmer avec autant de certitude qu’il m’a menti ? A quel sujet selon vous ? Et j’ai d’autres questions encore, car se positionner aussi fermement vis-à-vis de quelqu’un attise la curiosité : pourquoi devrais- je devrais me méfier de lui ? Mais aussi, pourquoi avez-vous commencé à la surveiller ? Qu’est-ce qui vous y a poussé ?”

Lexi avait une chance d’en apprendre encore plus sur l’Uchiha, et de découvrir ce qu’il comptait faire vis-à-vis de la menace qu’elle avait proféré chez lui. Elle savait déjà beaucoup de choses, grâce à son investigation, mais le démon avait peut-être encore plus à lui offrir. Néanmoins, elle devait veiller à ne pas se faire manipuler par celui-ci non plus. Peut-être voulait-il la tourner contre le shinobi pour ses propres intérêts ? Elle l’appréciait pour ses manières et son respect, mais elle n’en restait pas moins prudente pour autant.  

Mais alors que le démon rouge s’apprêtait à parler à nouveau, elle le coupa d’un signe : son index posé sur ses lèvres. Quelque chose n’allait pas. Un battement de cœur, une respiration, non loin d’ici. Elle garda ce signe de silence, et se concentra. Dans un endroit aussi humide que Reïfuu, lever la brume ne fut pas difficile. Elle n’était pas bien épaisse, et paraissait encore naturelle, mais c’était suffisant. Alors que Lexi se trouvait encore devant Alastor la seconde précédente, soudain elle ne fut plus là. Elle se dématérialisa, et réapparut alors dans le dos du senseur qui l’espionnait, la lame de son poignard posée sur sa gorge. Elle se pencha à son oreille pour lui murmurer des mots doux. Enfin, je vous laisse juger de la douceur en question.
“ - Que ton binôme nous rejoigne. S' il se présente à nous, désarmé et docile, je jure de vous laisser en vie tous les deux. Sur mon honneur marchombre. “
A tort, la marchombre pensait qu’il s’agissait là  de l’un des deux espions qu’elle avait semés au niveau des côtes océaniques. Elle ignorait comment ils avaient pu la rattraper si vite, alors qu’elle avait couru à pleine vitesse d’élue pendant plusieurs jours. Néanmoins elle comptait bien s’en débarrasser tout de même .

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Alastor avait rejoint Lexi par un moyen de transport plus commun : la marche à pied. Lorsqu’il arriva, il était toujours en train d’écouter les enregistrements de son ombre, et Lexi en entendit chaque mot. Après tout, elle avait entendu l’espion camouflé dans la neige, ce n’était pas une conversation à voix haute qui se rapprochait qui allait lui échapper. C’est ainsi qu’elle apprit qu’elle et Zoro avaient un “traitement spécial”, elle ne doutait pas que cela veuille dire une surveillance accrue. Les deux hommes qu’elle avait semés devaient donc répondre aux ordres de l’Uchiha.
Le premier espion affecté à Alastor était toujours sous l’emprise de la marchombre, et son acolyte les rejoignit bientôt, espérant qu’en se présentant comme elle l’avait demandé, elle les laisse partir. Cette dernière n’avait qu’une parole, elle ne les tuerait donc pas. Néanmoins elle devait trouver une solution pour qu’ils ne leur cause pas d’ennui. Sous le menace de la lame marchombre, ils se laissèrent ligoter par Alastor, et la marchombre s’étonna que ce fusse tout.
Vous n’allez pas les laisser nous écouter tout de même ?
Puisqu’elle comptait les laisser en vie, elle avait besoin qu’ils n’en sachent pas trop sur le duo d’élus en pleine discussion. Elle fit courir son pouce sur le cou de celui qu’elle tenait encore à genoux devant elle, et trouva le point névralgique qu’elle cherchait. Elle appuya fort, les yeux de l’homme se révulsèrent et il tomba au sol inconscient. Elle s’approcha du second, qui paniqué et ligoté commença à demander pitié. Lexi leva les yeux aux ciels.
Il dort. Ou comate, peu importe, on vous réveillera plus tard.
Le même procédé l’envoya également dans les bras de morphée.

Le démon de la radio finit par reprendre la discussion avec son ton affable habituel. Il exposa son point de vue à Lexi : les rêves de conquêtes du shinobi ne pouvaient se faire sans finir par attaquer Shintân. Elle haussa les épaules.
Il y a le temps avant que son clan n’ait la puissance de telles prétentions de conquêtes. Shintân ne se sent pas en danger, et pourtant Reïfuu est une nation au moins aussi belliqueuse que Rinkyu, avec le même genre d’envie conquérantes. Ce n’est pas pour rien. C’est une nation qui sait se défendre. Et je serai là pour la protéger si une guerre venait à être déclarée. Ce que je souhaitais éviter avec les menaces que je lui ai faites, c’est qu’il profite de son statut d’élu puissant pour mettre à mal des citoyens pour son confort. Qu’elles pèsent comme une protection pour mon peuple.
Elle fit une pause, reprit.
A ce sujet je dirais plutôt que Rinkyu Uchiha est prudent, plus que paranoïaque. Un chef de clan se doit de l’être, et je me suis glissée jusque dans la chambre de ses meilleurs guerriers, lame en main, sans aucune difficulté. Il serait sot de ne pas se méfier de moi, et le fait qu’il le fasse sert mes intérêts : ce n’est que s’il me craint qu’il respectera sa parole de ne plus toucher aux miens. Quant au fait qu’il vous fasse suivre, il a eu raison, puisque vous l’espionner effectivement. J’ignore en revanche pourquoi Zoro est aussi sous une attention particulière.


Elle jeta un oeil aux deux endormis, allongés dans la neige.
A ce sujet, retournons à l’abri du caillou où vous écoutiez votre … ombre. Le vent va les geler sur place.
Joignant le geste à la parole, elle prit l’un des deux hommes en sac à patate sur son épaule, le second sous le bras. Personne n’irait jusqu’à dire qu’il était facile pour elle de les porter ainsi, car elle restait mince et moins puissante qu’un élu masculin aussi ancien qu’elle, mais sa force physique pure n’était plus à prouver. Elle retourna en marchant là où elle avait surpris Alastor, et reprit la parole sur le chemin.
A propos de ces deux individus, je peux m’en occuper si vous voulez. Ils oublieront tout ce qu’ils ont vu et entendu à votre sujet, ils oublieront leur ordre de mission qui était de vous suivre, et ainsi démunis de toute objectif, rentreront chez eux sans comprendre pourquoi ils en sont si loin et ce, sans ordre de mission.
Elle lui jeta un regard en coin et un léger sourire, signe que son animosité était passée : elle était suffisamment persuadée qu’il ne lui faisait pas un coup à l’envers pour retrouver son amabilité.
Considérez cela comme un service, entre camarades, ou ce que vous souhaitez.

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Pendant la discussion entre les deux élus, le démon se permit  de rire de ce que pensait Lexi. C’était bien la première fois qu’elle menaçait quelqu’un et qu’il se moquait ouvertement d’elle dans les minutes qui suivaient. Mais elle ne s’en formalisa pas. Alastor ne comprenait pas pourquoi elle ne se préoccupait pas d’une guerre entre Shintân et le clan Uchiha. Elle allait tenter de lui expliquer, et tant pis s’il ne comprenait toujours pas, mais elle n'allait pas se vexer pour si peu.

Vous vous leurrez sur mes intentions. Je ne m’inquiète pas d’une guerre qu’il déclencherait contre ma nation, car ce n’est pas mon rôle. Vous ne me voyez pas aller espionner Reïfuu, pourtant bien plus belliqueuse, pour vérifier qu’ils ne se préparent pas à nous envahir, si ? Et bien c’est pareil. La guerre, c’est le domaine de responsabilité de Reisha. Je suis fatiguée de m’occuper des affaires Shintanjins, et maintenant qu’elle est revenue au pouvoir et qu’elle a chassé ce T’slich de Tyr, je m’éloigne un peu de tout ça. Je prends du temps pour moi. Mais ne croyez pas que je ne sais pas me renseigner. Ne m’avez-vous pas écoutée quand j’ai dit que j’aurais pu égorger un chef de quartier ?

Elle prit une pause. Elle avait commencé par chercher des informations au sujet de l’Uchiha aux croisements commerciaux, avant de se faire admettre dans une caravane commerçante qui passait dans les montagnes. Cela lui avait permis de pousser son investigation toujours plus loin, d’en apprendre plus sur les missions des Uchiha consistant à leur ramener du monde. Elle avait même visité des villages qui, sans être au sein de la cité Uchiha, étaient alliés avec le clan, en échange d’une protection. Elle avait ensuite pénétré la partie publique de la cité, trouvé des soldats à amadouer, s’était faite admettre dans une unité militaire de senseurs. Elle avait appris comment était organisée l’armée, le fonctionnement des différents corps et la stratégie de ceux-ci. Elle était bien renseignée, et contrairement à Alastor, elle ne se contentait pas d'enregistrements audios. Elle était allée sur place. Elle avait vue, entendu, mais surtout vécu. Elle avait été au cœur même du clan pour en sentir l'essence.  

Je connais parfaitement la force de frappe militaire Uchiha, croyez-moi. Vous commettez une erreur si vous ne me prenez pas au sérieux. Lui l’a compris.

Ils avaient rejoint l’abri de fortune du vent et de la neige, et Lexi déposa les corps endormis des espions Uchiha dans un coin. Elle avait une solution rapide et sans douleur pour s’occuper d’eux, mais le cure-dent sur pattes avait d’autres projets pour eux. Il souhaitait les interroger, et ce, en l’absence de Lexi. Elle haussa les épaules devant tant de méfiance. Après tout, ne l'espionnait-il pas lui-même Rinkyu en toute impunité ? N’avait-elle pas été honnête dès le début quant à ses capacités d’observation à elle ?
Ne les abimez pas inutilement. La mort est inévitable mais elle n’est jamais juste. Ce serait stupide de n’en faire qu’à votre tête alors que je suffisemment plus efficace pour régler le problème.
Après tout, elle avait attrapé le premier, et appâté le second, et les avait neutralisé elle-même - non, nouer de la corde autour d'un homme sous la menace d'un autre ne compte pas comme une participation suffisante. Elle avait de plus promis qu'elle ne leur ferait rien, elle ne souhaitait pas que ces hommes, honnêtes et loyaux, ne souffre à cause de cela. Et comme elle pouvait s'occuper d'Alastor de la même manière, elle espérait bien que sa demande aurait un poids conséquent.

Le démon lui ayant proposé la petite pierre où il s’était assis avant qu’elle ne le trouve, elle déclina l’invitation et s’adossa simplement contre le gros rocher qui les abritait. Elle le laissa s'assoir s'il le souhaitait, mais préférait rester debout. Elle ne disait rien, quand il relança la conversation au sujet du shinobi, lui faisait luire d'alléchantes informations sans pour autant les lui donner directement. Elle haussa les épaules.
Dites toujours, suggéra-t-elle en se penchant en avant. Au vu de vos talents je suis assez convaincue que ce sera intéressant.
Elle avait terminé son manège avec l’Uchiha, et s’éloignait de la politique un moment et des problèmes, comme elle l’avait expliqué. Néanmoins, on ne crachait jamais sur des informations. Si elles étaient vraies, elles étaient bonnes à prendre, et serviraient peut-être plus tard. Si l’élu lui mentait, elle saurait à quoi s’en tenir à son sujet. Ce qu’elle ignorait encore, c’était qu’Alastor ne donnait rien gratuitement.

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Alors que les deux élues discutaient, la marchombre allait être rappelée peu à peu à la nature d’Alastor, qu’elle ignorait en réalité plus ou moins jusque-là. Ils s’étaient croisés quelques fois, et si la politesse du démon lui avait laissé une bonne impression, et que “dealmaker” ne semblait pas être une occupation trop malhonnête,  elle allait pourtant devoir se méfier de lui. Et il ne semblait même pas s’en cacher, lui avouant sans détour que sa “façon de faire” était un leurre pour qu’on se défie le moins possible de lui. La marchombre plissa les yeux, tentant de lire les micro-expressions de l’élu pour se faire une idée de ses pensées, le tout dans une moue méfiante. Mais ce n’était pas simple du tout.

Lexi n’étant pas habituée aux fourberies d’Alastor, elle se contenta de hocher la tête quand il dit qu’il pouvait promettre de ne pas faire de mal aux shinobis, sans le promettre en réalité. Dans le langage usuel, cela signifiait simplement qu’on allait faire - ou ne pas faire suivant l’idée - ce qui était demandé, le fait de jurer effectivement ou non ne changeait rien et tout restait basé sur la confiance. Confiance que la marchombre n’accordait jamais simplement, et qui se rétractait à mesure que l’attitude du démon était louche.

Ce dernier lui fit miroiter des informations juteuses, avant de les retirer comme on fait avancer un âne avec une carotte sous le nez. Et au passage, il précisa sa nature de démon, achevant de convaincre la marchombre qu’il était loin d’être aussi gentleman qu’il en avait l’air.
Un démon ? Votre attitude le fait oublier, malgré votre apparence … étrange. Sans vous offenser. Mais quelle est votre définition du démon, Alastor ?
Elle le laissa poursuivre, et serra les mâchoires lorsqu’il commença à demander une contrepartie, et avouer que normalement, le troc était … une âme. La marchombre ne put s’empêcher de rire.
Une âme ? Contre des informations ? Vos clients sont de piètres négociateurs, faites attention à vos prix, car je peux facilement vous faire concurrence visiblement.
Et elle n’avait pas tort. La marchombre avait les capacités de faire bien des métiers, dont celui d’espion, de voleur ou d’assassin. Et pour récupérer des informations, aussi croustillantes qu’elle soit, elle comme d’autres mercenaires de ce monde aurait des prix bien plus abordables qu’une âme.

Finalement, Alastor lui proposait des informations soit-disant capitales, et la laissait proposer une contrepartie. La marchombre haussa les épaules.
Ne sachant pas en avance ce que valent vos informations, c’est difficile de jauger si elles m’intéressent et à quel prix. Mais faisons un jeu. Vous me posez une question, et si je le souhaite, je réponds. Sinon, on change de question. Une fois que vous avez une de mes réponses, vous me donnez une de vos informations soit-disant si précieuses. Mais si elle ne l’est pas suffisamment, j’arrête le jeu. C’est plutôt bon enfant non ? En plus, je suis la première à donner une information, et vous êtes sûr qu’elle vous intéresse puisque vous en guidez le sujet. Alors que vous, vous me dites ce qui vous arrange finalement. Ca me paraît plus qu’avantageux pour vous non ?

En fait, c’était presque de la charité de sa part, étant donné qu’elle aurait pu arracher les informations du démon par la contrainte. Elle avait toute une panoplie de choix, et elle avait perfectionné chacune de ces possibilités pendant de longues années. Mais elle n’avait aucune raison de faire d’Alastor un ennemi, et n’avait pas besoin d’informations plus que cela. Elle prendrait ce qu’il y avait à prendre, lâchant les bribes d’informations qu’elle souhaiterait en échange. Puis elle continuerait sa route tranquillement. Pas d’intrigues, pas d’entourloupes. Même si c’était la spécialité du démon. Elle ne précisa d’ailleurs pas qu’il valait mieux qu’il évite de lui mentir. Elle avait déjà averti Alastor de ne pas lui faire à l’envers, il avait bien dû comprendre que cela concernait tous les domaines envisageables.

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Les deux élus étaient installés à l’abri du vent glacial de Reïfuu, pas vraiment confortablement il était vrai. Lexi, adossée à une pierre froide, ne gardait sa chaleur que grâce à son armure technomagique ; elle baissait les yeux sur le démon de la radio, lui aussi assis sur de la roche. Un démon ressentait-il le froid ? En Gwendalavir, il n’y avait pas d’opinion généralisée sur ce qu’il se passait après la mort, aussi n’y avait-il pas de notion concrète des enfers. En Kosaten en revanche, l’alavirienne avait appris l’existence du royaume des morts, où le terme de démon prenait son sens. Néanmoins, la définition de ces créatures restait floue, d’autant plus quand il s’agissait de communiquer entre personnes venant de mondes différents, et vivant encore ailleurs. A ce titre, la marchombre n’était pas sûr de savoir à quoi s’attendre quand Alastor se présentait comme une démon. Cela expliquait sa question, mais la réponse de son interlocuteur ne la convainquit pas.

" - Mmmh. Ça ne décrit guère plus qu’une nationalité au final. Originaire d’un endroit. Ça ne dit pas grand chose sur la nature de l’être, les intentions, les capacités … Je ne sais toujours pas à quoi m’en tenir avec vous. "

Ce qu’elle avait compris en revanche, c’était son côté “dealmaker”. Il fallait dire que le terme était assez éloquent en lui-même, et que depuis le début de cette discussion Alastor ne cachait pas son jeu. Il avait proposé des informations croustillantes à la jeune femme, avant de les retirer de la table en cherchant une contrepartie immédiate. Une petite saloperie. Mais elle n’avait besoin de rien, surtout pas de se compromettre avec un être de plus en plus louche. En revanche, un petit jeu tout ce qu’il y avait d’innocent … C’était plus pour lui plaire. Il y avait cependant quelque chose qu’elle ne comprenait pas dans ce qu’expliquait le dealmaker au sujet de ses tarifs élevés.
" - Vous pouvez apportez aux gens la puissance, l’amour, la renommée, je cite, d’un claquement de doigt ? Mais alors … Pourquoi n’avez-vous pas tout cela ? Le pouvoir, la puissance ? Enfin, dites-moi si je me trompe, mais que pourriez-vous faire contre moi qui je décidais, maintenant et tout de suite, de vous tuer ? Je ne dis pas ça comme une menace, promis je ne fais pas que ça quand je discute, mais que feriez vous contre un Zayro en puissance ?  "

Au cours de la discussion, le jeu put démarrer tranquillement. Si le démon commença par une question qui semblait anodine, il précisa néanmoins qu’il espérait ne pas se montrer indiscret. La marchombre se mit un post-it mental. Elle devait rester prudente. Il y avait fort à parier que toutes les questions qu’il poserait aurait pour lui une utilité, un intérêt, même celle qui avait l’air innocente. Mais ici, elle pouvait répondre sans problème.
" - Personne. Je n’ai une confiance aveugle en strictement personne, du moins sur Kosaten. Celui qui me viendrait en tête pour répondre à cette question c’est mon maître, Jalaab, mais nous ne sommes désormais plus dans le même monde. Quoi qu’il en soit, je fais cavalier seul. Je vous retournerais bien la question, mais vous m’avez vendu des informations croustillantes sur Rinkyu, et je sens que vous me décompteriez toute réponse comme comptant en échange de la mienne.  "
Elle se tut, et attendit la suite. Elle espérait que les informations qui soit-disant “valaient leur pesant d’or” la satisferaient. Sinon elle mettrait un terme rapide à leur petit jeu.

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L’attitude d’Alastor était quelque peu déconcertante. Alors que Lexi pensait qu’il chérissait le mystère autour de lui, un peu comme elle pouvait le faire pour elle-même, quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il prit la peine de détailler ce qu’était la nature d’un démon. Et la réponse était loin de lui plaire. Sans rien cacher, il n’hésitait pas à décrire ceux de son genre comme “néfastes, violents, sanguinaires”. Elle avait sous-estimé la déclaration de l’élu quand il avait dit qu’il faisait en sorte de paraître plus inoffensif qu’il ne l’était en réalité. Dans quoi avait-elle mis les pieds ? Se pouvait-il qu’Alastor soit au service du Chaos, comme les mercenaires alaviriens ? Elle ne montra rien, mais s’en voulut. Elle aurait dû sentir à quelle créature elle avait affaire. Elle ne commenta pas, et le laissa poursuivre, répondant à la deuxième question de la jeune femme.


Comment pouvait-elle se sentir si différente et semblable à Alastor en l’espace de deux questions ? Si, comme toute marchombre, elle vivait de liberté et d’harmonie, alors que le démon se nourrissait vraisemblablement de chaos ; elle se retrouvait dans ses paroles. S' il claquait des doigts et devenait soudainement la créature la plus puissante, la plus riche… que lui resterait-il à accomplir ? C’était quelque chose qu’on retrouvait beaucoup dans la philosophie marchombre, même si ce n’était pas le principe dont Lexi en particulier n’était pas la plus proche. Jalaab, son maître, avait fait de son mieux pour lui inculquer les principes d'individualité dans leur globalité, mais elle avait un ferme esprit de compétition. Elle observa le démon en plissant les yeux, semblant réfléchir.
“ - Vous êtes un être des plus intrigants…”
Et encore, elle n’avait pas tout vu.

La première question avait une utilité claire pour le démon, du moins du point de vue de Lexi. S' il savait en qui elle plaçait toute sa confiance, il pourrait toujours l’utiliser contre elle, en cas de besoin. Mais dommage pour le démon, la liste était vide. Elle aurait pu penser à Frisk, mais celle-ci l’avait déjà trahie une fois ; ou encore à Alathea, mais celle-ci l’avait visée de sa propre arme. Elle estimait énormément Reisha, mais elle ne la connaissait pas assez, et pouvait faire des erreurs, c’est ce qu’elle avait compris avec Tyr. Sur plus de mille années de vie, la route de la dirigeante avait croisé celle de Lexi sur cinq petites années, un grain de sable dans le désert. Nemesis enfin, était fondamentalement bon, mais parfois trop, quitte à n’en faire qu’à sa tête, comme la fois où il avait libéré Frisk malgré que Lexi lui ait expliqué en quoi ce n’était pas une bonne idée pour leur mission. Elle ne pouvait finalement se fier qu’à elle-même.

Malgré la pauvreté de cette réponse, bien que c’était toute la vérité, Alastor poursuivit le jeu de son côté, révélant une première information à Lexi. L’alliance entre Rhadamantys et Rinkyu, et leur voisinage. Cela étira un sourire amusé à la  jeune femme. A quel point Alastor la sous-estimait-elle ? Elle lui avait pourtant dit qu’elle avait espionné le clan Uchiha et s’y était infiltrée. Elle lui répondit d’un ton moqueur.
“ - Je sais déjà tout ça. J’espère que vous avez mieux, parce qu’on est loin de ce que j’appelle des informations croustillantes. Mais comme vous n’avez pas eu de chance avec votre première question, je vous laisse une seconde chance.”

Elle lui accorda donc une question supplémentaire, qui sonna comme la suite logique de la précédente. Lexi était solitaire, mais cela ne l’empêchait pas de considérer certains comme des ennemis. Elle prit un instant de réflexion.
“ - Et bien commençons par Rinkyu, en toute logique. Zayro Jinn, pour continuer chez les bleus. Iggir et sa clique de voleurs, mais ça c’est plutôt eux qui me considère comme une cible à abattre. Puis évidemment Zang, mais …”
“ Qui ne le tient pas en horreur ?” avait faillit-elle dire, avant de réaliser que pour Alastor, le fait de manger son peuple n’était peut-être pas si choquant. Elle préférait ne pas savoir.
“ - Mais Zang c’est très peu personnel, et Tyr, et là c’est très personnel.”
Elle prit une pause, estimant avoir fini, et se reprit au dernier moment.
“ -Oh ! Et cette saloperie de Kanzêtsu aussi, le Genchijin quoi. Ça m'a l’air à peu près tout.”
C’était tout, et elle considérait que ce n’était pas grand chose, surtout que pour une bonne partie des noms, personne ne pouvait se les piffrer, mais la longueur de cette liste tranchait avec le vide de la précédente.

A ça, le démon de la radio répondit en déployant son ombre, qui récita tout un échange qu’elle avait espionné. Seul Rinkyu était intelligible, mais ce n’était déjà pas si mal, surtout qu’Alastor laissa la discussion se dérouler dans son intégralité, ce qui représentait une quantité d’information énorme, et rattrapait sans mal le manque d’intérêt de son coup précédent. Lexi demeura intégralement silencieuse, ne ratant pas un mot de l’enregistrement. Ce Heiwa Jigoku était un des alliés de Bashô à la fondation de sa ville ? Elle tenta de retrouver son visage. Pour cela, elle devait se remettre les présents lors de la réunion qui avait convaincue la marchombre de s’allier au moustachu. Valentine, diplomate de Jaël Tekina. Elle-même, pour une éventuelle alliance avec Tenshi. Frisk, venue reprocher à Bashô la mort d’Ellen lors de la bataille de Shiriai. Le couple de félins humanoïdes. Zoro, mais dont le faux nom pour Bashô Tokaï était déjà Tacitus. Et l’homme venu avec une femme, et un enfant du village transformé en armée démoniaque par la sorcière de Minshu. C’était soit le félin, soit l’homme, mais au vu des attitudes ce soir-là, et de la difficulté de faire les choses incognito pour un félidé, ce devait être la deuxième option.

“ - C’est très complet cette fois comme information, commenta la marchombre, ça rattrape votre premier coup dans l’eau. A votre tour”
Elle n'insista pas plus, inutile de trop louer Alastor non plus, et le laissa poser une troisième question. Celle-ci désarçonna un moment Lexi, qui ne répondit donc pas tout de suite. Où était le piège ? Croyait-il qu’il pourrait l’empoisonner un jour ? Comme ci cela changeait quelque chose que ce soit son plat préféré ou non. Elle le fixa un moment, tâchant de deviner ses pensées, et finit par répondre.
“ - Un bon rôti de siffleur, sauce aux racines de Niam. Un dé-lice quand c’est bien cuisiné. Avec des petits oignons.”
Évidemment, ce qui était dommage pour le démon, c’est que Lexi prenait un coup de nostalgie en énonçant un tel plat : les ingrédients principaux de ce plat étaient typiquement Alavirien, et absents de Kosaten. Elle ne fit cependant pas preuve de mauvaise volonté et accorda au démon de lui décrire ce qui s’en rapprochait sur Kosaten.

Le démon en déduisit qu’elle était amatrice de viande, ce à quoi elle haussa les épaules. C’était une chasseuse, alors même si elle s’y connaissait en cueillette, la viande était sa principale source de nourriture. Elle ne dit rien, attendant la suite, et si c’était beaucoup moins croustillant qu’une discussion espionnée dans son intégralité, ce n’était pas si mal.
“ - C’est intéressant en effet. Je me demande qui je préfère à la tête de Reïfuu, Rhadamantys, Rinkyu ou Sou Reï… au vu de la facilité pour s’incruster chez Rinkyu, ça serait pas mal que ce soit lui. Ca me semble moins dangereux que Sou Reï, mais du coup  je prévois aussi que son remplacement ne soit pas pour tout de suite. Il est trop puissant, et malin.”
Quant à Rhadamantys… Il manquait probablement de finesse aux yeux de la marchombre, mais avait le mérite d’avoir démontré son efficacité.

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Les deux élus avaient fait trois manches de leur petit jeu, et s’il convenait parfaitement à Lexi, le démon y mit un terme, préférant quelque chose de plus libre puisqu’il souhaitait apprendre à la connaître. Il aurait pu continuer leurs échanges de questions-réponses puisque c’était pour lui un moyen tout aussi efficace d’obtenir des informations sur elle. Elle s’interrogea donc sur la raison pour laquelle il arrêtait le jeu, mais haussa les épaules avant de répondre.

“ - C’est normal de ne pas en connaître trop sur moi. Je ne suis pas du genre à étaler les informations me concernant. Et maintenant que j’en sais plus sur votre nature, vous comprendrez que je ne compte pas vous avouer la moindre force ou faiblesse qui pourrait vous être utile.”

Mais Alastor n’exigeait rien de trop sérieux - de toute façon il n’était pas en mesure d’exiger quoi que ce soit - et proposa même de commencer pour lancer la discussion. Ainsi il donna une bribe d’information, et si elle était intéressante, elle n’était pas très fournie. Ce que Lexi ne manqua pas de souligner.
“ - Ce n’est pas grand chose, mais ça amène beaucoup de questions. Êtes-vous mort avant de devenir un démon ? Aviez-vous une famille, des amis ?”
Elle se pencha légèrement vers le démon, le fixant de ses yeux gris.
“ - Et maintenant Alastor ? Vous avez des attaches ?”

Non pas que la marchombre cherchait à le piéger, en réalité quand elle décidait de vous nuir, ou de vous mettre en garde, elle savait faire le travail de recherche nécessaire au préalable. Comme elle l’avait fait pour l’Uchiha. En revanche, elle était réellement curieuse au sujet du démon. Qui était-il lorsqu’il était humain ?

Néanmoins, elle ne comptait pas l’interroger ainsi sans rien répondre en retour. Elle se recula à nouveau, se cala différemment contre le rocher, et croisa les bras. Tout ce qui datant de l’ère pré-cataclysmique ne pouvait être utilisé contre elle, et il y avait déjà beaucoup à dire.
“ - Je suis une marchombre. Dans mon monde, les marchombres forment une guilde, mais il n’y a pas d’équivalent ici. On doit passer une formation de trois ans, et j’ai été téléportée sur Kosaten à peine avant de finir la mienne.”
Cela avait été très frustrant d’abord, mais en réalité, elle n’avait plus rien à apprendre en tant qu’élève de Jalaab, et il attendait simplement que les dernières semaines ne passent pour officialiser la fin de la formation. Cependant, cela avait été couplé avec le sceau qui bridait ses compétences, et cela avait été dur pour Lexi. Elle avait mis des années à acquérir souplesse et force, rapidité et agilité, pour être à nouveau réduite au statut de débutante. Mais c’était loin derrière elle maintenant. Maintenant, elle faisait partie des élus les plus puissants de ce monde. Enfin … Elle était toujours loin derrière Zayro Jinn, trop loin. Elle songea à la cicatrice en forme de Z sur son ventre. Quel enfoiré à y repenser…

Elle avait attendu les diverses réponses de démon avant de poursuivre. Bien qu’officiellement, leur deal ne tenait plus, il y avait toujours une forme de donnant-donnant. Elle posa une nouvelle question.
“ - Depuis combien de temps êtes-vous ici ? Je me souviens de vous à Shûza, lorsque Grimm a débarqué chez les rebelles. Mais pas plus loin.”
Elle lui laissa le loisir de répondre, puis, qu'il lui ai retourné la question ou pas, précisa son propre cas.
“ - Je suis arrivée cinq ou six ans avant le cataclysme. Et je suis sortie de ma bulle temporelle il y a un peu plus d’un an. Ce qui est marrant…”
Elle esquissa un sourire provocateur.

“ - Ce qui est marrant c’est que vous semblez fier de pouvoir dire que Rinkyu côtoie l’un des fondateurs de de Shutô Tokaï, quand elle s’appelait encore Bashô Tokaï. Ce que vous ignorez, c’est qu’en réalité Bashô Tokaï s’est fondée sur une initiative populaire, et que Bashô en a naturellement pris les rênes, et ceux que vous appelleriez co-fondateur sont en réalité les alliés qu’il a réussi à convaincre.”
Elle laissa planer un instant de suspense, puis cracha le morceau. De toute façon, elle ne cachait pas ce qu’elle s’apprêtait à dire. Reisha était au courant, ainsi que Eleanor, Ellen, ou encore Frisk.
“ - Et je faisais partie de ceux-là. C’est pour ça que je me fichais un peu du côté “attention, Rinkyu fréquente un fondateur de Bashô Tokaï.”

La jeune femme poussa un soupir.
“ - Mais fini la politique, j’en ai ma claque. Je préfère encore continuer mon petit périple à travers Reïfuu. Et vous, qu’est-ce que vous comptez faire vis à vis des nations, et de tous les nœuds politiques qui s’y présentent ? ” conclut-t-elle.

Sharing secrets

Dans cette drôle d’entrevue qui se déroulait entre les deux élus, la marchombre montrait une prudence qui n’égalait que sa méfiance naturelle. Si Alastor le comprenait bien - avouant que lui non plus n’aurait pas confiance en lui-même - il souligna néanmoins que s’il cherchait à nuire à son interlocutrice, il s’y prendrait autrement.
“ - C’est vrai que je vous pense suffisamment malin pour ça, confirma la marchombre.”
Une fois ces états de faits admis, ils reprirent la discussion comme deux personnes qui apprenaient à se connaître en toute innocence, à la différence qu’il y avait fort à parier que chacun choisissait soigneusement ses mots.

Ainsi, Lexi apprit que le démon de la radio avait bel et bien connu une existence humaine avant toute chose, mais il ne s’étala pas dessus. Peut-être la considérait-il insignifiante en comparaison de sa vie de démon. En tant que tel, il s’était en revanche créé des relations proches, qu’il lui semblait regretter d’avoir perdues une fois arrivé sur le continent. D’autant plus qu’il n’avait pas forgé de nouvelles attaches sur ce dernier.

Mais il ne sembla pas s'apitoyer sur son sort et ramena rapidement le sujet sur les marchombres, dont la concernée lui avait rapidement parlé. Elle esquissa une moue montrant qu’elle réfléchissait un instant. Il n’existait tellement pas d’équivalent sur Kosaten qu’il était difficile de parler de sa guilde à un non-alavirien.
“ - Une guilde en tant que telle peut être vue comme la représentation d’un corps de métier. La guilde des commerçants vérifient par exemple que tout se passe bien entre chaque commerçant, que l’Empereur veille à ce que le commerce prospère, tout ça.  Mais la guilde des marchombres a un statut particulier. D’abord, être marchombre ce n’est pas un métier en soit. C’est … C’est tout un mode de vie. Une philosophie.

Un marchombre peut gagner sa vie de bien des façons, un peu comme un élu ici. La guilde nous donne une cohésion, un sentiment d’unité, et bien qu’un Conseil dirige celle-ci, ce n’est jamais simple, car les marchombres sont des individus forgés aux flammes de la liberté, l’indépendance et l’individualité. Le Conseil sert surtout à faire respecter Le Pacte des Marchombres. N’utiliser ses compétences que pour progresser sur la voie, et pas pour nuire aux autres, ou s’attribuer du pouvoir. Je pourrais difficilement vous expliquer tout ce que signifie être marchombre.”

La jeune femme se rendit compte que sa voix s’était légèrement teintée de passion en évoquant sa guilde, et des sentiments flous s’éveillèrent en elle. La nostalgie de ne plus avoir de lien avec sa guilde, mais aussi l’envie, peut-être, de la faire prospérer ici aussi. Elle se pinça les lèvres et conclut presque brusquement.

“- Mais les marchombres visent à faire grandir l’Harmonie, à repousser le chaos. Vous comprenez pourquoi plus j’en apprends sur vous, plus j’ai la sensation d’avoir affaire à un ennemi par nature. ”

Lexi avait plus que suffisamment parlé d’elle à travers cette longue description de la guilde, elle laissa donc le démon détailler la suite sans l’interrompre. Elle ne répondit pas non plus à la question cachée d’Alastor. Non, elle ne reconnaissait pas le nom d’Heiwa Jigoku, mais il était inutile de le préciser au démon. Elle songea un instant à la réunion à Bashô Tokaï, présidée par l’élu du même nom. Certains avaient-ils menti sur leur identité ? Était-ce cet homme étrange qui avait voulu manipuler les foules à l’encontre de la sorcière Ellen avec la présence d’un enfant qui n’avait rien à faire là ? Elle balaya ces questions dans sa tête. Peu importait.

Elle retint ce qu’il y avait à savoir sur Alastor. Il était encore un élu récent, ce qui était rassurant. Elle préférait ne pas le savoir trop puissant, surtout lorsqu’il expliqua à demi-mot qu’il mettait son nez dans des affaires juste pour y répandre ses vices. Elle retint une grimace, mal à l’aise, et jeta un œil aux prisonniers shinobi pour trouver une porte dérobée. Ils n’allaient pas rester inconscient éternellement, et le démon avait beau promis de ne pas les tuer, elle sentait qu’elle n’allait pas apprécier la suite.
“ - Je ne tiens pas à prolonger cet échange Alastor, bien qu’il fut instructif. Vous m’excuserez si je m’éclipse.”
Elle attendit sa réponse, et les deux élus se saluèrent avant qu’elle ne disparaisse dans la neige, abandonnant les shinobi à un sort plus triste qu’elle ne craignait.